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« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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11 novembre 2016

Ah, ces couples infernaux…

Classé dans : Musique — Miklos @ 0:46

Air : Mon p’tit cœur, vous ne m’aimez guère, &c.

Non, il ne s’agit pas de Donald et Hillary, mais de Pierrot et Catherine et de Colas et Lison. On vous avait présenté, il y a un temps, le premier. Pierrot reproche à Catherine d’avoir l’humeur « plus aigre qu’un citron vert » et de changer tout le temps d’avis et d’attitude, à tel point qu’il ne sait plus sur quel pied danser avec elle. Catherine, elle, lui répond qu’il n’est qu’un nigaud qui prend tout au premier degré et ne comprend rien à demi-mot : quand elle se couche dans l’herbe faisant semblant de dormir, eh bien, il la réveille et puis… plus rien. Et en plus, il est jaloux de Lucas qu’elle aime…

On a du mal à s’imaginer que ce Lucas qui plait à Catherine soit le père ou l’amant (on espère : pas les deux à la fois) de Lison, qu’aime Colas, mais en tout cas c’est aussi le troisième larron de ce couple-ci, qui s’engueulent mutu­el­lement, comme le rapportent ces deux chansons, à chanter sur le même air de Mon p’tit cœur, vous ne m’aimez guère :

Reproches de Colas

Un jour, le jeune Colas
Trouvit Lison sa bergère,
Qui v’noit de quitter le bras
Du gros Lucas son compère ;
Il l’abordit chapiau bas,
Lui disant, vous ne m’aimez guère,
Car tout ça n’vous touche pas ;
Hélas ! vous n’m’aimez pas.

Vous n’faites plus du tout d’cas
D’un berger qui parsevère,
Vous désirez mon trépas ;
Mais, las ! pour vous satisfaire
Y m’faudroit un coutelas,
Mon p’tit cœur vous n’m’aimez guère, &c.

Tout chacun dit, qu’j’ai des ratsAvoir des rats, avoir des rats dans la tête : avoir des caprices, des bizarreries, des fantaisies. ;
Je n’puis fermer la paupière,
Je jeune pour vos appas
D’une terrible magnière,
Autrefois j’étois si gras :
Mon p’tit cœur vous n’m’aimez guère, &c.

Vous disiais, queuqu’fois : Colas,
Passe devant not’ chaumière,
Je m’tiendrai dessus le pas ;
Ce souv’nir me désespère :
Nous y prenions nos ébats :
Mon p’tit cœur vous n’m’aimez guère, &c.

Souvent j’allions tout là-bas
Dans ce bosquet solitaire,
Nous promener pas à pas,
En dépit de votre mère,
Qui n’savoit rien du fracas,
Mon p’tit cœur vous n’m’aimez guère, &c.

Quant on lui contit le cas,
Ça la mit tout en colère ;
Pourtant, malgré son fracas,
Ma mine vous étoit chère.
C’n’est pas d’même à st’heure, hélas !
Je l’vois bien, vous n’m’aimez guère, &c.

Faut-il qu’avec tant d’appas
Vous soyez parfide & fière,
Et que j’parde tous mes pas,
Pour vous avoir cru sincère !
Vous m’plantez là pour Lucas ;
Hé, fi donc ! vous n’m’aimez guère :
Car tout ça n’vous touche pas,
Hélas ! vous ne m’aimez pas.

Le Grand Colas (ou : Reproches mutuels)

L’autre jour, le biau Colas,
Au fond d’un bois solitaire,
Vit la fille au gros Lucas
Qui dormait sur la fougère.
Il la tirit par le bras :
« Mon p’tit cœur, vous n’m’aimez guère,
Car tout ça n’vous touche pas ;
Hélas ! Vous n’m’aimez pas !

Je rôtis de vos appas,
Vous n’en êtes que plus fière ;
Mon cœur pousse des hélas
Qui feraient fendre une pierre.
Vous m’réduisez au trépas,
Mon p’tit cœur, etc.

Quand vous allais tout là-bas,
Dans les champs de votre mère,
D’œufs durs, de fromage gras
J’emplis votre panetière ;
Je vous y donne le bras :
Mon p’tit cœur, etc.

Je n’fais plus que tras repas,
Et devant votre chaumière,
Tou d’bout comme un échalas,
Je passe la nuit entière ;
Mes soupirs font peur aux chats :
Mon p’tit cœur, etc. »

Lison, voulant fuir Colas,
Sentit rompre sa jarr’tière ;
Ça l’i fit faire un faux pas :
« Ah ! méchant, qu’allez-vous faire ?
Vous m’mettrez dans l’embarras :
Je l’vois bien, vous n’m’aimez guère, etc.

Finirez-vous donc, Colas ?
J’ l’irai dire à votre mère.
Ouf ! vous me tordez le bras ;
Agit-on de c’te manière ?
Quel tourment j’endure, hélas !
Aye ! aye ! aye ! vous n’m’aimez guère, etc. »

Il prit deux baisers ou tras
Sur le sein de la bergère,
Puis il se croisit les bras,
Et resta là sans rien faire.
« Vous êtes donc las, Colas ?
Je l’vois ben, vous n’m’aimez guère,
Car tout ça n’vous touche pas.
Hélas ! Vous n’m’aimez pas. »

De La Borde.

Nouveau recueil de chansons choisies avec les airs notés. Tome second. À Geneve, MDCCLXXXV.

Les chansons d’autrefois. Vieux chants populaires de nos pères, recueillis et annotés par Charles Malo. Illus­tra­tions par Gustave Doré. Paris, 1861.

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