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1 juillet 2012

Un demi-siècle avant Escher…

Classé dans : Architecture, Littérature, Peinture, dessin — Miklos @ 16:54

« Or, parmi les constructions archi­tec­tur­ales qui symbolisent le mieux nos idées, rien n’est plus sédui­sant, plus compli­qué cependant, sous son apparente simplicité, que l’éta­blissement d’un escalier. Les architectes d’autrefois l’ont bien compris et ils se sont attachés à réaliser sur ce point des merveilles. Tantôt ce sont, comme à Chambord, deux escaliers enchevêtrés l’un dans l’autre, qui ne permettent point à une personne qui monte de rencontrer celle qui descend ; tantôt ce sont de curieux escaliers gothiques dont les savantes hélices semblent résoudre tous les problèmes de la géométrie transcendantale. Ce sont aussi, parfois, et plus simplement, des escaliers compliqués comme il en existe encore dans certaines vieilles maisons provinciales, qui s’entrecroisent savamment et qui desservent chacun certains étages déterminés. Lorsque l’on s’engage à tort dans l’un des deux escaliers, on n’aboutit point à l’étage que l’on voulait, on se trouve au-dessus ou au-dessous, et il faut un certain effort d’imagination pour retrouver le dessin général de ce labyrinthe.

Tout ceci, cependant, s’explique rapidement, pour peu que l’on y prête quelque attention, et l’on retrouve bientôt les raisons de cet illogisme apparent dans la superposition de constructions d’âges différents, réunies au cours des siècles.

Autrement angoissant est le problème de l’escalier qui, après une succession indéniable de marches, vous ramène à l’étage d’où l’on est parti. Ce sont des choses dont on sourit la première fois, en croyant à une erreur passagère ; ce sont des problèmes qui deviennent effrayants lorsqu’on s’obstine à en chercher la solution suivant les principes primitifs de la géométrie euclidienne à trois dimensions.

Et j’avoue, pour ma part, que j’éprouvai un réel soulagement le jour où je compris que si de pareils escaliers pouvaient exister, leur possibilité ne se concevait que dans un espace à quatre dimensions et que cela seul suffisait à donner une explication définitive du problème. Et bientôt, ce fut même avec un plaisir étrange que je parcourus quelques-unes de ces demeures invisibles, conçues par la géométrie transcendantale, où les étages se confondent, où le premier n’est pas nécessairement au-dessous du quatrième, ni le troisième au-dessus du rez-de-chaussée. » — Gaston de Pawlowski, Voyage au pays de la quatrième dimension. Paris, 1912. [On peut (doit !) lire ce texte, accessible en fin de ce billet.]


M. C. Escher, Montée et descente (détail). Lithographie. 1960.

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