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24 novembre 2013

Un matin d’octobre les arbres sanguinolaient, ou, Quelques bonnes feuilles

Classé dans : Arts et beaux-arts, Langue, Littérature, Photographie — Miklos @ 15:59

C’est l’heure exquise et matinale
Que rougit un soleil soudain.
À travers la brume automnale
Tombent les feuilles du jardin.
 
Leur chute est lente. On peut les suivre
Du regard en reconnaissant
Le chêne à sa feuille de cuivre,
L’érable à sa feuille de sang.
[…]
 
—  François Coppée, Matin d’octobre.

C’est en voyant la photo d’une forêt dont les arbres et le sol étaient couverts de feuilles écarlates que la phrase « Un matin d’octobre les arbres sangui­nolaient » m’est venue à l’esprit. Cette photo circule depuis au moins octobre 2012 sur l’internet sans qu’il soit possible d’en connaître l’auteur. Ici où là, il est mentionné qu’il s’agit d’une forêt en Pologne, et parfois il est même indiqué qu’il s’agit de « la forêt écarlate de Gryfino ». Or il semblerait que dans cette petite ville du nord de la Pologne il y ait déjà une forêt remarquable, qui se distingue par ses arbres curieusement tordus, principalement des bouleaux, ce qui n’est pas le cas de ceux de cette forêt écarlate qui ressemblent à des érables rouges, ces arbres « à la feuille de sang » qui sont endémiques à l’est de l’Amérique du nord.

Par contre, une autre photo d’arbres curieusement similaires par leurs couleurs et leurs formes à ceux de la photo mystérieuse, est datée 2001 et marquée d’un copyright, celui d’un photographe tchèque réputé, né en 1970, Frantisek Staud (qui se décrit « Traveler, photographer and publicist, scientist and university lecturer »). Cette photo – qu’elle soit de lui ou non, on ne le sait encore – est reprise pour illustrer des textes concernant l’automne au Japon

Revenons à « sanguinoler » : ce verbe n’existe dans aucun des dictionnaires qu’on ait consultés, et le Trésor de la langue française indique que l’adjectif sanguinolent provient directement du latin sanguinolentus. N’empêche : son utilisation, qu’on qualifierait techni­quement de barbarisme, est tout à fait compréhensible, et pourrait s’apparenter donc au néologisme, si l’on n’en avait trouvé aussi d’autres rares occurrences au XIXe et XXe siècles, tels ce « Quelques toits rouges sangui­nolaient parmi des verdures rares et se perdaient dans la tache uniformément jaunâtre du sol pelé ».

Cette citation est tirée d’un livre, Les casques blancs, d’un certain J.C. Holl, publié chez Ambert en 19??, selon les informations lacunaires de Google Books (où l’on ne peut évidemment pas en consulter le contenu). Cet ouvrage est absent du catalogue de la BnF, tandis qu’on y trouve plus d’une dizaine d’autres ouvrages de « Holl, J.-C. » (avec ou sans précision des dates de naissance et de mort, 1874-19..), dont certains publiés en 1903 chez le même éditeur – ce qui me laisse penser qu’il s’agit de la même personne –, et parvenus à la BnF par le dépôt légal – l’absence des Casques blancs en étant d’autant plus étonnante. Les voici :

— Les Deux idoles, [roman]. Ambert, 1903.

— Camille Pissaro et son œuvre. 1904 [sans mention d’éditeur].

— Chaos et lumières. Le Baiser d’Eve. 4e éd. Ambert, 1905.

— Les Salons du Printemps. Cahiers d’Art et de Littérature, 1905. [Disponible en ligne dans Gallica ; cette revue indique que ces cahiers sont publiés par J.-C. Holl]

— Le salon d’automne. Cahiers d’Art et de Littérature, 1905. [Disponible en ligne dans Gallica]

— L’œuvre de Raphaël Lewishon. Cahiers d’Art et de Littérature, 1906.

— Les Salons de 1906 illustrés. Cahiers d’Art et de Littérature, 1906.

— Le Salon d’automne 1906. Cahiers d’Art et de Littérature, 1906.

— Après l’impressionnisme, Librairie du XXe siècle, 1910.

— La jeune peinture contemporaine. Éds. de la Renaissance contemporaine, 1912.

— [Catalogue de l’]Exposition de peintures de A. F. Cals (rétrospective) et de sculptures de Paul Paulin Galerie Louis-le-Grand, (Pavillon de Hanovre). Du 2 juin au 2 juillet 1914.

— La Ville-chimère. Librairie des lettres, 1919.

En 1986, le catalogue raisonné de l’œuvre de Maximilien Luce cite un extrait de La Jeune Peinture Contemporaine en mentionnant son auteur comme « Le critique Jean-Claude Holl », seule occurrence qu’on ait trouvée de ces prénoms et nom (précisions qu’il y a un autre Jean-Claude Holl au catalogue de la BnF, mais d’évidence ce n’est pas le même…).

Quant à l’éditeur Ambert, il semble avoir été actif entre 1900 et 1914 (et principalement en 1903 et 1904).

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