Des mots, des mots, des mots…
Nous avons passé, nos pères ont passé et nos fils passeront dix ans de leur vie à peser des mots. Car on ne fait pas autre chose au collège. Des mots, des mots, des mots : pas d’idées. (…) Peseurs de mots, nous ne savons point peser les idées ni les faits. (…) Il est temps de ne point passer dix ans à essayer d’écrire élégamment, au lieu d’apprendre à penser solidement. (…) Avec notre pédagogie actuelle nous arrivons à former, sur cent élèves, quatre-vingt-dix-neuf ignorants et un pédant. Il faut mépriser, il faut repousser cette fatale méthode : delenda est.
Léon Gautier « Chronique : II. L’enseignement de l’histoire dans les lycées et collèges. Nécessité très-pressante d’une réforme absolue », in Revue des questions historiques, t. 10, 1871.
Léon Gautier (1832-1897) était archiviste et paléographe. Les quelques phrases ci-dessus sont extraites d’une chronique qu’il avait rédigée dans la Revue des questions historiques, t. 10. Paris, 1871. On trouvera ici ses deux premières parties, l’une concernant la conservation à long terme des sources historiques où il discute de divers modalités – réédition ou reproduction (bien avant l’invention de la numérisation) –, et l’autre consacrée à la critique des méthodes pédagogiques de son époque.