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« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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4 octobre 2025

«  Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément » – Nicolas Boileau (1636-1711)

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Dans un amphigouriLangage ou écrit obscur, embrouillé, peu intelligible rocambolesqueQui est plein d’invraisemblance, de péripéties extraordinaires, peuplé d’images abra­ca­da­bran­tesquesQui suscitent l’incrédulité par leur caractère improbable ou incohérent et d’hyperbolesFigures de rhétorique consistant à mettre en relief une idée en employant des mots qui vont au-delà de la pensée prolixesQui sont trop longs, diffus, chargés de détails inutiles, surgit l’Hippo­cam­pé­lé­phan­to­camélosVoir ci-dessous, chimèreÊtre ou objet bizarre composé de parties disparates, formant un ensemble sans unité fantasqueBizarre, extraordinaire, plein de fantaisie, d’originalité dont la seule silhouette paraissait un prolégomèneLongue introduction présentant les notions nécessaires à la compréhension d’un ouvrage à l’incongruQui déconcerte par son caractère étrange et plus ou moins ridicule. Son allure, tour à tour obséquieuseQui manifeste, qui marque un excès de respect, d’égards, etc. et farfelueBizarre, extravagante, fantasque, un peu folle, faisait de lui un parangonModèle, type accompli de bizarrerie dont la trompe exubérante se balançait avec une majesté emphatique. Autour de sa marche extravagante se déployait une cacophonieRencontre de mots, de syllabes, de sons désagréables ou ridicules insipide de vocables tarabiscotésExagérément ornés, recherchés, empreints de maniérisme, où des acrobaties syllabiques invrai­sem­blables formaient une véritable cataracte lexicale. Chaque pas de la bête engendrait un déluge d’allitérationsRépétitions d’une consonne ou d’un groupe de consonnes dans des mots qui se suivent, produisant un effet d’harmonie imitative ou suggestive capricieuses, un tournoiementMouvement agité auquel on ne résiste pas. d’assonances anfractueusesQui présentent des cavités profondes et irrégulières, souvent ramifiées, comme si la langue elle-même s’était éprise de sa propre luxurianceVigueur surabondante. Ainsi, dans ce foison­nementMultiplication, prolifération d’expressions biscornuesQui a une forme irrégulière, bizarre ; qui est de caractère absurde, extravagant, s’exerce l’art périlleux de dompter les mots les plus rétifsQui s’opposent à toute discipline, indis­ciplinés, rebelles, récalcitrants et de les plier au souffle du lecteur courageux.

— ChatGPT

Dans l’acte I, scène 4 de Cyrano de Bergerac (comédie de Jean Rostand), le Vicomte de Valvert provoque Cyrano en lui disant  « Vous… vous avez un nez… heu… un nez… très grand. », à quoi Cyrano lui répond par la célèbre « tirade du nez », dont voici un bref extrait :

Cyrano.
Ah ! non ! c’est un peu court, jeune homme !
On pouvait dire… Oh ! Dieu ! … bien des choses en somme…
En variant le ton, – par exemple, tenez :
Agressif : « Moi, monsieur, si j’avais un tel nez,
Il faudrait sur-le-champ que je me l’amputasse ! »
Amical : « Mais il doit tremper dans votre tasse
Pour boire, faites-vous fabriquer un hanap ! »
[...]
Pédant : « L’animal seul, monsieur, qu’Aristophane
Appelle Hippocampéléphantocamélos
Dut avoir sous le front tant de chair sur tant d’os ! »
[...]

28 septembre 2025

Mal traduire un auteur, c’est ajouter au malheur de ce monde

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Le blog La Lettre Sépharade a publié, il y a quelques jours, un article intitulé « Le rabbin Jonathan Sacks est décédé il y a 5 ans. Son nouveau commentaire de la Torah fait des vagues en Israël ». En voici le début :

TEL AVIV – Il y a trois ans, l’éditeur basé à Jérusalem, Matthew Miller, a reçu un appel du chef de la plus grande chaîne de librairies d’Israël.

Le directeur général de Steimatsky, Ayal Grinburg, a déclaré qu’il regardait les traductions des œuvres de feu Jonathan Sacks volant des étagères et voulait savoir pourquoi un rabbin britannique se connectait avec des lecteurs israéliens souvent indifférents aux voix extérieures.

Miller, originaire de Brooklyn qui avait vécu en Angleterre avant de s’installer en Israël, a emmené Grinburg pour déjeuner pour expliquer le «phénomène» des sacs, l’ancien chef rabbin du Royaume-Uni. Dans son écriture et ses apparitions publiques fréquentes, les sacs ont amené les valeurs de la Torah sur la philosophie, la politique et les débats éthiques de l’époque. Alors qu’il se battait parfois avec des Juifs à sa droite et à sa gauche, il a tenu une stature comme intellectuelle publique que peu de dirigeants juifs de sa génération pouvaient égaler.

Quel charabia ! Curieux, non ? La suite – en voici quelques extraits – est à la hauteur de ce début :

La traduction est simple et lisible. « Autant les Yea et les Thous », a déclaré Dayan Ivan Binstock de Beth Din à Londres, qui a passé en revue le texte. […]

Au moins trois présidents israéliens et comme de nombreux premiers ministres ont parlé de sacs avec révérence et tiré sur ses écrits. Le chef de l’opposition, Yair Lapid, qui est laïque, a déclaré qu’il était «la seule personne que je serais heureuse d’avoir comme rabbin» […]

Parler avec révérence de sacs (il s’agit évidemment de Sacks) et en même temps tirer sur ses écrits ? Et quant à Monsieur Yaïr Lapid, il ne serait sans doute pas très heureux qu’on dise de lui qu’elle est heureuse…

L’héritage des Sacks Rabbin, dirigé en Israël par son frère cadet Alan Sacks […]

Seize de ses livres ont maintenant des éditions hébreuses […]

«Il était essentiel pour nous de trouver quelqu’un avec l’émotion et la sensibilité à communiquer [his] Message sans perdre sa personnalité »

Comme on pouvait déjà s’en douter, ce « style » abra­ca­da­bran­tesque semble bien provenir de la traduction par une IA hallu­cinante d’un article en anglais. Et il suffit alors de prendre une expression typique de ce texte, par exemple « trois présidents israéliens », de la traduire en anglais (“three Israeli presidents”), d’y accoler le mot « Sacks » et d’effectuer une recherche en ligne.

Et bingo ! La première réponse mène vers un article en très bon anglais du très sérieux Jerusalem Post (quotidien israélien de langue anglaise, fondé en 1932), indiquant provenir de la JTA (Jewish Telegraphic Agency, ou Agence télégraphique juive, agence de presse internationale fondée en 1917) : c’est d’évidence la source de cette hallucinatoire traduction mot pour (mauvais) mot qui en reprend aussi les illustrations, mais qui n’en cite ni la source (JTA), ni le sous-titrage des illustrations qui en comprennent les attributions.

On remarquera aussi que le nom de l’auteur de l’article en français est celui de l’éditeur de la Lettre Sépharade, alors que l’article original, dont il n’est qu’une pauvre traduction littérale, a été rédigé par la journaliste Deborah Danan.

Pour finir, voici quelques exemples de la source en anglais et du résultat en français :

Steimatsky chief executive Ayal Grinburg said he was watching translations of works by the late Jonathan Sacks fly off the shelves and wanted to know why a British rabbi was connecting with Israeli readers, often indifferent to outside voices.

Le directeur général de Steimatsky, Ayal Grinburg, a déclaré qu’il regardait les traductions des œuvres de feu Jonathan Sacks volant des étagères et voulait savoir pourquoi un rabbin britannique se connectait avec des lecteurs israéliens souvent indifférents aux voix extérieures.

Miller, a Brooklyn native who had lived in England before settling in Israel, took Grinburg to lunch to explain the “phenomenon” of Sacks, the former chief rabbi of the United Kingdom.

Miller, originaire de Brooklyn qui avait vécu en Angleterre avant de s’installer en Israël, a emmené Grinburg pour déjeuner pour expliquer le «phénomène» des sacs, l’ancien chef rabbin du Royaume-Uni.

At least three Israeli presidents and as many prime ministers have spoken of Sacks with reverence and drawn on his writings. Opposition leader Yair Lapid, who is secular, said he was “the only person I’d be happy to have as my rabbi,”

Au moins trois présidents israéliens et comme de nombreux premiers ministres ont parlé de sacs avec révérence et tiré sur ses écrits. Le chef de l’opposition, Yair Lapid, qui est laïque, a déclaré qu’il était «la seule personne que je serais heureuse d’avoir comme rabbin»

Il s’avère en fait que la dizaine d’articles qu’on a testés proviennent tous de deux sites d’informations anglophones — Forward et JTA — ce qui peut être légal (c’est par exemple le cas de beaucoup de sites de presse) mais nécessite non seulement un accord, mais une attribution et une traduction correctes…

Si « l’œuvre de traduction s’inscrit dans le cadre juridique du droit d’auteur en tant qu’œuvre de l’esprit », c’est dû au fait que « La traduction ne saurait être assimilée à un travail mécanique »i, ce qui est pourtant le cas en l’occurrence.

Le titre de ce billet est, bien évidemment, une variante de Mal citer un auteur, c’est ajouter au malheur du monde.
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i  Hélène Maurel-Indart. « Traduction, plagiat et autres formes d’atteinte au droit d’auteur ». Histoire des traductions en langue française, XXe siècle, Sous la direction de Bernard Banoun, Isabelle Poulin et Yves Chevrel, Ed. Verdier, 2019. hal-03607740

5 septembre 2025

« HOMMES ET FEMMES LAPINS·ES »

Photo prise ici, le 5 septembre 2025 à 8h10.
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Si vous vous demandez de quoi il s’agit, consultez ce blog ou écrivez à l’adresse indiquée, et si vous n’osez faire ni l’un ni l’autre, regardez la vidéo ci-dessous, réalisée par quelqu’un qui avait osé le faire.

Et pour conclure :

Les Hommes-Lapins et les Femmes-Lapines
 
Mi-hommes, mi-lapins, vêtus de cravates neuves,
Ils allaient se vanter au clair de la grand’gueule :
« Voyez nos grands discours, voyez notre savoir,
Nous savons diriger, régner et concevoir ! »
 
Leurs moustaches froissaient les cols de leur chemise,
Leurs oreilles, dressées, leur donnaient l’air de mise ;
Mais soudain, dans les champs, un parfum de trèfle vert
Coupa court aux discours qu’ils croyaient si sévères.
 
On vit ces beaux messieurs, tout gonflés de paroles,
Tomber à quatre pattes et fouiller les corolles,
Grignotant chaque brin comme de doux enfants,
Oubliant dignité, prestige et beaux vêtements.
 
Les Femmes-Lapines, au seuil de leur terrier,
Regardaient ce manège et riaient de pied en pied :
« Qu’ils sont drôles, ces hommes, à vouloir se grandir,
Quand il suffit d’un brin pour les faire bondir ! »
 
MORALE :
La bête suit son cours et garde sa droiture ;
L’homme croit s’élever, il tombe en caricature.
 
                                      — ChatGPT

27 août 2025

Une migraine infernale

Classé dans : Humour, Littérature, Peinture, dessin, Progrès, Santé, Sciences, techniques — Miklos @ 13:05

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«J’ai une migraine ! Infernale !

C’est comme si… il y avait un métro qui me traversait la tête.

Je prendrais bien de l’aspirine… Mais…

Lorsque j’en prends, la migraine s’arrête… mais le métro… aussi…

Alors, il y a des gens qui descendent… ça fait un ramdam à l’intérieur !

J’ai les oreilles qui sifflent !
Alors, dès que les oreilles sifflent… les portes se referment, le métro repart.»

Et la migraine revient !

Infernal !

— Raymond Devos

12 août 2025

De l’esprit de parti et de son effet destructeur sur la société

Classé dans : Littérature, Politique, Société — Miklos @ 22:33

Le texte qui suit, extrait de Bibliothèque ancienne et moderne de Jean Le Clerc (1716), est une belle critique toujours d’actualité d’un ouvrage traduit de l’anglais, Le Spectateur, ou, Le Socrate Moderne, où l’on voit un portrait naïf des mœurs de ce siècle, t. II, 1716. L’édition originale, The Spectator, était un recueil d’articles rédigés principalement par Richard Steele et Joseph Addison, créé et lancé en 1711 (à ne pas confondre avec l’hebdomadaire britannique éponyme, créé en 1828). Jean Le Clerc (1657-1736) était un théologien et pasteur protestant genevois qui fut également historien, critique et journaliste.

«J’ai déja parlé au long du Spectateur, dans cette Bibliothèque, Tome I, p. 383. On peut connaître par-là le dessein de cet ouvrage, composé de discours sur toutes sortes de sujets qui ont quelque rapport aux mœurs, et surtout aux mœurs des Anglais, que les auteurs se sont proposés de purifier de bien des défauts en en faisant voir le ridicule. On en a donné des échantillons qui ont beaucoup plu à ceux qui ne peuvent pas recourir à l’original.

Voici le second tome de la version française de cet ouvrage, dont le premier s’est très bien débité. Il y a ici 70 Discours, qui sont la plupart d’un usage plus général que divers de ceux du volume I qui ne regardent que des manières anglaises et qui ne sont pas fort connues hors de l’Angleterre. Il y a néanmoins divers endroits qu’on peut lire avec plaisir et avec fruit, quoiqu’ils regardent plus particulièrement ce pays-là qu’un autre, et que l’on peut même appliquer à d’autres désordres, sujets aux mêmes suites, comme les Discours XXX et XXXVI, où il est parlé de l’esprit de faction.

Depuis le temps de Cromwell, il y avait toujours eu en Angleterre deux partis, dont l’un était celui de la Cour, et l’autre celui de ceux à qui la conduite de la Cour ne plaisait pas. Ces deux partis éclataient, en toutes occasions, l’un contre l’autre, et ils avaient tour à tour le dessus dans les Parlements. Ils s’aigrirent encore davantage sous le règne du roi Guillaume et de la reine Marie, mais ils vinrent à l’excès d’emportement les dernières années de la reine Anne, auxquelles le Ministère travailla, par toutes sortes d’artifices, à ruiner entièrement ceux qui étaient zélés pour la religion protestante et pour la liberté de leur patrie, que l’on nomme communément Whigs, comme l’on appelle Tories ceux qui leur sont opposés, qui ne se mettent guère en peine, à ce qu’on dit, de la sûreté de la religion protestante ni de la liberté de leur pays. On les voit encore aujourd’hui violemment échauffés les uns contre les autres, et il n’y a que le temps qui les puisse guérir, sous l’autorité d’un Prince calme et ennemi de toutes sortes d’excès, tel qu’est aujourd’hui le roi George ; qui pourrait sans peine, je l’ose dire sans crainte d’être démenti, faire du bien aux deux partis, sans distinction, pourvu que l’une de ces factions cessât de le traverser et de s’opposer au droit indubitable qu’il a à la Couronne. Mais pendant qu’elle demeure son ennemie, il est obligé, par toutes les règles de la prudence, de s’en garder et de la mettre hors d’état de lui nuire et de perdre en même temps sa patrie. Le naturel de la nation, qui n’est ordinairement pas assez tranquille, irrité d’ailleurs par mille artifices des mal-intentionnés, fait craindre aux honnêtes gens que l’on ne lui puisse pas rendre le calme, aussi tôt qu’il serait à souhaiter, en tenant la balance égale entre les deux partis. Mais on ne doit pas désespérer de voir cet heureux temps sous un gouvernement comme celui d’à présent, qui n’a point d’intérêt à entretenir les animosités mais au contraire à les apaiser, et qui a toute la sagesse et la patience qu’il faut pour les diminuer de jour en jour. La manière d’élever la jeunesse pourrait beaucoup contribuer à cela, si ceux qui auraient ce soin étaient des gens habiles, amis de la paix, et d’ailleurs soutenus de quelque réputation. On verrait sortir de leur école en peu d’années des sujets plus modérés en toute manière que ceux qui sortent des lieux établis pour cela, mais qui sont tout le contraire de ce à quoi ils ont été originairement destinés.

Pour revenir à notre auteur, il raconte dans le XXVe Discours, pour montrer la chaleur des partis, que du temps des querelles des parlementaires et des royalistes, un chevalier de ses amis étant fort jeune et devant aller dans la rue Ste Anne, demanda à un homme qu’il rencontra le chemin de la rue Ste Anne, et que cet homme, au lieu de lui répondre à ce qu’il demandait, lui répondit : Petit chien de papiste, qui a fait cette Anne sainte ? C’était un presbytérien. Pour éviter une semblable réponse, il demanda à un autre, qui se trouva un Épiscopal, où était la rue d’Anne. Il en fut traité de pourceau galeux, et on lui dit qu’elle était sainte avant qu’il fût né, et continuerait à l’être après qu’il ferait pendu. Ce sont là des douceurs de la populace irritée et aveuglée de l’esprit de parti. Il n’y a point de si grand malheur que celui-là ; il divise une seule nation en deux corps, et les rend aussi ennemis l’un de l’autre que s’ils étaient de deux nations, dont les intérêts fussent opposés. Ces discordes ruinent le pays et agrandissent l’ennemi commun des deux partis. Elles influent dans les mœurs et dans les opinions des hommes. Elles changent même les idées que l’on avais de la vertu, et détruisent encore le sens-commun. Tout ce qui peut servir le parti que l’on a épousé est bon, tout ce qui peut lui nuire est mauvais. Quand une opinion fausse semble le favoriser, cette opinion devient vraie ; et la vérité, nuisible à la faction, devient à son tour inévitablement fausse. Comme on n’a aucun principe, on varie sur tout, sans se mettre en peine de ce qu’on a soutenu auparavant, selon le besoin présent.

Pour déraciner des esprits cette étrange passion, l’auteur propose, dans le Discours XXVI de faire une ligue entre les honnêtes gens de tous les partis, où l’on s’oblige de signer que l’on croit que deux et deux sont quatre, que le blanc n’est pas noir et que le noir n’est pas blanc, de le dire toujours, et de regarder comme ennemis ceux qui diront le contraire ; c’est à dire, de ne plus juger, ni parler seulement par passion, et par intérêt. Il y fait voir fort agréablement les effets également ridicules et dangereux de l’esprit de parti. Ces endroits méritent d’être lus et relus de ceux qui s’en laissent entêter. Nous n’avons pas de place ici pour les rapporter tous entiers.

[...]

On peut encore appliquer ce qu’il dit de l’esprit des factions et de la chaleur avec laquelle on les défend, aux querelles de religion, et de théologie qui arment les sociétés chrétiennes l’une contre l’autre, et qui divisent les membres d’une même société avec une violence incroyable. Ainsi quoi qu’il y ait ici beaucoup de choses qui regardent directement les Anglais, les autres nations ne laissent pas d’en pouvoir profiter.

Au reste, on peut dire que les deux tomes du Spectateur sont traduits avec autant de fidélité et d’exactitude, que la différence des langues l’a pu souffrir. La langue anglaise est si abondante en termes et si hardie, qu’il est fort difficile qu’on l’égale en français, et les versions ne paraissent jamais si vives» que les ori­gi­naux, à moins qu’on ne prenne trop de liberté ; ce qu’on ne doit jamais faire, et surtout en des livres de cette nature.

Jean Le Clerc : Bibliothèque ancienne et moderne (1716)

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