Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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22 février 2006

Beauty is in the eye of the beholder

Classé dans : Arts et beaux-arts — Miklos @ 2:55

Ida Lowry (Katherine Helmond)
dans Brazil

Dans sa quête souvent insensée de l’idéal, l’homme cherche à corriger les effets d’accidents mineurs ou graves ou des défauts imaginés ou réels de la nature qui affectent sa personne, afin de mieux correspondre aux critères (pour certains relatifs et subjectifs) de beauté. Il en va de sa perception de l’image qu’il croit projeter – et qui n’est pas toujours celle qui est réellement perçue par autrui : d’aucuns se pensent bien plus beaux qu’ils ne le sont aux yeux des autres, tandis que certains souffrent du sentiment de ne pas l’être quand bien même ils dégagent un charme certain. À côté de réels miracles de la chirurgie esthétique réparatrice, on a vu les ravages qu’elle peut opérer sur ceux qui en abusent jusqu’à se transformer en poupées Barbie pathétiques et inhumaines auxquels semble réservé le sort d’Ida Lowry dans le film Brazil (quel chef-d’œuvre !).


L’Homme de Néandertal

Si chez le vivant il n’y a pas que la plastique qui compte – la dynamique d’un regard, d’une expression, d’un geste peut illuminer un visage ingrat – le domaine de la sculpture forensique n’est concerné que par la forme : il vise à réaliser une reconstruction tri­di­men­sionnelle aussi réaliste que possible d’un visage d’une personne morte, parfois depuis longtemps, à partir d’élé­ments pure­ment physiques et d’infor­mations de tous ordres (géné­tiques, histo­riques, cultu­relles, artis­tiques…). La fascinante émission À visage découvert diffusée récemment par Arte montrait le travail étrange d’Élisabeth Daynès, artiste experte de la recons­truction faciale en sculptures hyper­réalistes. Ses travaux, entre sciences et art, sont commandés aussi bien par les paléon­tologues, archéo­logues, anthro­pologues ou bio­lo­gistes que par les grands musées aux quatre coins du monde. Elle a en particulier travaillé sur les crânes de nos ancêtres – de l’homme de Néandertal à Lucy en passant par Ötzi – et aidé des experts en médecine légale. Lors de ce reportage, on l’a vu donner graduellement forme à la tête d’une Ostrogothe âgée de 1500 ans à partir du reste d’un crâne, en expliquant ses choix. Ce domaine, finalement, produit le même type de représentation que l’on peut trouver au Musée Grévin à Paris ou chez Madame Tussaud à Londres (née Marie Grosholz à Strasbourg en 1761) : une reproduction hyperréaliste grandeur nature d’un être humain, connu ou inconnu.

Tout autre est l’œuvre extraordinaire de Ron Mueck, qui vient d’être exposée à la Fondation Cartier à Paris. Cet artiste australien crée des statues d’êtres humains banals, absolument saisissantes autant par le réalisme extrême dans le plus infime des détails – cils, poils, taches de la peau, rides… – que par la taille hors du commun de ses sculptures : soit très petites, soit très grandes. Cette combinaison donne le sentiment irréel de se trouver pris dans un autre espace-temps : ces êtres paraissent si vivants, et pourtant ils sont immobiles, comme si le temps s’était arrêté ; ils sont si réels et si petits ou si grands, que c’est nous, le public, qui avons le sentiment d’être des ogres ou des nains, foule tournant silencieusement autour de ces être plus vivants que nous. À les voir ainsi d’un coup d’œil pour ceux qui ne font que quelques dizaines de centimètres, ou à pouvoir en voir des détails magnifiés de ceux qui font plusieurs mètres, on semble saisir certains aspects de la condition humaine qu’on perçoit rarement in real life : du haut d’un gratte ciel ou le nez contre la peau. On en ressort avec un curieux sentiment de vertige et de mélancolie : ces personnages, jeunes et vieux, solitaires même lorsqu’ils sont en couple, ont un regard perdu, parfois las ou désabusé. La chair est triste, hélas…

À voir :
Ron Mueck à la Galerie James Cohan

Pas de commentaire »

  1. oui les sculptures sont tout à fait étonnantes..en particulier celles qui donnent une image de la réalité que l’on trouve rarement dans les musées de cire: On ne reconstitue pas une scène historique mais une scène de la vie comme l’accouchement qui nous impose une réaction.

    Commentaire par zopiros59 — 23 février 2006 @ 8:39

  2. [...] uit de synthèse artistique de son génial créateur) qu’on prétend nous faire entendre. Là, c’était la reconstruction faciale hyperréaliste qu’effectue Élisabeth Daynès à parti [...]

    Ping par Miklos » Voix du passé et voie du futur — 4 juin 2006 @ 18:29

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