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« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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9 août 2018

Life in Hell : Pharmacies, je vous hais (sauf une)

Classé dans : Actualité, Santé, Économie — Miklos @ 23:57


La Pharmacie rustique, ou Représentation exacte de l’intérieur de la Chambre, où Michel Schuppach connu sous le nom du Médecin de la Montagne, tient ses Consultations.
Dessiné d’après nature par G[ottfried] Locher en 1774. Source. Plus d’informations ici.
Cliquer pour agrandir.

Ce n’est que récemment qu’Akbar a entendu parler de la pharmacie Citypharma. La différence de prix des produits – autant médicaments que parapharmacie – entre ceux pratiqués dans les pharmacies du quartier d’Akbar et celle-ci est incroyable, comme on peut le voir ci-dessous : le médicament A est 4,5 fois plus cher dans une pharmacie lambda que chez eux. Ce n’est donc pas étonnant qu’en journée elle soit envahie de clients. La meilleure heure pour y aller est donc… 8h15, peu avant l’ouverture. Akbar s’y précipite dorénavant.

Médicament Pharmacie I Pharmacie II Citypharma

Médicament A

boîte de 28 : 46,90 €
(1,675 €/unité)

boîte de 84 : 30,99 €
(0,369 €/unité)

boîte de 84 : 129,90 €
(1,546 €/unité)

Médicament B

boîte de 18 : 8,24 €
(0,458 €/unité)

boîte de 18 : 4,99 €
(0,277 €/unité)


Idem (détail). Cliquer pour agrandir.

Jeff et Akbar sont les personnages d’une série de bandes dessinées de Matt Groening, qui est aussi le père de la fameuse – et infâme – famille Simpson.

12 juillet 2018

L’agriculture bio française s’expatrie

Classé dans : Actualité, Cuisine, Environnement, Nature, Photographie, Santé, Économie — Miklos @ 9:24

Les  fruits en provenance d’Argentine, Chili et Espagne dans des cagettes marquées « Cultivateurs français ». © Miklos 2018.Cliquer pour agrandir.

Comme on peut le voir dans les photos ci-dessus, prises dans le magasin Bio C Bon de la rue du renard, des fruits en provenance d’Argentine, du Chili et de l’Espagne y sont produits par des culti­vateurs français. On savait bien que l’agriculture française était en crise, mais à ce point ?

Tant qu’à faire, on aurait préféré l’inverse : que des cultivateurs argentins, chiliens et espagnols cultivent en France ces fruits, ce qui évi­terait leurs frais énergétiques de transports qui n’ont rien d’éco­logique.

23 décembre 2014

Life in Hell : bio c si bon que ça ?, ou, Horreur pour potage Aurore

Classé dans : Actualité, Cuisine, Nature, Santé — Miklos @ 17:40

Akbar veut refaire le délicieux potage Aurore dont il a trouvé la recette chez, il vous en donne mille, Ginette Mathiot, bien évi­demment. C’est une soupe de saison : potiron, tomates, pommes de terre, généreusement agrémentés de beurre, de crème fraîche, d’œuf et de tapioca comme il se doit pour toute bonne soupe d’hiver bien française destinée à tenir au corps et à réchauffer le cœur, à laquelle il rajoute, au moment de servir, du râpé au trois fromages (maasdam-emmental-mozzarella) et des croûtons. De quoi se pourlécher les babines.

Sans attendre, il se précipite chez son Bio C Bon favori ; c’est là qu’il se fournit en fruits et légumes qu’il pourra éven­tuel­lement consommer, crus ou cuits, avec leur peau (ah ! le citron confit, soupire-t-il d’aise), celle-ci n’étant pas saturée de produits chimiques de tous ordres destinés à les faire reluire aux yeux des consommateurs tout en tuant sans coup férir tous les insectes qui seraient attirés par ces fruits plus-que-parfaits.

Il se dirige vers le stand des légumes pour y prendre un morceau de courge musquée qu’il avait précédemment utilisé à cette faim fin. Quelle n’est pas sa surprise de constater que toutes les portions (emballées sous cellophane) de ce légume sont soit couvertes de tâches de moisissure, soit carrément liquéfiées (à tel point que le sol en est mouillé) ! Même la baguette de la marraine de Cendrillon n’aurait pu y remédier, et quant à s’en servir pour Halloween, c’est trop tard.

Horresco referens, Akbar interpelle un vendeur et lui montre ce désastre. Celui-ci lui répond qu’on avait dû oublier de s’en occuper ce matin-là. Akbar se dit in peto que cette explication ne tient pas la route : d’évidence, cela fait plusieurs jours que les tranches de ce pauvre légume avaient dû séjourner à l’étalage pour être dans cet état de décom­position avancée. Le vendeur rajoute qu’il va chercher un cageot de remplacement : ce sont des courges reçues et emballées ce matin-même, précise-t-il italiquement.

Quelques longues minutes passent, les courges présumées fraîches sont apportées. Akbar examine de plus près le contenu du nouveau cageot, et constate que toutes les portions portent une date d’emballage remontant à six jours en arrière et une date limite du surlendemain. Il en déduit que le magasin a conservé ces courges autrefois fraîches dans ses réfrigérateurs pour les mettre à la disposition du public juste avant qu’elles ne pourrissent à leur tour.

Akbar se dit alors pensivement qu’il ne suffit pas qu’on affiche un label bio pour que ce qui le porte soit de qualité. Il commence à se demander si tout le reste de la chaîne alimentaire dans ce magasin fait ainsi fi des principes d’hygiène : se peut-il que d’autres produits qui s’y vendent soient avariés sans que cela soit visible à l’œil nu ?

Si c’est le cas, il ne lui reste comme alternative que d’en faire pousser sur son rebord de fenêtre.

Quelques jours plus tard, Akbar retourne au magasin en question. Par curiosité, il jette un œil aux courges musquées. Il constate que ce sont celles qui avaient remplacé le cageot avarié : même date d’emballage, même date limite de consommation. Or cette dernière est dorénavant dépassée de deux jours. Akbar n’est pas vraiment surpris. Il le signale à un vendeur qui s’empresse d’enlever le cageot.

À ce jour, Akbar n’a pas reçu de réponse à la lettre de réclamation qu’il avait envoyée à la chaîne après avoir trouvé les courges avariées. Akbar n’est pas vraiment surpris. Par acquis de conscience, il en envoie une seconde dans laquelle il relate ce nouvel épisode, avec copie cette fois à la direction départementale de la protection des populations.

Jeff et Akbar sont les personnages d’une série de bandes dessinées de Matt Groening, qui est aussi le père de la fameuse – et infâme – famille Simpson.

11 octobre 2014

La force de conviction en tant que médecine douce pour les maux de ce monde

Classé dans : Actualité, Langue, Médias, Politique, Santé — Miklos @ 13:44


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Le secrétaire général de l’ONU est d’évidence adepte du dialogue comme stratégie de gestion de crises de tout genre, comme le montre aussi cet extrait-là :


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Ban Ki-moon peut s’approprier cette belle citation : « J’écris ces lignes avec toute la force de conviction d’un homme animé de la passion du bien de l’esprit de la lutte contre le mal, sous toutes les formes ou apparences qu’il prend pour accabler la pauvre huma­nité. » (Jean-Pierre Hureaux, Notre délivrance de toutes les maladies par la médecine naturelle préventive et curative, précédée de l’Intro­duction à la santé et à la vie, et suivie de La préservation et la curation du choléra. Paris, 1866)

25 février 2014

Oblativité et altruisme

Classé dans : Langue, Religion, Santé, Société — Miklos @ 15:24

Oblativité est un terme – qui n’a rien à voir avec un certain tube – introduit en psychanalyse dans les années 1920, et attribué à Édouard Pichon (1890-1940), personnage que l’on pourrait qualifier de poly­graphe : il était tout à la fois médecin, psychanalyste et gram­mairien, et sa production écrite s’étend à ces domaines.

On mentionnera notamment le monumental ouvrage en sept volumes qu’il a écrit avec son oncle, le linguiste Jacques Damourette (1873-1943), Des mots à la pensée. Essai de grammaire de la langue française, et à propos de quoi Jacques Lacan écrivait :

«Cent psychanalystes français ne feront pas faire un pas à sa connaissance [de la psychanalyse), tandis qu’un médecin, d’être l’auteur d’une œuvre géniale (et qu’on n’aille pas imaginer ici quelque sympathique production de l’humanisme médical), »a maintenu, sa vie durant, le style de la commu­ni­cation à l’intérieur d’un groupe d’analystes contre les vents de sa discordance et la marée de ses servitudes.

C’est d’ailleurs chez Pichon que Lacan a pris le terme de forclusion (et, selon Michel Arrivé, des concepts fondamentaux). En effet, « forclusif » puis « forclusion » y sont ainsi introduits dans le tome premier de l’ouvrage susmen­tionné au chapitre « La négation » :

«Le second morceau de la négation française, constitué par des mots comme rien, jamais, aucun, personne, plus, guère, etc.Pas appartient à ce groupe, mais comme il possède des pouvoirs particuliers de surnégation (ex. : « çà n’est pas rien », « je ne fais pas que de la peinture »), nous ne le prendrons pas comme type dans ce rapide exposé. Le lecteur en trouvera dans les livres suivants l’étude détaillée., s’applique aux faits que le locuteur n’envisage pas comme faisant partie de la réalité. Ces faits sont en quelque sorte forclos, aussi donnerons-nous à ce second morceau de la négation le nom de forclusif. […] Pour bien nier, il faut non seulement que j’affirme que le fait n’apparaît pas dans mon champ de connaissance »(forclusion), mais encore que, par une sorte de contre-épreuve, je le perçoive comme incompatible avec tous les faits qui sont dans ce champ (discordance).

Revenons à l’oblativité. Ce terme apparaît, sous diverses formes, dans le premier article (« Schizophrénie et schizonoïa », de René Laforgue, 1894-1962) du tout premier numéro de la Revue française de psychanalyse (dont on peut voir la fort curieuse couverture ci-contre) :

«On peut se représenter le développement d’un individu dans le milieu familial comme une continuation de la naissance dans le sens d’un détachement progressif entre le sujet et sa mère, jusqu’au moment de l’indé­pendance complète de ce sujet. Au cours de ce développement, l’affec­ti­vité du sujet subit des modi­fi­cations profondes. Fixée au début à la mère, elle est captative (Codet), et nécessite pour chaque effort l’aide de l’entourage. Avec le temps elle devient davantage oblative (Pichon), c’est-à-dire que l’enfant apprend à se passer de l’entourage et à se suffire à lui-même. Cette évolution représente le sacrifice de la mère par l’enfant et se fait par plusieurs stades, le premier intra-utérin, le second intrafamilial, le troisième intranational. […]

Le sevrage semble avoir un rôle biologique important et modifier profondément le fonctionnement de l’affectivité de l’individu par l’intermédiaire de toute une série de facteurs d’ordre émotionnel. C’est au cours de cette épreuve que le sujet acquiert la capacité au sacrifice dont on a besoin pour la vie intranationale. Nous verrons plus tard quel rôle insoupçonné joue la capacité au sacrifice dans le développement de l’affectivité d’un individu en particulier aussi bien que dans celui de la civilisation en général, civilisation qui a exalté l’idée du sacrifice à Dieu le Père, l’idée de l’amour du prochain. Cette capacité au sacrifice a été appelée par notre ami Pichon l’oblativité, par opposition à la captativité dénommée d’autre part par Codet. Ce sont ces deux facteurs captativité et oblativité qui forment ensemble ce que nous avons appelé la résultante vitale d’un individu : cette résultante serait fonction de l’un et de l’autre de ces deux facteurs. L’oblativité correspondrait donc dans une certaine mesure au « Realitäts princip » de Freud. C’est une capacité inconsciente du psychisme à accepter sans réaction pathologique tout ce qui dans la vie est en analogie avec le sevrage ; elle est par conséquent susceptible de réveiller par association d’idées les traumatismes de ce dernier. Or notre vie en société est sous bien des rapports la projection sur un plan plus vaste de la vie telle qu’on apprend à la vivre dans le milieu familial. Nous savons comment l’autorité du père devient celle de la patrie, des patrons, ou, »dans un autre ordre d’idées, celle de Dieu le Père, comment les frères deviennent des confrères, comment la nation cherche à réaliser l’idéal de la fraternité.

L’oblativité se différencierait donc de l’altruisme entre autre en cela qu’elle inclut une certaine notion de sacrifice ou de renoncement de la part de celui qu’il caractérise. On retrouve d’ailleurs cette connotation dans le terme oblat, qui signifie entre autres « Personne se sacrifiant » et à propos duquel le Trésor de la langue française cite Sartre : « Nous n’étions rien et voici que nous sommes les élus de la souffrance, les oblats, les martyrs. » (La mort dans l’âme, 1949). Éty­mo­logiquement, ils remontent tous deux au participe passé du verbe en bas latin offerire, littéralement « porter devant ». L’altruisme, lui, a une connotation positive de sympathie, de bienveillance à l’égard d’autrui. L’un valorise le sacrifice, l’autre la générosité, l’un est morbide, l’autre est positif.

À ce propos, mon père m’avait donné une intéressante interprétation de la scène biblique du « sacrifice » d’Isaac. En me faisant remarquer que Dieu avait arrêté la main d’Abraham au moment où il s’apprêtait à tuer son fils, il me dit qu’ainsi Il s’était, en fait, élevé contre la pratique païenne des sacrifices humains qui était monnaie courante à l’époque. C’est en cela que cet élément fondateur du judaïsme est à l’opposé de celui à l’origine du christianisme : dans l’un, le père ne sacrifie pas son fils, dans l’autre, ce rituel s’accomplit (et nécessite une résurrection pour assurer la survie du fils). On pourrait dire que Dieu enseigne ici au patriarche la vertu de l’altruisme, supérieure à celle de l’oblativité.

J’ai retrouvé cette interprétation dans un texte bien plus récent : « Selon Marc-Alain Ouaknin, la leçon de cet épisode est sans équivoque : c’est une mise en scène dramatique pour signifier aux hommes qu’on ne peut désormais plus jamais se croire autorisé à porter la main sur un autre homme au nom de Dieu. Pour lui, le fait que le sacrifice n’ait pas lieu est tout à fait révolutionnaire : le message qui en résulte rejoint celui des dix commandements : ce Dieu est un Dieu d’amour et de justice qui refuse la violence et plus encore celle qui est faite en son nom. » (source)

Pour les férus de psychanalyse, on signalera l’article de Christine Ragoucy « L’oblativité : premières controverses », Psychanalyse 1/2007 n° 8, p. 29-41.


Matthias Stomer (1600-1650) : Sacrifice d’Isaac. (source)

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