Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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15 novembre 2020

Apéro virtuel II.14 – dimanche 15 novembre 2020

Classé dans : Arts et beaux-arts, Philosophie, Progrès, Sciences, techniques — Miklos @ 23:59

L’arrière-plan de Michel ayant suscité de l’étonnement chez Jean-Philippe (qui pense à Matrix) et Françoise (C.), il leur parle du premier ordinateur1 sur lequel il a travaillé professionnellement, à partir de 1972 (son premier cours d’informatique remontant à 1966) : alors qu’un ordinateur portable n’a que quelques centimètres d’épaisseur, et un téléphone portable se met dans une poche, cet ordinateur, d’une capacité de mémoire 100.000 fois moindre, nécessitait une armoire pour héberger ses circuits : à l’époque, la mémoire était composé de tores magnétiques, petits anneaux visibles à l’œil nu autour desquels étaient enroulés des fils électriques qui servaient soit à les magnétiser dans un sens ou dans l’autre (ce qui correspondait à un 0 et un 1, respectivement), soit à lire le champ magnétique qui y était présent. Ce type de mémoire était évidemment aussi très volumineux en taille en comparaison par exemple à une carte SIM actuelle, mais permettait d’y garder l’information enregistrée pendant plusieurs années sans aucune alimentation électrique… Faculté d’autant plus nécessaire que cet ordinateur ne possédait pas de disque dur, et qu’on chargeait le programme initial à l’aide d’une bande de papier perforée (chaque trou correspondant à 0 ou 1), à l’instar des télex de l’époque3, et ultérieurement des cartes perforées. Malgré la taille très réduite de sa mémoire et l’aspect « primitif » de cet ordinateur, il était extrêmement rapide et permettait de réaliser en temps réel des simulations graphiques complexes sur 6 écrans en interaction avec 6 personnes.

Michel continue en expliquant à quoi servent ces 0 et 1, en montrant comment ils peuvent servir à compter2 et à calculer tout aussi bien qu’avec les chiffres de 0 à 9 – c’est d’ailleurs le cas des bouliers, où chaque boule n’a qu’une position, en haut ou en bas, ou des doigts de la main (qui peuvent être soit pliés soit redressés). C’est ce qu’on appelle le système binaire, et il est encore utilisé dans tous les ordinateurs d’aujourd’hui (mais évidemment dans des circuits électroniques qui n’ont rien à voir avec ceux d’alors), et pas que pour coder des nombres, mais aussi des lettres et tout signe qui « entre » dans l’ordinateur. Françoise (C.) demande alors que veulent dire « 2 puissance 2, 4 puissance… », à quoi Michel répond que « 2 puissance 2 » (ou « 2 au carré ») est un raccourci pour dire « 2 multiplié deux fois par lui-même » (donc 2 x 2), « 2 puissance 3 » (ou 2 au cube ») voulant dire « 2 multiplié 3 fois par lui-même »(donc 2 x 2 x 2), « 4 puissance 2 » étant « 4 multiplié 2 fois par lui-même » (4 x 4), etc. Et 25 x 25 est donc appelé « 25 puissance 2 » ou « 25 au carré » (rappelant ainsi que la surface d’un carré de 25 cm de côté est de 25 x 25 cm²). Françoise (P.) dit avoir bien compris, mais ne sent pas qu’elle pourrait l’expliquer à d’autres, à quoi Michel répond que c’est normal pour tout apprentissage – il faut laisser du temps au temps pour qu’une fois appris on puisse restituer.

Jean-Philippe raconte alors que ceci lui rappelle son instituteur en 6e qui avait enseigné le système binaire à ses élèves à l’aide d’une petite boîte avec commutateurs et deux types de lumières qu’il avait fabriqué lui-même. Il rajoute que certaines de ces anciennes tech­niques deviennent obsolètes, à l’instar du Morse (pas l’animal, mais le code – binaire, lui aussi – permettant dans le passé de coder des messages télégraphiques) dont l’usage aurait été supprimé par une convention internationale signée l’année dernière4. Il rajoute que non seulement le Morse est un système binaire (il n’a que deux signes basiques, représentés par le point et le trait), mais le Braille aussi. Michel rajoute un autre exemple d’un « usage binaire » : les images dans la presse (ou ailleurs). Si on les regarde à la loupe, on voit qu’elles sont composées d’une alternance de points (microscopiques) blancs et noirs – donc, ici aussi, deux signes uniquement pour « coder » une image qui peut être très riche et semble tout à fait lisse.

Enfin, à propos de miniaturisations, Michel mentionne son admiration pour des peintures miniatures du passé, faites à la main, où les détails – personnes, animaux, plantes, paysage…- font à peine quelque millimètres, ce qu’on retrouve pour la gravure sur des camées, précise Jean-Philippe.

Michel explique alors le choix de son arrière-plan : il avait brièvement mentionné hier une nouvelle dystopique d’Asimov, écrite en 1955, qui prédisait l’usage absurde des sondages pour déterminer le résultat de l’élection du président américain grâce à un superordinateur (cela ne s’appelait pas comme ça à l’époque) appelé Multivac (en écho du premier ordinateur commercial créé aux US, Univac). Cet arrière-plan illustre quelque peu ces monstres, réels comme fictifs. Il rajoute que la critique de la technique n’est pas récente, et a dû sans doute commencer avant même la Deuxième guerre mondiale (on pense aux Temps Modernes de Charlie Chaplin, ou à Metropolis de Fritz Lang), et mentionne l’incontournable Jacques Ellul (1912-1990), sociologue et théologien protestant, qui a écrit des ouvrages remarquables sur la technique, à l’instar de Le Système technicien5. ouvrage qu’il détient parmi d’autres d’Ellul. Jean-Philippe montre alors son exemplaire de Jacques Ellul, l’homme qui avait (presque) tout prévu de Jean-Luc Porquet. Bien qu’ayant enseigné longtemps en France, il est surtout célèbre… aux États-Unis et ailleurs.

Françoise (P.) demande à la cantonade ce qu’ils ont « visité » (virtuellement) dans la nuit des musées, à quoi Françoise (C.) répond : « Le musée Galliera » où se tient l’exposition Dior, qu’elle n’a regardée que d’un œil, ayant voyagé toute la journée en train de Milan à Paris.

Occupé qu’il était à écrire le compte-rendu d’hier, Michel n’avait pu participer à ces visites, et il avait donc décidé de présenter aujourd’hui sa visite (réelle) au musée Zadkine, il y a quatre ans.

En préliminaire, il identifie « La sentinelle » présente sur la première photo de l’album de Khor Virap (Arménie) qu’il avait montrée l’avant-veille, information que lui a fournie un ami arménien qu’il a interrogé : il s’agit de Kevork Chavush (1870-1907), milicien arménien dont l’action visait à améliorer le sort de la paysannerie arménienne face aux harcèlements des Turcs et des Kurdes (on le voit de plus près sur cette photo tirée de Wikipedia).

Puis au moment où il commence à montrer son album de photos du petit musée en question, Sylvie se joint à l’apéro et s’exclame qu’elle avait, elle aussi, prévu de parler du même musée… C’est donc à deux qu’ils commenteront les quelques photos sur lesquelles Michel s’attarde – en général de très expressives – et modernistes – sculptures de personnages dans des variétés de bois, mais parfois d’autres matériaux.

Sylvie souhaite alors montrer une vidéo (d’une durée de 4 minutes) du musée Antoine-Lecuyer à Saint-Quentin (Aisne, pas Yvelines), consacrée au portrait. Mais hélas, les capacités de sa connexion à l’internet ne lui permettent pas de partager le visionnage de la vidéo par Zoom. La voici donc :

Elle parle ensuite de l’excellente exposition consacrée à Pierre Dac au musée d’art et d’histoire du judaïsme, qu’elle a pu visiter quelques jours avant le début du confinement actuel. Le site du musée permet de visionner sept vidéos de, ou sur, Pierre Dac, avec, entre autres, Le Biglotron :

ainsi que Le Parti d’en rire :

_______________

1. C’était le modèle Sigma 2 de la marque SDS (ou Scientific Data Systems), dont on peut voir une photo ici.

2. Avec les chiffres de 0 à 9 on compte ainsi jusqu’à 999 (par exemple) : _ _ 0, _ _ 1, _ _ 2, …, _ _ 8, _ _9 – puis on remet le 9 à zéro et rajoute un chiffre à gauche : _ 1 0, et l’on recommence avec le zéro le plus à droite : _ 1 1, _ 1 2, …, _ 1 8, _ 1 9 – puis on remet le 9 à zéro, et augmente le 1 : _ 2 0, _ 2 1, …, _ 9 9 – et on remet tous les 9 à zéro et on rajoute un 1 à gauche : 1 0 0, 1 0 1… jusqu’à 9 9 9.

Pour le binaire, exactement la même démarche, mais on n’utilise que 0 et 1, et donc on aura : _ _ 0, _ _ 1 – et comme on ne peut augmenter le 1 (puisqu’on n’a pas le droit d’utiliser d’autres chiffres), on le remet à zéro et rajoute un chiffre à gauche : _ 1 0, _ 1 1 – et encore une fois, on remet les 1 à zéro, rajoute un chiffre à gauche, et recommence à incrémenter à partir de la droite : 1 0 0, 1 0 1 – là on remet le 1 à droite à zéro et à sa gauche on passe à 1 : 1 1 0, 1 1 1.

On n’a pu écrire ainsi que 8 nombres, de 000 à 111 – ils correspondent donc aux nombres décimaux 0 à 7. En d’autres termes, 111 (par exemple) est le codage binaire de 7.

3. Les bandes servant à l’informatique étaient percées (ou non) de 8 trous en largeur, ce qui correspondait à un octet. Les bandes du télex étaient percées de 5 trous en largeur. On peut voir ici ces deux types de bandes.

4. On n’a trouvé nulle référence à une telle suppression, notamment sur le site de l’ITU.

5. Il aurait aussi fallu mentionner dans ce contexte L’Obsolescence de l’homme. Sur l’âme à l’époque de la deuxième révolution indus­trielle de Günther Anders, publié en 1956.

16 juillet 2020

DHL, ou, Délai Horriblement Long

Classé dans : Actualité, Progrès, Société — Miklos @ 10:47

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Une (toute petite) commande en ligne devant m’être livrée par ce transporteur, je reçois un mail de sa part précisant que « La livraison est pour le moment prévue pour le 13 juil. 2020 entre 09h et 18h. »

Toute une journée d’attente, les alternatives proposées (collecte ul­té­rieure dans point de livraison) ne convenant pas à mon calendrier ! Sans autre information, j’ai attendu chez moi, consultant régu­liè­rement mes mails : rien de DHL.

Vers la fin de l’après-midi, je m’aperçois avoir reçu un SMS d’un numéro à trois chiffres (qui était donc ignoré de mon système d’alerte…) : « Votre colis DHL sera livré par TousFacteurs aujour­d’hui entre 18h-20h. »

À 18h13, un nouvel SMS m’indique que « Votre colis est en cours de livraison », le livreur étant à 3 km environ de chez moi.

Il est arrivé à 19h45.

Et voici la réponse, robotisée sans doute, du service client de DHL à mon courrier de plainte : « Votre envoi nnn a été réceptionné le 13 juillet à 19h43 par vos soins. Toute l’équipe du Service Clientèle de DHL Express vous remercie de votre confiance et reste à votre entière disposition pour toute information complémentaire. »

À quoi j’ai répondu que non, ma « confiance » ne leur est pas accordée, bien le contraire, et que j’étais en sus choqué qu’ils ne se soient pas excusés de m’avoir fait ainsi perdre la journée.

En retour, je reçois ceci : « […] cette situation est tout à fait exceptionnelle et ne reflète en rien la qualité de service qu’offre DHL. Par ailleurs, nous vous informons qu’à Paris les livraisons peuvent se faire en début de soirée afin de faciliter la livraison aux particuliers. »

Scandaleux, non ? Contradictoire, d’abord : si c’est exceptionnel, cela ne peut être la pratique à Paris. Et si c’est la pratique à Paris, pourquoi ne pas m’avoir donné un créneau en début de soirée ?

DHL Express ? DHL Expressément non.

14 novembre 2019

How AI defends itself against humans who wish to resist its increasing domination

Classé dans : Actualité, Politique, Progrès, Santé, Sciences, techniques, Société — Miklos @ 23:16

Fritz Lang: Metropolis (1927).
Cliquer pour agrandir.

A friend of mine had emailed me yesterday an article about the scandalous Google Project Nightingale – a major invasion of privacy concerning personal health information.

Here is a literal copy of what I replied to him:

Thanks! Not surprised, I read a few days ago a similar article, this time about the pharmaceutical industry… Speaking of which, an increasing number of medicines are missing from pharmacies: it turns out that as some prices go down here, the industry sells these products in other countries, and so makes more money. Health is definitely not their goal (unless the health of their wealth).

One thought about the increased size of « big data » and IA, leading to the increased robotization of society: one danger I haven’t seen addressed is that of bugs and viruses: they are inevitable, in any system: even a totally closed one, while immune to viruses (but is “totally” ever possible?) will have bugs. And this is much worse than a human error…

Pretty dark future.

Michael

My email reply was rejected with the following error message:

Mail delivery failed: returning message to sender
SMTP error from remote server for GREETING command, [...] reason: 500 5.7.1 Symantec Zodiac

Looking that error up, I found that it means that Symantec found the contents “objectionable”.

So what’s next? Probably effectively blocking access on the Web to such “objectionable” articles and to any reference to them by deleting them from their search engine?

Remember: Big Brother is watching you more than ever

31 mars 2019

Back to the future, ou, Il est vraiment temps de vendre les aéroports de Paris

Classé dans : Actualité, Littérature, Progrès, Sciences, techniques — Miklos @ 22:55

Aéroplane, Le Petit Journal 1912.

Un ami devant prendre demain un vol Pékin – Paris, je me connecte au site des aéroports de Paris pour être alerté sur ce vol, service bien utile qui informe d’éventuels retards.

Quand ça marche.

Là, d’évidence, rien ne marche.

Je commence par chercher le vol par son numéro.

Le site répond : « Aucun vol ne correspond à votre recherche. Veuillez modifier vos critères. »

Alors je cherche par sa provenance – Beijing.

Le site répond : « Aucun vol ne correspond à votre recherche. Veuillez modifier vos critères. »

J’essaie « Pékin ».

Le site répond : « Aucun vol ne correspond à votre recherche. Veuillez modifier vos critères. »

Finalement je cherche par le nom de la compagnie.

Le vol – avec le numéro et la provenance (« Pekin » sans l’accent ; avec l’accent – qui est l’orthographe correcte – le site ne connaît pas) que j’avais indiqués – s’affiche.

Je clique alors sur « Être alerté sur ce vol ».

Le site répond : « Impossible de créer un assistant sur un vol passé. ».

C’est une blague du 1er avril par anticipation (nous sommes encore pour quelques heures le 31 mars) ?

Je vais (façon de parler) sur la page « Contacts » pour signaler ce curieux fonctionnement.

La page « Contacts » affiche :

Vous pouvez nous contacter en utilisant le formulaire ci-dessous. Paris Aéroport s’engage à vous répondre dans les meilleurs délais. Si vous êtes membre du programme de fidélité connectez-vous sur votre tableau de bord pour accéder à votre formulaire dédié.

Le formulaire est en cours de maintenance et sera de nouveau disponible dans les prochains jours. 

Par une curieuse association d’idées, ces événements me rappellent « Une vraiment trop drôle » d’Édouard Osmont (1874-1922), qui n’a rien à voir avec les aéroports, mais qui décrit un enchaînement… un enchaînement inéluctable (même si dans mon cas la conclusion fut différente que dans le sien).

La voici (et c’est bien la première fois qu’elle apparaît en ligne) :

UNE VRAIMENT TROP DRÔLE

Comme il devait se battre en duel le lendemain matin, et qu’il tenait spécialement à tuer son adversaire, M. Tapinois s’exerçait au pistolet dans la salle à manger.

Comment fit-il son compte ? Il est assez difficile de le savoir. Toujours est-il qu’au lieu d’aller faire vibrer la plaque de fonte, une balle s’en fut tuer net la bonne à tout faire, occupée pourtant assez loin, dans la cuisine, au fond d’un couloir, sur la cour.

Très embêté, M. Tapinois commença par verser quelques larmes sur le malheureux sort de la bonne à tout faire. Il avait une véritable affection pour cette fille, qui lui était, en réalité, très précieuse.

Puis, il s’effraya des conséquences possibles de son action.

La présence d’une bonne à tout faire chez un célibataire encore vert peut donner lieu à pas mal de commentaires. Des cancans plutôt malévoles étaient à craindre dans le quartier. On ne manquerait pas, sans doute, de glisser peu à peu de fâcheuses insinuations tendant à faire croire à un crime passionnel. Et le geste tout involontaire de M. Tapinois pouvait être travesti en meurtre prémédité.

M. Tapinois eut froid dans le dos.

Le plus simple lui parut de chercher à dissimuler le cadavre et de faire croire à un enlèvement.

Dans le placard ad hoc, il alla chercher une forte malle, dévissa soigneusement la plaque de cuivre qui portait son nom gravé en majuscules, prit dans ses bras le cadavre de la bonne à tout faire, l’installa aussi confortablement que possible dans la malle, rabattit le couvercle, boucla étroitement les courroies et ferma les deux serrures à double tour, pour plus de sûreté.

Je ne sais si vous avez remarqué, mais rien ne donne plus soif que de tuer une bonne à tout faire, même sans le faire exprès.

Ayant soif, M. Tapinois descendit donc dans la rue et alla s’attabler devant des bocks à la proche brasserie.

Là il réfléchit.

Il commença par se demander dans quels pays lointains il allait bien pouvoir porter sa malle pour la soulager de son contenu.

Puis il pensa non sans amertume qu’il n’aurait personne pour lui apporter son chocolat le lendemain matin.

Il se dit encore que s’il était blessé dans son duel, le médecin, la garde, les gens qui ne manqueraient pas de l’entourer pourraient fort bien découvrir le cadavre de la bonne à tout faire et que, certainement, il en résulterait pour sa tranquillité de fâcheux désagréments.

La perspective d’avoir à cirer lui-même ses souliers le lendemain lui valut de même quelques soucis.

C’est plutôt plongé dans un certain marasme qu’il regagna pensivement ses pénates.

Avant de se coucher, il voulut revoir sa victime.

Il déboucla donc les courroies, ouvrit la malle et, prenant sa lampe pour mieux voir, se pencha sut l’ouverture.

Damnation !

Le cadavre de la bonne à tout faire avait disparu.

M. Tapinois étouffa un cri de terreur et laissa échapper la lampe qui se brisa en mille morceaux.

Il dut rallumer une autre lampe.

Puis, pensant que quelque cambrioleur pouvait s’être introduit chez lui pendant sa courte absence, il fit le tour de l’appartement.

Il ne trouva rien.

En passant devant une glace, il se vit.

Il avait vieilli de dix ans.

N’y comprenant plus rien et éprouvant le besoin de se reposer un peu en prévision de son duel, il résolut de se coucher.

Il entra dans sa chambre et s’approcha du lit pour le préparer.

Horreur !

Le cadavre de 1a bonne à tout faire était dedans.

M. Tapinois laissa échapper un cri de terreur et étouffa ta lampe qui se brisa en mille morceaux.

N’ayant jamais eu que deux lampes, il dut se munir d’un bougeoir.

Il revint près du lit. Le cadavre de la bonne à tout faire avait disparu.

M. Tapinois se regarda dans la glace.

Il avait encore vieilli de dix ans.

Puis il se déshabilla.

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais beaucoup de gens ont l’habitude, avant de se coucher, de prendre quelques petites précautions.

M. Tapinois voulut sacrifier à cette habitude.

Il ouvrit la table de nuit et en sortit un récipient de faïence grossière.

Horreur!

Le cadavre de la bonne à tout faire était au fond.

M. Tapinois étouffa un cri de terreur et laissa échapper le récipient qui se brisa en mille morceaux.

Déjà le cadavre de la bonne à tout faire avait disparu.

M. Tapinois se regarda dans la glace.

Il avait encore vieilli de dix ans.

Minuit sonna.

M. Tapinois frissonna.

Puis il lui souvint qu’il avait oublié de monter sa montre.

Il alla la quérir dans son gousset.

C’était une vieille montre à clef, héritage de son grand-père.

M. Tapinois ouvrit le. boîtier.

Horreur !

Le cadavre de la bonne à tout faire était dedans.

M. Tapinois étouffa un cri de terreur et laissa échapper la montre qui se brisa en mille morceaux.

Déjà le cadavre de la bonne à tout faire avait disparu.

M. Tapinois se regarda dans la glace.

Il avait encore vieilli de dix ans.

Ne pouvant plus dormir, il se promena de long en large dans l’appartement.

Mais ses pensées étaient lugubres.

Il ne s’amusait pas follement.

Il s’ennuyait même beaucoup.

Tellement qu’il bâilla.

En bâillant il ouvrit la bouche.

Horreur !

Le cadavre de la bonne à tout faire· était dedans.

M. Tapinois étouffa un cri de terreur et laissa échapper sa bouche qui se brisa en mille morceaux.

Déjà le cadavre de la bonne à tout faire avait disparu.

M. Tapinois se regarda dans la glace.

Il avait encore vieilli de dix ans.

Se voyant si vieux, si vieux, il résolut de faire son testament.

Il s’assit à sa table, prit une plume et écrivit :

« Devant me battre en duel demain et redoutant une issue fatale, je crois devoir faire mon testament. Avant de mourir …

Ici, il ouvrit une parenthèse. ·

Horreur !

Le cadavre de la bonne à tout faire était dedans.

Cette histoire pourrait sans doute durer encore très longtemps, chers lecteurs. Mais, comme je vous ai assez vus, je préfère m’en tenir là et terminer ma soirée avec des femmes de mauvaise vie.

Édouard Osmont (1874-1922)

Si M. Tapinois cherchait à se débarrasser du cadavre de la bonne à tout faire, moi ce serait plutôt de celui de ce service des aéroports de Paris…

12 octobre 2018

Une machine à lire innovante, simple et efficace en espace et en énergie

Classé dans : Arts et beaux-arts, Histoire, Livre, Peinture, dessin, Progrès — Miklos @ 22:44

Le Diverse et Artificiose Machine del Capitano Agostino Ramelli dal Ponte della Tresia. Ingeniero des Christianissimo Re di Francia et di pollonia. Nellequali si contengono uarij et industriosi Mouimenti, degni digrandissima Speculatione, per cauarne beneficio infinito in ogni sorte d’operatione ; Composte in lingua Italiana et Francese. A parigi in case del’autore, cõ priuilegio del Re. 1588. (source) Cliquer pour agrandir.

« Ceste cy est une belle & artificieuse machine, laquelle est fort vtile & commode à toute personne qui se delecte à l’estude, principalement à ceux qui sont mal dispos & subiects aux gouttes ; car auec ceste sorte de machine vn homme peut voir & lire une grãde quãtité de liures, sans se mouuoir d’vn lieu : outre, elle porte auec soy vne belle commodité, qui est de tenir & occuper peu de place, au lieu où on la met, comme tout homme d’entendement peut bien comprendre par son dessein. Ceste rouë est faicte auec l’artifice que on voit, à sçauoir, elle est construicte de telle maniere, qu’en mettãt les liures sur les tablettes, combien qu’on tourne la dicte rouë tout autour, iamais lesdits liures ne tomberont, ni se remueront du lieu où ils sont posés, ains demeurereont tousiours en vn mesme estat, & se representeront deuant le lecteur en la mesme maniere qu’ils ont esté mis sur les tablettes. Ceste rouë se peut faire grande & petite, selon la volonté de celuy qui la faict faire, obseruant toutesfois les proportions de chascune partie des artifices de ladicte rouë, comme il pourra fort bien faire, considerant diligemment toutes les parties de ceste petite rouë, & les autres artificies qui se voyent en icelle machine : lesquelles parties sont faictes par mesures & proportions. Et pour donner plus grande intelligence & cognoissance à vn chascun qui desirera faire mettre en œuure ladicte machine, i’ay mis icy à part & descouuert tous les artifices qui sont requis en telle machine, afin qu’vn chascun les puisse mieux comprendre, & s’en seruir à son besoin. »

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