Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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22 mai 2009

Vision

Classé dans : Architecture, Arts et beaux-arts, Lieux, Littérature, Photographie — Miklos @ 17:34


Chapelle. Musée des Cloisters, New York City. © Miklos 2009

«Plus avant est la chapelle de l’Apparition, où l’on tient par tradition que Notre-Seigneur apparut premièrement à la Vierge,» après sa résurrection. C’est le lieu où les religieux cordeliers font leur office, et où ils se retirent : car de là ils entrent en des chambres qui n’ont point d’autre issue que par cette chapelle.

Chateaubriand, Itinéraire de Paris à Jérusalem et de Jérusalem à Paris. Paris, 1822.

«Cependant le mystère de cette apparition dans la chapelle lui était resté dans l’esprit ; il se demandait à lui-même si elle ne cachait un secret appartenant à ses parens, et s’il n’y avait pas là-dessous quelque aventure aussi romanesque qu’intéressante à découvrir. Mais comment arriver à l’éclaircissement qu’il désirait ? Il y pensa long-temps, et, huit jours après la fête du Rosaire, il prévint sa famille qu’il allait passer la nuit à Messine, et partit pour la chapelle, muni d’une paire de pistolets, d’une épée et des clefs nécessaires. Il retrouva son poste, s’enferma dans le confessionnal, attendit plus de trois heures, n’aperçut rien et s’endormit. La même expérience, répétée trois ou quatre fois, n’obtint pas plus de succès. Il commençait à penser que son imagination avait fait les frais de toute l’aventure et qu’il avait rêvé cette visite nocturne. Dans cette persuasion, il renonça à son entreprise. Un mois s’écoula. Comme il revenait de Messine un matin, il vit, sur la route qui conduisait» à la chapelle, un homme enveloppé du ferrajuolo sicilien et dont la tournure le frappa ; elle ressemblait à celle du visiteur nocturne. Il résolut de recommencer ses recherches le soir même.

« Souvenirs de voyage : esquisses siciliennes », in Revue britannique, ou choix d’articles traduits des meilleurs écrits périodiques de la Grande-Bretagne, troisième série, tome second, p. 282. Bruxelles, 1834.

5 mai 2009

Le saute-train, un nouveau jeu ?

Classé dans : Actualité — Miklos @ 8:39


Accident de train à la gare Montparnasse, 1895

Pas si nouveau que ça :

Au commencement d’octobre de 1859, on essaie de faire dérailler un train de chemin de fer dans l’Aude : quelques jours après, deux tentatives de ce genre s’exécutent au même lieu ; quelques mois après, un quatrième accident de cette nature arrivait sur la ligne de Marseille ; et au parquet de Vannes comparaissaient dernièrement deux enfants qui avaient voulu voir si les locomotives sauteraient aussi bien que les moutons.

Journal d’agriculture, sciences, lettres et arts, rédigé par des membres de la société d’émulation de l’Ain, Bourg, 1861.

Ce qui est nouveau, c’est l’utilisation de SMS pour s’envoyer des blagues à ce sujet. Ce qui réveille tous les Mulders en puissance : on nous écoute, on lit nos SMS… ce qui est probable, c’est que ce message reçu était resté sur le portable prêté par l’opérateur à la malheureuse victime de cette blague de potache, et, une fois rendu et prêté à un autre usager, celui-ci ait trouvé ce texte inquiétant dans les messages reçus et ait alerté l’opérateur ou eux.

3 mai 2009

Life in Hell: un bon repas, mais…

Classé dans : Cuisine, Lieux, Photographie — Miklos @ 21:40

Akbar, qui se nourrit régulièrement de saumon cru, de légumes, de fruits, de pistaches grillées et de chocolat noir, a des envies carnivores. Jeff lui propose de se rendre dans leur restaurant tune favori. C’est le seul qu’ils connaissent, mais ils n’ont jamais été déçus : l’accueil est aimable, l’atmosphère familiale, les kémias nombreuses et savoureuses ainsi que les plats qui s’ensuivent. Akbar décide de déroger à son habitude – la grillade bellevilloise, assortiment de viandes goûteuses et de quelques merguez – et prend un akoud, ragoût de tripes. Il ne le regrette pas, la viande fond sous la langue et la sauce se laisse saucer par le pain, lui-même meilleur que les fois précédentes. Quant à Jeff, il prend un bsaloubia, couscous avec ragoût de haricots blancs et de viande de bœuf, qui ne lui déplait pas.

Tout pour revenir ? Ils en doutent : le serveur, très prévenant de par ailleurs mais surtout très enrhumé, ne manque pas de tousser au-dessus des plats qu’il sert ; plus tard, étonnés par une odeur de cigarette, nos compères le voient en griller une au comptoir…

En sortant, ils jettent un regard sur un immeuble situé sur le coin opposé, un bâtiment lépreux de deux étages recouvert de tags, dont le rez-de-chaussée est muré et le premier étage « décoré » de panneaux années 70 qui masquent la façade. Ils apprendront plus tard que ce bâtiment, appelé « relais de poste » (d’où le nom du restaurant en question), est l’un des plus anciens du quartier, et l’un des derniers témoins de la barrière des Fermiers généraux du 18e siècle. Sauvé de la démolition en 1998, la Ville de Paris n’arrive pas le faire renaître de sa déchéance ; quelques dizaines d’habitants du quartiers se sont récemment mobilisés en lançant une pétition pour la réhabilitation de cette maison (ce que souhaitent aussi les Verts), cœur de ce quartier autrefois si agréable :

Belleville, v., Seine, banlieue et à 1/4 de l. N. E. de Paris, arr. et à 1l.1/2 de Saint-Denis, c. de Pantin. 5,000 h. Il est dans une charmante situation, sur une hauteur qui domine Paris et une grande partie des environs. Le joli plateau sur lequel il est bâti est couvert de maisons de campagne agréables, et l’on y trouve plusieurs maisons d’éducation pour l’un et l’autre sexe. La position de ce lieu, qu’environnent les prés Saint-Gervais, ajoute à son agrément ; aussi, pendant la belle saison, est-il le rendez-vous d’un grand nombre d’habitants de Paris, attirés par les guinguettes et les bals publics dont Belleville est presque entièrement composé. Fabriques de cuirs vernis, de produits chimiques et d’acier poli. Atelier pour l’affinage des métaux. Jardin public, fêtes champêtres et courses en chars.

J. A. Dulaure, Histoire physique, civile et morale des environs de Paris, depuis les premiers temps historiques jusqu’à nos jours, 1838.

Jeff et Akbar sont les personnages d’une série de bandes dessinées de Matt Groening, qui est aussi le père de la fameuse – et infâme – famille Simpson.

Life in Hell: un beau mariage

Classé dans : Actualité, Lieux, Photographie — Miklos @ 18:13

Amis des bêtes, Jeff et Akbar vont visiter le musée vivant du cheval de Chantilly. Arrivés à la caisse, ils s’entendent dire que, pour le prix du billet (10 €), ils ne pourront voir qu’un passage de quelques mètres de long bordé d’une dizaine de stalles occupées ; le reste n’est pas visible dans l’heure qui suit. Et quand Akbar présente sa carte de réduction, il s’entend dire qu’il fallait établir une demande avant la visite… Or aucun moyen de le savoir d’avance : le site du domaine n’offre aucune indication particulière sur les horaires assez variables de ce musée ni sur les procédures administratives préliminaires à sa visite. Les deux compères ne sont pas les seuls à faire demi-tour.

En sortant, ils entendent sonner des cors de chasse. « — J’aime le son du cor le soir au fond des bois, murmure Lily. — Tout ce que ça veut dire, ma chérie, c’est que la chasse est ouverte… Qu’est-ce qu’ils peuvent bien encore chasser, je me le demande. »1 Ils se le demandent aussi.

Ils aperçoivent alors un grand pavillon dressé sur l’hippodrome, vers laquelle se dirigent quelques sonneurs en habit rouge, le cor sous le bras. « Le chasseur sort des fourrés. Il tient encore le cor contre ses lèvres. Apercevant Lily, il prend une pose intéressante. Il porte des lederhosen et un petit chapeau tyrolien. Un très bel homme, bien proportionné, avec beaucoup de viande là où il faut. L’œil est de velours, d’une rare stupidité. C’est ce qu’en yiddish on appelle une vraie tête de con. Jolies moustaches. Il n’a pas l’air allemand. Il pouvait sortir d’un conte de Maupassant, avec son genre étalon, ou d’une toile impressionniste, avec tous ces beaux mâles à rames, maillot de corps, et grosses moustaches. »1

Une foule endimanchée (bien que c’était un samedi) se tient à proximité du pavillon ; les hommes sont en frac, et les dames arborent, pour la plupart, des chapeaux aussi grands que leurs jupes sont courtes, et garnis à profusion de fleurs et de fruits à l’instar des buffets richement achalandés. Tout ce beau monde – Akbar et Jeff y reconnaissent Dr Doudoune et son mari l’éminent professeur – évolue avec une élégance convenue, mais rendue quelque peu périlleuse de fait de la nature herbeuse du sol – « Voici le vieux chemin / Où roule le carrosse / Des dames en hennin / Et des fées Carabosse… »2 –, différente de celle de parquets en point de Versailles sur lesquels ces grands du monde se retrouvent en général.

Un garde auquel Akbar s’adresse pour savoir de quoi il s’agit leur répond : « c’est le mariage d’un descendant d’un prince, d’un comte ou d’un duc, quelque chose comme ça ». Ils apprendront le lendemain qu’il s’agissait du mariage du descendant d’Hugues Capet.

S’étant rincés les yeux à défaut du gosier, nos compères reprennent la route vers de nouvelles aventures.


1 Romain Gary, La danse de Gengis Cohn, Gallimard, 1967.
2 Marie Gounin.

Jeff et Akbar sont les personnages d’une série de bandes dessinées de Matt Groening, qui est aussi le père de la fameuse – et infâme – famille Simpson.

Un plat sylvestre

Classé dans : Cuisine, Photographie — Miklos @ 10:01

« Pour les faux amis, ils sont innombrables. Tout ami dit : Je suis bon ami ; mais il y a des amis qui ne sont amis que de nom. » — Bossuet, Politique tirée des propres paroles de l’Écriture sainte, livre V, article II.

Les touristes anglophones visitant Pierrefonds ont de quoi être surpris : dans ce petit village – où le café est plus cher que celui des troquets parisiens les plus branchés – on trouve une nouvelle cuisine, une gastro­nomie raffinée et inventive. Pour preuve, ce « foie de poulet » servi sur de la mousse – celle qu’on trouve sous les arbres, dans la forêt (de Compiègne, sans doute).

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