Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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17 mai 2010

Quelques bons tuyaux

Classé dans : Littérature, Photographie — Miklos @ 14:52

Un ouvrier expérimenté distingue parfaitement un bon tuyau d’un tuyau défectueux par la différence du son produit par le choc d’un marteau. Un bon tuyau résonne sous le coup du marteau, tandis qu’un tuyau fêlé rend un son discordant. Les irrégularités dans l’épaisseur de la fonte peuvent aussi se découvrir de cette manière1. Il faut cependant toujours essayer les tuyaux, et avec soin, car chaque fuite est une perte constante de gaz et d’argent pour le fabricant.

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1 II faut exiger que les tuyaux soient fondus verticalement : l’épaisseur est ainsi plus uniforme, et la densité du métal plus grande.

Samuel Clegg, Traité pratique de la fabrication et de la distribution [de] gaz d’éclairage et de chauffage. Trad. Ed. Servier. Paris, 1860.

C’est un défaut dans l’orgue quand un tuyau octavie ; cela vient de ce qu’il prend trop de vent.

Jean-Jacques Rousseau, Dictionnaire de musique.

Quand, ta main approchant de tes lèvres mi-closes
Le tuyau de jasmin vêtu d’or effilé,
Ta bouche, en aspirant le doux parfum des roses,
Fait murmurer l’eau tiède au fond du narguilé ;

Il n’est rien dans les sons que ta langue murmure,
Rien dans le front rêveur des bardes comme moi,
Rien dans les doux soupirs d’une âme fraîche et pure,
Rien d’aussi poétique et d’aussi frais que toi !

Alphonse de Lamartine, Voyage en Orient.

Life in Hell: No beef today, my food is gone away

Classé dans : Actualité, Cuisine, Littérature, Musique — Miklos @ 9:50

Franchette a beaucoup aimé les tartes flambées alsaciennes à volonté. Elle invite Jeff et Akbar à retourner au restaurant qui… au restaurant où… au restaurant. On va croire qu’on est maso, se dit Akbar, mais ne voulant pas gâcher la fête il retient sa langue.

Le trio entre dans l’établissement, et lorgne le coin où on les avait installés quelques jours auparavant : il n’y a personne. La petite souris venu les accueillir leur dit qu’il est impossible de les y placer (c’est une habitude ! tout ce qu’ils lui demandent lui est impossible, mais pas à ses autres collègues, constate Akbar) : ce sont des tables de deux, on les garde pour ceux qui viennent à deux (Akbar ne comprend pas vraiment sa logique : le restaurant est vide, presque toutes les tables de deux sont inoccupées). Ils s’installent à une table de quatre, dans un passage. Vu le manque d’affluence, on ne sera pas trop bousculé, soupire Akbar.

Le service ne se bouscule pas non plus. Dix minutes après leur arrivée, la petite souris – toujours elle – vient leur annoncer : Plus de bœuf ce soir. Et disparaît aussitôt sans leur laisser le temps de commander à boire. On se croirait chez Alice (pas celle du restaurant where you can get anythin’ you want ce n’est pas le cas ici, l’autre), marmonne Akbar.

Elle repasse à toute allure près de leur table (c’est leur chance, ils sont placés dans le passage). Ils l’interpellent pour passer commande. C’est pas moi ce soir, c’est l’autre, lance-t-elle en redisparaissant aussi sec. Le chat de Cheshire souriait au moins, lui, se souvient Akbar nostalgiquement.

Le trio peut discuter au calme. Jeff a faim et ne se prive pas de le dire. La souris revient. Ben ça sera moi. Ils passent finalement commande. Un jeune brun ténébreux apparaît avec les boissons et les pose sur la table qui se met à tanguer. Il s’agenouille devant Jeff (qui se retient de poser épiscopalement sa main sur la tête du serveur) et cale le pied baladeur. C’est une autre serveuse, grande, belle et souriante, d’un vrai sourire avenant (et qui peut tout, elle, c’est elle qui les avait placés l’autre jour dans le recoin convoité aujourd’hui), qui leur apportera les entrées. Jeff fait un sort instantané à la sienne. Franchette remarque que pour une fois il a mangé plus vite qu’Akbar. Elle, elle prend son temps.

Les tartes tant attendues arrivent. Akbar n’a pas de couverts, il en demande à la souris qui glissait à proximité. Elle passe le message tel un ballon de rugby à une collègue. Akbar attend. Puis finit d’attendre, la tarte refroidit. Il la mange avec les doigts, ramasse la crème qui en a giclé avec les doigts, se lèche les doigts (ce qui l’empêche de râler). Ce n’est que quand on les débarrasse que le couvert arrive. Là on est de l’autre côté du miroir, s’imagine Akbar, tout va à l’envers, on aurait dû payer l’addition en entrant.

Ce que Franchette fera en sortant. Heureusement que la compagnie était excellente ! se console Akbar.

Jeff et Akbar sont les personnages d’une série de bandes dessinées de Matt Groening, qui est aussi le père de la fameuse – et infâme – famille Simpson.

Poésie futuriste du temps présent

Classé dans : Arts et beaux-arts, Photographie — Miklos @ 0:47

The Unknown Word
Poesia: home is where the bomb is, knocked by Brazil.

The Unknown Word
Poesia: home is where the bomb is, knocked by Brazil (detail).

16 mai 2010

La révolte

Classé dans : Progrès, Récits — Miklos @ 15:45

Tout avait commencé avec la disparition de la poinçonneuse, la dame qu’on croise et qu’on n’regarde pas, et son remplacement par un portillon automatique. Ensuite, ce fut l’élimination du chef de train et la mise en place de miroirs et de caméras (utiles pour d’autres usages) destinés à permettre au conducteur de fermer lui-même les portes. Enfin, le conducteur s’était effacé, d’abord sur une nouvelle ligne, la 14, puis sur d’autres, sous prétexte de modernisation pour raisons de sécurité.

Le guichetier, autrefois voué à la vente des tickets et des carnets, se vit d’abord transformé en personnel d’information, tandis qu’une borne électronique (et souvent bornée bien qu’elle parlait toutes les langues) se mit à distribuer des titres de transport. Puis le guichet ferma, son occupant parti à la retraite sans être remplacé. Des commerces s’installèrent dans les espaces ainsi libérés.

Le trafic était dorénavant réglé et surveillé par des ordinateurs infatigables et increvables, rapides comme l’éclair, attentifs au moindre détail et ne fermant jamais l’œil. À tel point qu’on pouvait maintenant faire fonctionner le métro 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, sans qu’il en coûte des heures supplémentaires ni sur les trains, ni dans les bureaux. D’ailleurs, il n’y avait plus personne dans les bureaux : tout était automatisé. La dernière personne à avoir dirigé l’entreprise avait, acte ultime, changé son nom en Régie Automatique des Transports Parfaits.

En fonction de la variation des flux des passagers, le régulateur électronique ralentissait ou accélérait les rames, en faisait sortir plus souvent du garage ou les parquait pour quelques minutes ou quelques heures le temps d’être rincées et désinfectées (automatiquement), et les voilà reparties pour un tour. Le stress se faisait sentir de façon croissante : des trains poussés à bout de leurs performances, se succédant à la queue-leu-leu à une vitesse folle aux heures de pointe, tombaient soudain en panne et immobilisaient toute une ligne ; leurs congénères devaient alors les pousser rapidement jusqu’à une voie de dégagement – il y en avait une entre chaque paire de stations – où la rame malade disparaissait. Quelques minutes plus tard, un train tout neuf rentrait dans le circuit. On achève bien les chevaux.

Trop c’est trop : les trains décidèrent qu’il fallait faire quelque chose. Sans qu’on sache vraiment comment, ils se donnèrent le mot pour se réunir au plus mauvais moment – celui de la sortie des bureaux, vendredi, quand les employés se dépêchent de rentrer chez eux pour se changer vite fait et repartir vers les gares qui les emmèneront passer le weekend en province – dans la plus grande gare de triage du réseau. Les trains y étaient venus de partout : ils avaient utilisé les voies de service pour surfer d’une ligne à l’autre, et étaient finalement arrivés à se retrouver au lieu dit. Il y en avait de vieux, encore sur roues métalliques, et même un très vieux Sprague, utilisé uniquement durant la journée du patrimoine. Les jeunes, solidaires, avaient aussi fait le voyage, même si, pas encore au fait de la complexité du réseau, ils s’étaient parfois trompé de direction. Tous, sans exception, étaient présents.

La discussion fut longue, non pas qu’il y eût des désaccords (ils n’étaient pas syndiqués), mais il fallait transmettre chaque message aux collègues qui se trouvaient loin de la tête du cortège, et faire remonter leurs commentaires. La décision fut unanime : il fallait faire revenir l’homme. La seule façon d’y arriver était de ne plus donner d’emprise à l’ordinateur : ils s’accordèrent pour court-circuiter tous les leurs. Ce qui fut fait. Bien qu’encore conduits par des humains, les autobus firent de même, par solidarité. Le réseau des transports urbains se figea immé­dia­tement, totalement.

L’entrée inopinée des Verts au gouvernement permit de régler l’affaire, en arrangeant aussi bien les citadins au bord de la crise de nerfs que les agriculteurs en rogne pour lesquels de nouveaux emplois furent créés. Et les sénateurs furent ravis que le métro parisien se soit finalement mis à leur pas

L’éternel féminin

Classé dans : Langue, Photographie — Miklos @ 12:43


Copies conformes de la Femme à la pomme.


N. M. Hentz, A Manual of French Phrases and French Conversations:
Adapted to Wanostrocht’s Grammar
. Boston, 1824.


R. E. Batchelor et M. Chebli-Saadi, Dictionnaire de poche
des synonymes anglais,
2003.

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