Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

This blog is © Miklos. Do not copy, download or mirror the site or portions thereof, or else your ISP will be blocked. 

18 juillet 2011

Les bigarrures des bibliothèques numériques

Classé dans : Livre, Sciences, techniques — Miklos @ 0:05

Bigarrure, subs. fém. … assemblage de choses variées et plus ou moins disparates. — Trésor de la langue française.

La numérisation à grande échelle peut donner des résultats surprenants ou amusants, comme on le voit ici : sur un même écran, Google Books affiche une partie d’une page numérisée et OCRisée avec succès, une photo de la main qui maintient la page suivante (on avait déjà montré un autre exemple plus frappant des quelques aléas de leur entreprise), et une photo d’une page successive correctement prise mais non analysée bien qu’aussi lisible que les autres.

On ne peut que répéter ici ce constat déjà ancien : la numérisation n’est pas garante en soi de (meilleure) conservation d’un document primaire que l’original (on ne discute pas ici des facilités de recherche, d’accès ou d’analyse qu’elle peut offrir) : ici, l’on voit que la qualité de la numérisation est moins bonne que l’original, et, dans bien des cas, ne permet pas d’accéder à tout le contenu tel qu’il est encore présent physiquement : la numérisation de masse exclut une validation humaine (autre que statistique, éventuellement), et le document numérisé peut. En outre, la conservation du document numérique nécessite des supports actifs et des migrations permanentes. En fait, ce qu’elle assure certainement, c’est la conservation du document source, qui sera moins manipulé par les lecteurs puisqu’accessible en ligne, même si de façon imparfaite.

Un autre aspect de la curieuse hétérogénéité des ouvrages présents dans Google Books concerne ceux publiés en série ou en plusieurs volumes (encyclopédies, dictionnaires, etc.) : trop souvent, on n’en trouve qu’une partie, et pour ceux qui y figurent, certains sont accessibles dans leur intégralité d’autres non, sans qu’il soit possible de comprendre si une logique mystérieuse a présidé à ce qu’on croyait la numérisation d’un fonds cohérent d’une bibliothèque universitaire partenaire (dont on ne peut croire qu’elle ait un fonds si lacunaire) ou s’il ne s’agit que du hasard.

Ainsi, du Musée des familles. Lectures du soir, revue fondée en 1833, on ne trouve chez Google Books que les volumes 3 (en provenance de la bibliothèque d’État de Bavière) et 5 (de l’université de Gand) en accès intégral, et un facsimilé du volume 26 sans aucun accès… En revanche, l’excellente Internet Archive en propose plus de 18. Surprise ! on y trouve l’intégralité de cette réédition du volume 26, numérisé par… Google ! Pourquoi ici on peut l’y lire et pas chez Google ? Mystère. Quant à Gallica, il s’y trouve 13 volumes, sauf erreur de notre part : ce n’est pas une mince affaire de les y localiser ni de les compter, la liste de réponses n’identifiant pas les volumes individuels et comprenant, semble-t-il, des répétitions… Europeana, elle, affiche une liste de titres identiques, sans en indiquer les numéros de volume ; on aperçoit les dates, mais impossible de trier la liste des 265 réponses, dont 241 en provenance de la Bibliothèque nationale de France (on se demande pourquoi dans Gallica on n’en trouve alors que 13…). Enfin, la bibliothèque numérique Hathi Trust fournit l’accès à 19 volumes de ce périodique, fort intéressant de par ailleurs.

Google Books, projet qui a démarré et s’est poursuivi longtemps en faisant fi des droits de propriété intellectuelle, vise à s’adapter dorénavant à ces règles. Ce n’est pas par vertu (malgré son affirmation que You can make money without being evil), mais pour mieux s’insérer dans le marché européen – ses grandes bibliothèques, ses grands projets (Europeana, notamment), où l’exigence du respect de ces droits est la condition sine qua non de collaboration ou de partenariat. Du coup (et quelques petits procès plus tard), l’accès libre de nombre d’ouvrages a été supprimé : c’est bien pour les ouvrages sous droits, mais c’est incompréhensible en ce qui concerne les ouvrages du domaine public. Lors de sa présentation magistrale (intitulée The Present and Future of Google Books) lors d’une des conférences Europeana en 2010, James Crawford, directeur de l’ingénierie à Google Books avait affirmé que tous les livres entrés dans le domaine public étaient accessibles en intégralité dans leur système. C’est faux, comme tout utilisateur régulier peut l’attester. Ainsi, aucun des exemplaires de De l’égalité des deux sexes, de Poullain de la Barre, publiés au XVIIe siècle, n’y est consultable, même en extrait (contrairement à Gallica, par exemple ; on trouvera ici une transcription annotée en typographie, ponctuation et orthographe modernes que nous en avons effectué). Crawford avait demandé qu’on lui signale des documents qui ne correspondraient pas à son affirmation, ce que nous avons fait, sans obtenir de réponse.

Conclusions :

1. Aucune de ces bibliothèques ne fournit une couverture équivalente à ce que fournit une bonne bibliothèque physique : la notion de collection en est absente, quand bien même l’ensemble de ces bibliothèques permet de localiser et d’accéder à un nombre important de documents. Le danger ? La confirmation de cet adage : tout ce qui n’est pas numérisé n’existe pas.

2. Aucune de ces bibliothèques n’assure – pour le moment du moins – la conservation à long terme de ces facsimilés numériques à l’égal de celle des originaux, ni dans leur qualité, ni dans l’accès au contenu.

3. Enfin, aucune de ces bibliothèques numériques n’intègre de médiateur, le bibliothécaire qui, ayant une connaissance critique et historique du fonds, est à même de répondre à une demande d’un lecteur bien autrement que ne le font les moteurs de recherche actuels.

16 juillet 2011

Chère Eva Joly

Classé dans : Actualité, Histoire, Politique, Société — Miklos @ 22:42

Nous avons un point en commun, la binationalité. Mais avec une différence : je suis né sur le territoire français, tandis que vous avez choisi de l’acquérir et de vivre ici, comme ma mère l’avait d’ailleurs fait quelque trente ans avant vous. Quelle autre preuve faut-il de votre attachement à ce pays ?

Le fait d’être né ici ne garantit en rien une « bonne » citoyenneté, ni la connaissance de l’histoire de ce pays (à part le « 1515 Marignan », et encore…), ni le respect de ses lois. Si vous avez pu atteindre la magistrature, et ainsi vu bien plus que d’autres les turpitudes de nos concitoyens, qu’est-ce qui peut vous empêcher de briguer la magistrature suprême ?

Lorsque je pense à l’histoire relativement récente de ce pays, je me dis d’ailleurs que cette nationalité acquise n’est pas forcément égale – non pas en devoirs mais en droits – à celle de ceux dont les ancêtres remontent à une immigration ou une invasion moins récente : ma mère, venue dans le pays de la liberté et espérant y trouver l’égalité en en acquérant la nationalité, a dû se cacher pendant la guerre pour éviter d’être raflée et déportée par ceux dont elle était devenue concitoyenne.

Quant à l’armée française, nous connaissons aussi son histoire avec ses hauts et ses bas. Si la plupart de ses membres sont citoyens français, l’inverse n’est évidemment pas vrai : la plupart des citoyens français ne sont pas soldats, ne l’ont jamais été et ne le seront jamais (on l’espère), avec la suspension du service national par un président français. Pourquoi ne comprend-on pas votre proposition comme une façon d’élargir ce moment de la fête nationale – qui, contrairement au 11 novembre par exemple, ne marque pas un événement militaire en soi – qu’est le défilé à tous les Français ? on peut rêver d’y voir ainsi enfants, adultes et personnes âgées, des représentants des provinces, des métiers, des écoles, de l’armée… que sais-je –, qui passeraient du rôle de spectateurs à celui d’acteurs. Diffusé sur les principales chaînes, ne monterait-il pas une image plus variée, plus inclusive, de cette France qui pense surtout à se déchirer ?

Une autre différence dans nos parcours : j’ai été officier de carrière pendant un certain nombre d’années. Mon livret militaire français indique que j’ai effectué mon service national en vertu de l’accord entre ces deux pays dont je détiens les nationalités. Eh bien, ce pays-là a supprimé le défilé militaire de sa fête nationale en 1973, ce qui n’a pas terni l’image de son armée. Si votre proposition est acceptée, ce ne sera pas le premier changement dans la longue histoire de l’armée française : son ouverture aux femmes, la suppression de la conscription, la fermeture de nombreuses bases… Ce n’est pas une trahison de l’histoire, mais une prise d’acte de l’évolution du rôle de l’armée et de sa place dans la société : s’imaginerait-on vivre sous l’Ancien régime, par exemple, en parlant françois et en étant tiré au sort pour servir dans les milices (provinciales, pas celles de sinistre mémoire, mais pourtant bien françaises) ?

La France – une certaine France – est crispée sur son arrière-garde. Être femme, être binationale, être magistrat (et non pas avocat comme certains impétrants) lui fait confronter misogynie et xénophobie, « culture ancienne » et culture tout court. S’il n’y avait que cela, ce serait déjà une bonne raison pour être candidate. Quelle que soit l’issue de cette campagne, vous aurez contribué à faire bouger les choses, à l’instar d’un Barack Obama aux États-Unis. C’est un honneur pour la France.

13 juillet 2011

Life in Hell: Jeff et Akbar jouent au Scrabble

Classé dans : Peinture, dessin — Miklos @ 6:45

Le tirage

Fin de partie

Jeff et Akbar sont les personnages d’une série de bandes dessinées de Matt Groening, qui est aussi le père de la fameuse – et infâme – famille Simpson.

10 juillet 2011

Insolite, vous avez dit insolite ?

Classé dans : Langue, Médias, Nature — Miklos @ 19:51

On ce souviens, pardon, on se souvient, des métamorphoses de l’orthographe française – est-ce sa tant attendue modernisation périodique ? – aux mains de l’Élysée. Il n’est donc pas surprenant qu’une des chaînes de télévision publiques, France 3 en l’occurrence, emboîte le pas, en révélant à la France entière en période de pointe1 (du moins à celle qui regarde ce soir son journal télévisé à 19h30) la façon d’écrire « bison ». En grand, s’il vous plaît.

Pas très futé ce bizon-ci, dites-vous ? Détrompez-vous : loin d’une modernisation, c’est en fait un retour vers le passé : l’orthographe bizon était courante jusqu’au début du XVIIIe siècle, comme on peut le constater ici :

On ne peut donc qu’admirer ce clin d’œil de la rédaction du JT à ces temps révolus où les bizons faizaient foizon.


1 Prime time, en québécois.

Soupe fraîche au melon

Classé dans : Cuisine — Miklos @ 12:43

1 melon bien mûr
2 fromages de chèvre frais
jus d’½ citron vert
amandes en poudre
liqueur de miel (Estonie)
menthe fraîche hachée
gingembre frais rapé
cardamome verte moulue
coriandre moulue
essence de vanille
1 pincée de sel

Mixer tous les ingrédients jusqu’à l’obtention d’une crème lisse.

Mettre la soupe au réfrigérateur.

Servir très frais.

The Blog of Miklos • Le blog de Miklos