Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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30 décembre 2011

So british ?

Classé dans : Actualité, Histoire, Racisme, Société — Miklos @ 11:40

Les récents transports d’un député conservateur britannique, chargé de mission auprès du secrétaire aux transports, ont défrayé la chronique d’outre-Manche, et pour cause : il s’agit de sa participation à une soirée en zone libre en France (à Val-Thorens, plus précisément) « avec chants hitlériens et déguisements d’officier SS ». (Le Monde, 22/12/2011).

On peut se consoler en se disant que cet individu est moins haut placé (et encore moins maintenant : il s’est vu retirer sa fonction) dans la high society britannique qu’un certain Henry Charles Albert David, plus connu sous son diminutif de Harry et son titre de prince de Galles, qui n’avait pas hésité à endosser ce type d’uniforme lui-même (ce qu’on ne reproche pas au député en question) lors d’une soirée à thème « colonial and native ». (BBC, 13/1/2005). Une vraie bombe médiatique, cette nouvelle.

Où il y a des gènes il y a du plaisir : la rumeur sur les sympathies nazies de l’ex roi Édouard VIII, arrière-grand-oncle dudit prince, et de sa femme Wallis l’avaient fait nommer aux Bahamas (loin des yeux, loin du cœur) après la deuxième guerre mondiale, et lui ont permis de prendre une retraite bien méritée à Neuilly s/Seine, tout en étant dispensé par l’État français de payer l’impôt sur le revenu.

Tradition britannique ? On se souvient de la clique d’intellectuels de Cambridge des années 1930 que Kim Philby, agent double au service de l’espionnage soviétique, avait recrutée ; parmi eux, Guy Burgess, qui deviendra en 1935 l’assistant parlementaire d’un député britannique d’extrême droite, Jack MacNamara, membre de l’Anglo-German Fellowship, organisme pour sympathisant nazis et qui avait lui-même des liens (très rapprochés, politiquement et physiquement) avec les jeunesses hitlériennes.

Who’s next ? comme chantait l’ineffable Tom Lehrer à propos d’un autre type de bombe.

25 décembre 2011

Boutin vire-t-elle sa cuti ?

Classé dans : Actualité, Langue, Médias, Politique, Société — Miklos @ 0:43

Ce fut la mère Boutin, notre pipelette, qui vint à la tonnellerie m’assener la funeste nouvelle. — Albert Simonin, Confession d’un enfant de La Chapelle. 1977.

Non seulement la porte-oriflamme de l’homophobie de droite se choisit comme conseiller un gay (il est vrai qu’elle ne déroge pas à une certaine tradition : tout roi très chrétien avait son Juif), mais en plus, selon l’étudiant en journalisme qui a signé l’article du très sérieux Rue89 (et même encore plus sérieux depuis son récent rachat par le Nouvel Observateur), ce gai loustic, qui s’autoproclame « petit étudiant de rien du tout, petit citoyen français inaudible », se spécialiserait dans l’écriture d’ouvrages sur les herbes.

Quelle métamorphose* ! Souhaiterait-elle relever le flambeau de la Cicciolina qui vient de prendre sa retraite ?


* N’y voyez là aucune allusion à Kafka, ni, Dieu préserve, à Alphonse Boudard.

24 décembre 2011

Le mamamouchi truc(ulent)

Classé dans : Actualité, Langue, Médias, Politique, Théâtre — Miklos @ 18:43

ACTE TROISIÈME.

Le théâtre représente la façade d’un palais turc.
On lit sur un cartouche : Palais des Trucs.

(…)

Vertugadin.

Ah çà ! où sommes-nous ?

Turlututu.

Je n’en sais rien ; mais voici une habitation, il doit y avoir un portier, et en lui parlant…

Vertugadin.

C’est ça, parlons au portier. (Remontant au fond.) Tiens ! il y a quelque chose d’écrit… (Lisant.) « Palais des Trucs. » Sais-tu ce que cela veut dire : Palais des Trucs ?… (Ici l’R et l’U changent de place sur l’inscription, on lit : Palais des Turcs.)

Turlututu.

Ah ! mon honorable collègue d’infortune, je ne voudrais pas vous dire des choses désagréables, mais vous ne savez pas lire.

Vertugadin.

Comment, je ne sais pas lire ! c’est moi qui fus le précepteur du roi.

Turlututu.

Vous dites palais des trucs, et il y a : palais des Turcs. (Ici l’inscription reprend sa première forme.)

Vertugadin, regardant l’inscription.

T, r, u, c, s, trucs… Allez donc à l’école, pêcheur, lâchez de savoir aussi bien que le roi, lire !… (L’inscription reprend sa deuxième forme.)

Turlututu.

Lassons le roi Lear en plan,
Plan, plan,
Tirelire en plan !…

(Lisant.) T, u, r, c, s, Turcs… Seigneur, vous êtes une oie !…

Vertugadin.

Comment, vous me soutiendrez… (L’inscription disparaît complètement.) Ah !…

Turlututu.

Ah !…

Vertugadin.

Tiens !… c’est le palais de rien du tout, maintenant.

Turlututu.

Alors nous devons être dans le département de pas grand’chose.

Vertugadin.

Mais il y avait trucs ;

Turlututu.

Non, il y avait Turcs.

Vertugadin.

Air de la Petite Poste de Paris.

Moi, Je suis sûr q-
u’il y avait : Trucs.

Turlututu.

Moi, je suis sûr q-
u’il y avait : Turcs.

Vertugadin.

Hé ! non, mon prince, il y avait : Trucs.

Turlututu.

Hé ! non, seigneur, il y avait : Turcs.

Vertugadin.

Alors, c’était un truc à Turc.

Turlututu.

Ou bien, c’était un Turc à truc.

Au surplus. nous allons bien savoir : voilà une petite sonnette, et en l’agitant doucement… (il tire avec précaution le cordon qui pend à la porte, on entend une grosse cloche retentir avec fracas.)

Turlututu chapeau pointu, grande féérie en trois actes et trente tableaux par MM. Clairville, Albert Monnier et Édouard Martin. Représentée pour la première fois, à Paris, sur le théâtre impérial du cirque, le 14 janvier 1858.

On attirera l’attention de nos chers lecteurs sur les significations respectives de vertugadin et de turlututu.

20 décembre 2011

Ces mystérieux mots du sport, ou, des liaisons qui font mal

Classé dans : Actualité, Langue, Littérature, Médias, Théâtre — Miklos @ 21:01

Les liaisons mal-t-à-propos, connues plus savamment sous l’appellation de pataquès (à ne pas confondre avec pataque et son pluriel pataques, autrefois monnaie de compte, ni même avec les dieux patæques), voire de cuir ou de velours, sont probablement apparues dès la normalisation de l’orthographe et de la grammaire.

C’est au début du xixe siècle que le mot pataquès fait son apparition, et pas uniquement dans les dictionnaires : en 1802 (et non pas en 1803 comme l’écrit la WP) paraît le texte d’une « bluettePetite comédie spirituelle et sans prétention. — Trésor de la langue française. », Pataquès ou Le barbouilleur d’enseignes, d’Alphonse Martainville, dont la toute première tirade, dite par le personnage éponyme, peintre d’enseignes et dont le rôle avait été créé par BrunetActeur du théâtre des Variétés, très aimé du public., démontre bien pourquoi il méritait ce nom, et qu’il s’y appliquait avec des intentions bien précises :

V’la qu’es achevé, et j’dis qu’ça vous a-t-une tournure. J’n’ai rien ménagé : y a d’ces barbouilleurs qui n’mettent pas l’ostorgraphe et qui vous retranchent la moitié des mots ; moi je n’suis pas comme ça, j’aime mieux en mettre de plus ; il est vrai que j’suis payé-z-à tant la lettre. Mais c’te fois-ci c’est pas l’intérêt qui m’a-z-encouragé ; je suis que l’talent plaît toujours au sesque, et c’est pour m’insinuer auprès de mam’zelle Doucet [la fille de l’épicier-confiseur, qui méritait aussi bien son nom, c’lui-là] que j’ai voulu fignoler, comme il fait, le nom-z-et les qualités d’son papa. Ça la flattera ; elle est vaniteuse ; sûr, ça la flattera, et en décorant la porte d’sa boutique, j’m’ouvrirai celle de son cœur. Il y a-t-un mois, j’avais de ne point lui-z-être indifférent, et pis tout-à-coup v’là qu’alle a rompu les chiens ; à présent quand j’veux y adresser queuque gaudriole de galenterie, elle me répond toujours à rebrousse-poil… c’est guignonantC’est malheureux.… Je soupçonne ben… oh ! oui, je l’soupçonne… y a du marchand de vin [Mélange, dont la boutique jouxte celle du confiseur et dont le fils est l’amant de la donzelle en question] là-dessous… Si ça continue, j’en préviendrai l’papa.

Le sens de pataquès, qu’on nommait aussi pataqu’est-ce, ne dénotait pas uniquement en fautes de liaisons à la prononciation consistant à insérer une consonne inexistante à la finale du mot précédent (et notamment l’inversion des s et des t, qu’on appelait cuirs), et était bien plus général :

Cuir. Faute contre la grammaire et contre Vaugelas.

On dit d’un comédien qui fait des fautes de liaisons en parlant, c’est-à-dire qui prononce en s les mots terminés en t, et en t ceux qui sont terminés en s, qu’il fait des cuirs.

Pataquès. Quiproquo, calembourg, mot mal prononcé, mal interprété ; faute de langue ; sottise, imbécillité.

Un faiseur de pataquès. Celui qui pèche continuellement contre la grammaire ; qui fait des cuirs en parlant.

Dictionnaire du bas-language, ou des manières de parler usitées parmi le peuple ; ouvrage dans lequel on a réuni les expressions prover­biales, figurées et triviales ; les sobriquets, termes ironiques et facétieux ; les barba­rismes, solé­cismes ; et géné­ra­lement les locutions basses et vicieuses que l’on doit rejeter de la bonne conversation. Paris, 1808.

Aujourd’hui, le pataquès se distingue du calembour (à ne pas confondre avec le calambour) en cela qu’il est en général involontaire et dénote une négligence ou une méconnaissance de la langue.

C’est dans la catégorie de l’involontaire qu’on classera ce « liaisons » venu fort mal-t-à propos dans Le Monde :

Il ne s’agit d’évidence pas de ligatures des petites artères, mais de lésions… Quand on se trompe dans les mots qui dénotent les maux, ça fait mal aux muscles risorius.

15 décembre 2011

Life in Hell : vivement le dégel au pôle !

Classé dans : Actualité, Économie — Miklos @ 13:35

Il ne s’agit bien évidemment pas des pôles nord et sud, auxquels Akbar souhaite un prompt refroidissement autant pour la survie de ses charmants ours blancs que du reste de la planète, mais de pôle emploi.

Cela fait 15 jours qu’Akbar n’a pas reçu l’indemnité qu’ils lui versaient ponctuellement au début de chaque mois – variable, sans aucune justification de son montant, mais au moins elle arrivait. Mais depuis le début du mois, rien, zéro, nada, zilch. Sans explication ni relance.

Et pourtant, il leur envoyait tout aussi ponctuellement les attestations qu’ils redemandaient périodiquement après avoir perdu celles qu’il leur avait remises en mains propres (enfin, il n’avait pas vérifié jusqu’à leurs ongles) quelques temps auparavant, sa dernière expédition postale datant du 18 novembre.

Au bout de quelques jours, il se fend de sa plus belle plume électronique et dépose une réclamation sur leur site. La réponse ne se fait pas attendre :

Nous vous répondrons sous 48 heures (2 jours ouvrés), soit le Jeudi 8 Decembre 2011 au plus tard ou 7 jours calendaires s’il s’agit d’une réclamation.

Sept jours calendaires plus tard, soit le mardi 13 décembre (pour reprendre une de leurs expressions favorites), toujours rien. Akbar leur accorde un jour de grâce. Toujours rien.

Deux jours plus tard, soit le jeudi 15 décembre (pour reprendre une de leurs expressions favorites), il se résout finalement à se rendre à l’un des deux pôles dont il dépend (celui du nord), la fusion – non pas des neiges mais des assédic et de l’anpe – résultant plus en une confusion qu’autre chose et maintenant la séparation effective des activités.

Il y est accueilli par deux personnes. L’une prend les copies des documents qu’il leur avait déjà envoyés, l’autre lui en fait remplir de nouveaux exemplaires pourtant identiques. « Oui, monsieur, nous avons trois semaines de retard sur le traitement des courriers, explique l’une. Vous comprenez, nous sommes si peu à nous en occuper. »

Akbar se retient de leur suggérer d’embaucher quelques demandeurs d’emploi (elles doivent en connaître, non ? et ça ne serait pas des emplois fictifs comme ceux pour lesquels Jacquou le croquant casque), leur signale que depuis le 18 novembre ça fait plus de trois semaines, et s’inquiète pour savoir si elles reçoivent bien leur salaires, elles, en date et heure, malgré cette avalanche qu’elles subissent de la part de demandeurs d’emploi impatients.

Elles promettent d’essayer de débloquer la situation : il devrait recevoir l’indemnité tant attendue dans deux jours.

Rentré chez lui, il trouve la réponse tant attendue à son courrier électronique vieux de 9 jours calendaires :

Bonjour,

Suite à l’examen de votre demande sur pole-emploi.fr, nous vous communiquons les informations suivantes :

Vous avez été reçu le 15/12/2011 sur le site Louis Blanc.

Blanc comme ces pauvres ours, constate Akbar. Ils sont tout de même forts d’être arrivés à cette conclusion après cette longue période d’examen. Savaient-ils donc que je viendrai finalement ? Vivement le dégel de mes indem­nités !, rajoute-t-il.

Jeff et Akbar sont les personnages d’une série de bandes dessinées de Matt Groening, qui est aussi le père de la fameuse – et infâme – famille Simpson.

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