Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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3 juin 2012

Trois femmes au perroquet et une quatrième

Classé dans : Arts et beaux-arts, Littérature, Peinture, dessin, Photographie — Miklos @ 2:02


(de gauche à droite, de haut en bas) Jeune femme au perroquet, place Stravinsky, 2012.
Manet : La Femme au perroquet, 1866. Courbet : Femme au perroquet, 1866.

Émile Zola, « Les Chutes », in L’Événement, 15 mai 1866.Je ne nie point que La Femme au perroquet ne soit une solide peinture, très travaillée et très nette ; je ne nie point que La Remise des chevreuils n’ait un grand charme, beaucoup de vie ; mais il manque à ces toiles le je ne sais quoi de puissant et de voulu qui est Courbet tout entier. Il y a douceur et sourire. Courbet, pour l’écraser d’un mot, a fait du joli !

On parle de la grande médaille. Si j’étais Courbet, je ne voudrais pas, pour La Femme au perroquet, d’une récompense suprême qu’on a refusée à La Curée et aux Casseurs de pierres.

J’exigerais qu’il fût bien dit qu’on m’accepte dans mon génie et non dans mes gentillesses. Il y aurait pour moi je ne sais quelle pensée triste dans cette consécration donnée à deux de mes œuvres que je ne reconnaîtrais pas comme les filles saines et fortes de mon esprit.

Léon Lagrange, « Le salon de 1866 », in Le Correspondant, t. 68, 1866.Mais la Femme au perroquet [de Courbet] nous rend l’homme. Et encore, pour qui se souvient de certaine Vénus, la Femme au perroquet est un prodige de convenance. Les formes de la nature s’y montrent à peu près respectées. Mais l’idée de beauté en est complètement absente. Or, étant donnée une nudité de femme, supprimez la beauté, que reste-t-il ? Aussi, malgré l’enthousiasme que la Femme au perroquet excite parmi certaines coteries d’artistes, paysagistes pour la plupart, je me refuse à l’accepter comme le dernier mot de l’art moderne. Le désordre des lignes fait penser à ce monstre aux trois jambes qui figure le blason de la Sicile. Le dessin accuse la forme avec dureté, et, en certains endroits, le modelé se creuse jusqu’au vide. Je ne parle pas du perroquet, qui est une niaiserie, ni des cheveux, qui sont un signalement, ni de la robe, qui est une signature. Sans doute, il y a là encore des finesses de tons attestant une étude sincère de la nature. Mais cette étude, toute de surface, exagère l’épiderme aux dépens de la charpente et de la chair ; elle oublie le sang, elle glace la vie. Évidemment, la figure académique peinte par M. Courbet n’a eu d’autre valeur à ses yeux que celle d’une pièce de gibier étalée sur une table. Avec ses reflets de marbre et ses lumières visqueuses, avec ses cheveux épars comme des tentacules, la Femme au perroquet fait songer au plat du jour. Nommons-la une pieuvre, et n’en parlons plus.

Théodore de Banville, « La Femme au Perroquet », in Les Camées parisiens. 1883.Tout le monde a vu passer dans les rues du Quartier latin une femme, quelque chose, un fantôme dont l’aspect inouï vous prend aux cheveux et vous traîne vivant dans la vague nuit du Rêve. La tête étroite, terreuse – elle est coiffée d’un vaste chapeau qui a dû appartenir à madame de Cayla, – est d’une invraisemblance shakespearienne (le crâne a disparu, usé sans doute par la lime du temps !) et s’est réduite à la simplicité des bonshommes au trait que dessinent les enfants épris de chimères. L’œil regarde où regardent les yeux des statues. Le corps : un piquet sur lequel flotte un tas de haillons divers, devenus harmonieux à force de traîner dans la pluie du ciel ! Et sur sa main, couleur de terre brune, d’où toute chair est bannie, cet Être impersonnel porte un perroquet, un perroquet vivant, qui peut-être a baisé les lèvres roses de la Pompadour. Oh ! quelle ode triomphante à la gloire du Superflu, cet oiseau de flamme et d’émeraude promené par cette ombre qui, elle-même, n’existe pas, et qui a un oiseau !

Quelques autres femmes avec perroquets

· Anon., Portrait de petite fille avec un perroquet, ca. 1640.

· Frans van Mieris le vieux, Femme au manteau rouge nourrissant un perroquet, 1663.

· Pieter De Hooch, Couple avec perroquet, 1668.

· Frans Snyders, Nature morte à la dame au perroquet, .

· Jan Steen, Les effets de l’intempérance, 1663-5.

· Caspar Netscher, Dame avec perroquet et homme avec singe, 1664.

· Jan Steen, Femme avec perroquet, 1664-1666.

· Rosalba Carriera, Jeune femme avec un perroquet, 1730.

· Tiepolo, Jeune femme au perroquet, 1758-1760.

· Anon. (Japon), Hollandaise avec un perroquet, début 19e s.

· Eugène Delacroix, Femme caressant un perroquet, 1827.

· Charles-Louis Bazin, Femme avec perroquet, 18??.

· Pierre-Auguste Renoir, Dame avec le perroquet (Henriette Darras), 1871.

· Pierre Bracquemond, Femme au perroquet, 1899.

· Angelo Jank, La femme au perroquet, 1898.

· Umberto Brunelleschi, Femme au perroquet, 1905.

· Georges Bottini, La femme au perroquet, 1905.

· Félix Valloton, Femme au perroquet, 1909.

· Norman Lindsay, Dame et perroquet, 1917.

· Demeter Chiparus, Demoiselle au perroquet, 19?? (art déco).

· Frida Kahlo, Yo y mis pericos, 1941.

· Fernand Léger, Les Femmes au perroquet, 1951.

2 juin 2012

Knowing

“We didn’t know.” — Tom Paxton.

Should one be amused or amazed at this piece of news? As Rabbi Marvin Hier is quoted to have said, it is highly unlikely that this was “an innocent mistake”: after all, the owner of this flag certainly knew what it symbolized. But let’s be naïve for a minute and assume it was; then it is yet another proof of the tragic cultural and historical shallowness of these Marines. Moral too, when considering what their “colleagues” recently perpetrated elsewhere in Afghanistan, an act quite in line with the ideology represented by that infamous flag. Was that an “innocent mistake” too?

This news item reminds me of a situation I witnessed when visiting the Cleveland Museum of Art, three decades ago. A little printed sign at the entrance of each hall indicated the period and/or genre which the works hanging on its walls belonged to. I happened to be standing in the “Post-War Art” room when two men, in their early 20s, stepped in. Here is what I overheard them say to each other:

— “Post-War Art”. Which war do you think this refers to?

— Must be the Vietnam war.

Had smartphones and search engines been around then, these not-too-smart guys might have googled for the expression and found, right from the second paragraph of the first site to be listed, its real meaning “in Western usage”. Yet googling is definitely not knowing, and external information is not internalized knowledge.

But what would have prompted them to think these two words had a specific meaning beyond their literal (mis)interpretation? Why would these Marines think, how could they ever imagine, that these two letters meant something else than “Sniper Scouts”?

Education. Knowledge.

They didn’t know.

We didn’t know

        We didn’t know said the burgermeister,
        About the camps on the edge of town.
        It was Hitler and his crew
        That tore the German nation down.
        We saw the cattle cars, it’s true,
        Maybe they carried a Jew or two.
        They woke us up as they rattled through,
        But what did you expect me to do?

We didn’t know at all, we didn’t see a thing.
You can’t hold us to blame, what could we do?
It was a terrible shame, but we can’t bear the blame.
Oh no, not us, we didn’t know.
[...]

Tom Paxton (1965)

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