Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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25 avril 2014

Quand les « biens de consommation » sont à la source du mal, ou, Le consommateur en tant que prédateur

Classé dans : Actualité, Société, Économie — Miklos @ 0:58


Propagande pour l’industrie textile au Bangladesh.

L’émission Envoyé spécial de France 2 vient d’évoquer le désastre du Rana Plaza au Bengladesh qui avait coûté la vie, il y a un an tout juste, à plus de mille « petites mains » d’ateliers de textile et fait plus de deux mille blessés. Ces malheureux étaient exploités pour un salaire de misère – 30 € par mois – à coudre des vêtements de grandes marques destinés à être vendus au consommateur occidental à un prix défiant toute concurrence tout en permettant aux magasins de nos villes de se faire des marges cent fois plus élevées que ce que ces ouvriers auront été payés.

Comment ne pas être bouleversé à la vue des familles endeuillées réduites à une misère encore plus grande par la disparition de celui ou celle qui était souvent leur seul gagne-pain ? Comment ne pas l’être à la vue de cet adolescent qui pleurait d’avoir à abandonner l’école pour aller travailler dans ce type d’atelier ?

Et comment ne pas faire le rapprochement avec un accident semblable qui s’était passé plus d’un siècle plus tôt ? La Triangle Shirtwaist Factory était un immense atelier de confection de blouses pour femmes qui occupait les trois derniers étages d’un bâtiment qui en comptait dix, situé près de Washington Place à New York. On y comptait quelque 500 ouvriers – surtout ouvrières – pour la plupart juifs. Le 25 mai 1911, un incendie s’y est déclaré et propagé extrê­mement rapidement, empêchant l’usage des cages d’escalier, qui, d’ailleurs, avaient été verrouillés par les patrons pour éviter les vols… Cent quarante six travailleurs y trouvèrent la mort, ce qui en fait l’accident industriel le plus meurtrier de l’histoire des États Unis à ce jour. (source)

Le monde occidental a réglé le problème en le déplaçant dans des pays sous-développés où le coût de la main d’œuvre est incom­men­su­ra­blement plus bas qu’il ne l’est ici. Quant aux conditions de travail, n’en parlons pas : loin des yeux, loin du cœur. L’émission nommait les grandes marques qui se défaussaient soit en ne donnant pas suite aux demandes de réaction des réalisateurs du reportage, soit en accusant leurs sous-traitants.

La situation sur place n’a pas changé : le reportage montrait une autre usine dans laquelle il n’y avait qu’un extincteur – vide – et dont les sorties d’urgence étaient bloquées. Le Bangladesh, stigmatisé, est abandonné par ses clients qui, au lieu d’exiger d’y améliorer les conditions de travail et de donner les moyens de le faire, se tournent maintenant vers le Cambodge. Ateliers indéniablement plus modernes, mais une exigence inhumaine de rendement des ouvriersComment ne pas penser aux travailleurs à la chaîne dans les Temps modernes de Chaplin ou à ceux que dévore Moloch dans Metropolis de Fritz Lang… – obligés de coudre parfois jusqu’à 700 pièces par jour pour 60 € par mois – et une oppression impi­toyable de leurs syndicats qui n’est pas que le fait des employeurs mais de l’État lui-même, et qui va jusqu’à l’empri­son­nement, au passage à tabac voire à l’élimination physique de ceux qui manifestent.

Et le consommateur ? Il n’a pas changé non plus : il achète sans égard à l’origine ou plutôt aux conditions de production, le prix détermine tout. S’il verra l’émission, il versera peut-être une larme. Demain, il choisira le vêtement le plus avantageux pour son porte-monnaie sans même en examiner la provenance, et il trouvera un autre sujet pour susciter son émotion.

Le colonialisme n’a pas disparu, bien au contraire. L’esclavagisme non plus. L’appât illimité de lucre des multinationales et la boulimie irraisonnée de leurs clients s’articulent ine­xo­ra­blement sur le dos de ceux qui n’en peuvent mais.


Monument à la mémoire des victimes du Rana Plaza.

9 avril 2014

Les murs ont des oreilles

Classé dans : Histoire, Littérature, Photographie — Miklos @ 0:52


Les murs ont des oreilles. Autres photos ici.
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«On sait depuis longtemps que les murs ont des oreilles ; j’ai découvert qu’ils ont aussi des langues et des voix. J’ai inter­rogé séparément les quatre murailles entre »lesquelles je suis enferméIl s’agit de la prison de Sainte-Pélagie, où l’auteur fut incarcéré pendant un mois à cause d’un article dans la Biographie des Contemporains d’Antoine Jay qu’il avait écrit avec lui et avec Benjamin Constant. ; elles m’ont répondu, et c’est de leur récit que j’ai composé l’histoire de ma chambre, dont voici d’abord la description fidèle.

Étienne de Jouy, L’ermite en prison, ou, Conso­lations de Sainte-Pélagie, « IIIe consolation. Histoire de ma chambre », 22 avril 1823.

On rappellera à ce propos notre ingénieuse invention qui met ce précepte en application.

2 avril 2014

« Peut-on faire des œuvres qui ne soient pas d’art ? » (Marcel Duchamp)

Classé dans : Arts et beaux-arts, Littérature, Photographie — Miklos @ 13:41


« Cela ne sera pas de l’art ni non art ni du pas d’art ni. » (Ben)
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«Nulle manifestation de l’être en tant qu’être ne pose plus simplement, plus schématiquement, le problème des rapports et des imbrications entre la déréliction et la facticité d’une part, le dépas­sement et l’alcalinité-angoisse d’autre part, que ne saurait le faire l’œuvre d’art plastique, soit qu’on l’envisage comme un possible non encore thématisé, soit qu’on l’appréhende déjà existant en fait. Étant, n’étant pas, elle est en fait ou en devenir limite sécante de la conscience, » conscience de quelque chose et du monde trans­cendant au moi néantisé (d’où tombement juste du contour sécant = grandeur).

Marcel Aymé, La bonne peinture. 1947.

1 avril 2014

Mais à qui sont ces pieds ?

Classé dans : Photographie — Miklos @ 22:20


Cliquer ici pour voir la réponse.

L’art de rédiger une biographie

Classé dans : Actualité, Langue, Littérature, Sciences, techniques — Miklos @ 0:23


La biographie de Chandler Massey en français.

“Every great man nowadays has his disciples, and it is usually Judas who writes the biography.” — Oscar Wilde, The Critic as Artist.

À la lecture de cette notice encyclopédique, on comprend que ce jeune acteur a une fratrie hermaphrodite et chrétienne ; que, bien qu’il allait à l’école, il faisait du théâtre ; et qu’il a assisté (à des spectacles ? à des matches ?) à l’UCLA tout en étant le supérieur hiérarchique de l’équipe de frisbee. On remarquera le nom assez inhabituel du premier de ses deux colocataires. Quant à son propre surnom, il en a en fait deux : à gauche, « Boum Boum », à droite « chan chan » (qui fait plus cubain).

Si vous voulez connaître l’auteur principal de ce texte, cliquez ici.

Quant à l’auteur secondaire, celui qui a indiqué que notre héros a joué dans Angels in Starducks, on lui signalera qu’il ne s’agit pas de Starducks ni a fortiori de Starbucks, mais de Stardust.

Et donc, si, selon l’écrivain espagnol Benjamin Jarnés, « Le roman est l’art de créer un homme, la biographie l’art de le ressusciter. », ici il s’agit plutôt d’un massacre. Et ce n’était même pas la biographie d’un grand homme…

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