Une très belle Foi
Arte vient de rediffuser* Foi, le spectacle (ballet/opéra “médiévo-contemporain”) bouleversant du jeune chorégraphe belge Sidi Larbi Cherkaoui, « mi-Marocain, mi-Flamand, blond, tatoué dans le dos, homosexuel, et alors ? ». Un choc, celui que j’ai ressenti quand je l’ai vu au Théâtre de la Ville, celui que je viens de ressentir en le revoyant ce soir. Il ne vise pas moins qu’à l’universel — les religions qui séparent et détruisent, la violence, la tendresse, Hiroshima, la solitude, le sida… — en somme, la condition humaine dans son tragique splendide, illustrée par la musique qui, à elle seule, aurait suffi à faire déborder l’âme.
« Foi » se déploie dans un décor de square pauvre d’une grande ville moderne. Des personnages mélangés s’y croisent, y compris un trisomique, un travesti, une boulimique, un ange et une fille qui tape du marteau. Des catastrophes surviennent qui font trembler le sol ou répandent un gaz toxique. Des musiciens (les Capilla Flamenca**) jouent sur scène une splendide musique du Moyen Âge ou interprètent une tradition orale de chants polyphoniques italiens (Christine Leboutte). « Foi » mêle dureté et tendresse, beauté fulgurante et cri, humour et angoisse. Comme la vie. « Je voulais parler de la survie et des thèmes dans lesquels on croit : la religion, l’amour, la carrière, la jeunesse. J’ai demandé aux danseurs de répondre à quelques questions : qu’est-ce qui vous fait avancer ? Qu’est-ce qui est sacré pour vous ? Parfois, c’était leur mère. Si certains ont estimé qu’il y avait trop de violence dans « Foi », il faut parfois ces moments plus durs pour mieux apprécier la douceur et la beauté: une chanson chinoise qui apaise comme une pommade, ou la danseuse perchée sur les jambes du danseur et qui chante une comptine islandaise. » (La Libre Belgique)
Ironie et poncifs intentionnels (la noire au gros cul), tendresse si émouvante, violence jamais gratuite, images frappantes (l’homme pendu la tête en bas), déclarations fulgurantes (« I am séropositive, so what ? », dit la noire), croix et mater dolorosa, mur (des lamentations), solos et mouvements d’ensemble magnifiques dans ce paysage de désastre… Ce spectacle est rempli de fulgurances. Si d’aventure Les Ballets C. de la B. passent près de vous, dans l’un de leurs nouveaux spectacles (surtout s’il est chorégraphié par Cherkaoui), ne le manquez pas.
* Le lien mène vers une présentation du programme qui propose un extrait vidéo du spectacle.
** Que l’on peut entendre ici.
wahouuuu franchement tu ecris super bien, et j’espère que tu vas donner l’envie d’aller voir ce spectacle a bcp
la danse doit faire naitre des emotions, pas seulement en ne donnant que du "doux" mettre en mouvement la realité de la vie est aussi l’occasion d’ouvrir le coeur par l’emotion, mème sur des choses qui "derangent"…
bravo pour ton article
Commentaire par wolfi — 22 mai 2005 @ 8:36
La danse (et les arts en général, chacun dans son domaine) est une façon de "parler" de l’indicible, aussi, et donc de dire ce que les plus belles paroles ne peuvent pas forcément dire.
Commentaire par miklos — 22 mai 2005 @ 8:43
Merci ! La danse (et les arts en général, chacun dans son domaine) est une façon de "parler" de l’indicible, aussi, et donc de dire ce que les plus belles paroles ne peuvent pas forcément dire.
Commentaire par miklos — 22 mai 2005 @ 8:46
Merci. Tu as raison, le but est de donner aux autres la l’envie et la chance de voir ce genre de spectacle.
La danse (et les arts en général, chacun dans son domaine) est une façon de "parler" de l’indicible, aussi, et donc de dire ce que les plus belles paroles ne peuvent pas forcément dire.
Commentaire par miklos — 22 mai 2005 @ 8:48