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21 mai 2012

« Le mai, le joli mai… » (Guillaume Appolinaire)

Classé dans : Actualité, Musique — Miklos @ 12:12

“The day the music died.” — Don McLean, American Pie.

Ce mois de mai n’est pas si joli que ça : il est en fait pourri, on se croirait en mars ou en avril, et c’est plutôt « ne te découvre pas d’un fil » que « fais ce qui te plaît ».

C’est aussi un mois particulièrement tragique pour la musique qui voit disparaître nombre de musiciens, tous domaines confondus, pour certains mondialement connus, voire uniques en leur genre.

C’est avant tout le décès de Dietrich Fischer Dieskau (le 18, à 86 ans), que j’avais eu la grande chance et le bonheur d’entendre live lors un récital de lieder avec le non moins légendaire Gerald Moore qu’ils avaient donné dans les années 1970. Je ne suis pas le seul à m’en souvenir : c’était inoubliable : ce concert s’était tenu dans un grand auditorium, mais j’avais eu le sentiment de me trouver tout près d’eux, dans un salon de musique par exemple, voire à l’intérieur même de l’œuvre, du fait de leur extraordinaire capacité de projection et de création d’une atmosphère intimiste, et du respect « total » de la musique et du texte là où souvent l’un prend le pas sur l’autre. Interprétation idéale ? c’est un qualificatif que je n’utilise pas, il nie toute alternative passée, présente ou future (et pour ma part, j’apprécie aussi – mais autrement – celle de Hans Hotter dans le Winterreise de Schubert). Il y a, fort heureusement, les nombreux enregistrements qu’il a laissés (voire même un coffret de 25 disques compacts qu’évoque Leo Carey dans un bel article en hommage au disparu), qui restitue son grand art, ainsi que le timbre si particulier de sa voix, comme l’était – différemment, évidemment – celui de Maria Callas : il suffit d’en entendre une syllabe pour la reconnaître.

Mais la musique classique a aussi perdu (le 17, à 79 ans) la pianiste France Clidat – connue sous le qualificatif de « Madame Lizst » (que l’on devrait au critique Bernard Gavoty) – ainsi que les violonistes et pédagogues Roman Totenberg (le 8, à 101 ans), qui avait créé des œuvres de Milhaud, Szymanowksi, Hindemith ou Honegger, et Zvi Zeitlin (le 2, à 90 ans), interprète apprécié de Schoenberg et qui a joué sous la direction de grands chefs à l’instar de Rafael Kubelik, Pierre Boulez ou Antal Dorati.

Il n’y a pas que la musique classique qui a été endeuillée en mai. On a ainsi appris les disparitions de Robin Gibb (le 20, à 62 ans) des Bee Gees ; de « la reine du disco » Donna Summer (le 21, à 63 ans) ; du « parrain du go-go » Chuck Brown (le 16, à 75 ans) ; de Donald « Duck » Dunn (le 13, à 70 ans), bassiste de blues, r&b et gospel et membre de Booker T. & the M.G.’s et des Blues Brothers ; du rappeur Adam Yauch (le 4, à 47 ans), membre fondateur des Beastie Boys et aussi connu sous ses noms de scène MCA ou Nathanial Hörnblowér ; d’Everett Lilly (le 8, à 87 ans), membre du duo bluegrass The Lilly Brothers avec son frère Bea ; du batteur Peter Jones (le 18, à 45 ans), membre des Crowded House ; de Doug Dillard (le 16, à 75 ans), banjoiste des Dillards (groupe aussi connu sous le nom de Darlings) ; du guitariste de r&b Charles “Skip” Pitts (le 1er, à 65 ans), roi de la pédale wah-wah et du thème de Shaft ; du jazzman Mort Lindsey (le 4, à 89 ans), qui avait travaillé pour Merv Griffin et Judy Garland ; de Doc Waston (le 29, à 89 ans), grand folkloriste américain (voix, guitare, seul ou en groupe) à la technique imparable, aveugle quasiment depuis sa naissance, et qui a influencé plus d’une génération de musiciens américains…

Pour ceux qui s’étonneraient du rapprochement Dietrich Fischer Dieskau – Don McLean, on signalera l’élocution parfaite de ce dernier jusqu’aux moindres détails : écoutez donc Vincent (connue aussi sous le titre de Starry, Starry Night), chanson consacrée à La Nuit étoilée de Vincent Van Gogh, et dont les paroles, fort poétiques (et, avouons-le, alternant sublime et cucu la praline), intègrent des procédés littéraires particulièrement intéressants sur le plan sonore, tels les allitérations de flaming flowers that brightly blaze, avec une mélodie et un accompagnement particulièrement épurés (et notamment pour l’époque où plus la musique était tonitruante, plus elle avait de succès, comme il le dit lui-même dans un récent entretien). On écoutera avec profit aussi le très beau And I Love You So (autant pour le texte que la mélodie de la première partie), ou encore la très évocatrice Empty chairs (au texte riche en allitérations et anaphores) où il parle, d’une façon apparemment très détachée, du départ de la femme aimée.

C’était aussi l’époque de Cat Stevens (My Lady d’Arbanville) ou de Simon et Garfunkel (Scarborough Fair), une génération de « troubadours américains » soft qui a succédé à celle des très grands chanteurs de folk : Pete Seeger (seul dans Where Have All The Flowers Gone? ou avec sa formation des Weavers dans The Erie Canal) que j’ai eu aussi la chance d’entendre en récital live au début des années 1980, Woody Guthrie (John Henry), Joan Baez (House of The Rising Sun), Johnny Cash (The Man Who Couldn’t Cry), Peter Paul and Mary (Blowin’ in the wind), le Kingston Trio (Tom Dooley) et tant d’autres dont on a précédemment parlé.

Tout doit sur Terre mourir un jour, mais la musique vivra toujours.

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