Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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25 janvier 2009

Le Vatican, l’intégrisme, la Shoah et le négationnisme

Classé dans : Actualité, Photographie, Religion, Shoah — Miklos @ 4:10

Le Vatican suit une ligne périlleuse et si Benoît XVI n’est pas un gondolier vénitien, on peut se demander s’il ne conduit pas la barque de Saint Pierre à la gaffe, fameuse expres­sion que Mgr Duchesne avait concoc­tée à propos du pape saint (!) Pie X. Ce dernier ne voulait se résigner à accepter la loi française de la sépa­ration de l’église et de l’État. « Bien que la majorité des évêques français conseillât de se plier à la loi, ce pape interdit toute colla­bo­ration par l’encyclique Vehe­menter nos (11 février 1906), l’allo­cution consis­toriale Gra­vis­si­mum (21 février), et l’ency­clique Gra­vis­simo Officii Munere (10 août), que Mgr Louis Duchesne baptisa mali­cieu­sement Digitus in oculo (“doigt dans l’œil”). Cette oppo­sition du pape à la loi française eut pour conséquence de compro­mettre la création des associations cultuelles, prévues par la loi, et de faire trans­férer les biens immobiliers de l’Église au profit de l’État. » (source)

Quant à la relation du pape actuel avec les Juifs, ce serait deux coups à gauche, deux coups à droite ? Ça avait bien commencé : visite de la synagogue de Cologne en août 2005 où il condamne les nouveaux signes de l’antisémitisme, puis visite en avril 2008 dans une synagogue américaine lors de son voyage apostolique aux USA où il délivre un message cordial.

Mais voila qu’en septembre 2008 Benoît XVI justifie le silence de Pie XII pendant la guerre au sujet de l’extermination des Juifs, silence qui n’avait pas manqué d’indigner, dès la fin de la guerre, des intellectuels catholiques français tels que François Mauriac ou Jacques Maritain. La pièce de théâtre de Rolf Hochhuth, Le Vicaire (1963) critiquant ce silence a fait scandale en son temps. Selon La Croix, cette déclaration n’était pas le fruit du hasard, mais une première étape vers la béatification de ce pape à l’action controversée.

Benoît XVI continue sur sa lancée : il vient de lever l’excom­mu­ni­cation des évêques intégristes ordonnés par Mgr Lefebvre. Or l’un d’eux, le britannique Richard Williamson, vient de déclarer dans une interview diffusée la semaine dernière que les preuves historiques le convainquent que les chambres à gaz n’ont pas existé (après avoir dit que le Vatican était contrôlé par Satan, et que les Juifs cherchaient à dominer le monde…). Il ne serait pas étonnant que le Vatican ne craigne pas vraiment les effets de l’indignation de certaines organisations juives et leur questionnement de la sincérité de la récon­ci­liation de l’Église avec le peuple juif, et n’éprouve pas le besoin de s’expliquer, comme il l’avait fait après le discours de Benoît XVI à l’uni­ver­sité de Ratisbonne qui avait irrité nombre de musulmans.

On constate que Le Figaro, se distinguant ainsi d’autres grands organes de presse, ne mentionne pas ce « détail » dans des articles qu’il consacre à cette récon­ci­liation (sur la levée de l’excom­mu­ni­cation et sur la récon­ci­liation). Mais faut-il s’étonner ?

En voulant rapprocher les intégristes de l’Église, celle-ci se rapproche d’eux. On le voit aussi dans d’autres signes tel le surprenant bâillonnement du jésuite Roger Haight, rendu publique ce mois-ci pour des « dérives doctrinales ».

N’est pas Jean XXIII qui veut, et Benoît XVI ne cherche certainement pas à l’être. On est curieux de savoir quel sera le prochain acte du souverain pontife. Un « Vatican 3 » qui annule les effets du précédent concile ?

28 décembre 2008

On ne se refait pas

Classé dans : Actualité, Histoire, Shoah — Miklos @ 13:09

« Dis-moi qui tu fréquentes, & je te dirai qui tu es. »Dictionnaire des proverbes françois…, Paris, 1747.

« Si tu fréquentes un homme vil, c’est que tu es de son rang. »Abu Tamman (cité par Évène)

Selon le Nouvel Obs qui le tient du Parisien, Dieudonné a fait ovationner au cours de son spectacle au Zénith vendredi dernier Robert Faurisson. Ce dernier est notoirement connu pour ses propos et ses activités négationnistes depuis de nombreuses décennies qui lui ont valu diverses condamnations et sa radiation de l’université française. Qualifié de « faussaire de l’Histoire » par Robert Badinter, il avait été débouté des poursuites qu’il avait intentées à son égard pour diffamation. On se souviendra aussi de sa participation à une conférence internationale qui s’était tenue à Téhéran en 2006, consacrée au « prétendu “Holocauste” des juifs [qui] est un mythe », propos qu’avait tenus à cette occasion le président iranien et rapportés par Faurisson.

D’autres amis de Dieudonné étaient présents dans la salle : « Jean-Marie Le Pen, son épouse et de nombreux adhérents du FN », selon Jacques Vassieux (cité par le Parisien).

31 janvier 2008

« Dossier K. »

Classé dans : Littérature, Shoah — Miklos @ 9:32

Ici dans ce transport
je suis Eve,
avec Abel mon fils
si vous voyez mon grand fils
Caïn, le fils d’Adam,
Dites-lui que je

— Dan Pagis, « Écrit au crayon dans un wagon scellé »

« Ils ont été assassinés tous les deux à Auschwitz. Ils avaient réussi à jeter une carte adressée à ma mère par la fenêtre du wagon à bestiaux : “On nous a mis dans un train, on nous amène quelque part, on ne sait pas où” – voilà à peu près ce qu’ils avaient écrit. » En lisant la petite phrase qu’Imre Kertész cite de son grand-père et de sa seconde femme, je me suis souvenu de celle que j’avais rapportée à propos des miens, en 1998 :

Avant le départ, j’ai pu enfin me plonger pour de bon dans les derniers messages envoyées, de 1939 à 1942, par mes grands-parents à leurs enfants, pour comprendre ce qu’avait été leur dernier parcours : de la Pologne encore libre à la Russie, où ils s’étaient réfugiés après l’invasion, et bientôt occupée par les nazis. Dans leur ultime carte postale, envoyée le 9 août 1942 de Sambor (en Ukraine), estampillée de la croix gammée, ils écrivaient qu’on les emmenait « au bal dans la ville voisine », demandant de ne plus leur écrire et que Dieu vous bénisse. D’après l’Atlas de la Shoah de Martin Gilbert, c’est durant les deux premières semaines d’août 1942 que les Juifs de cette région furent déportés vers le camp d’extermination de Belzec.

Dossier K.1 est le résultat de longs entretiens qu’Imre Kertész a eus avec son ami et éditeur Zoltán Hafner, qui le pousse à expliciter la frontière mouvante entre fiction et réalité dans son œuvre, surtout en ce qui concerne les aspects biographiques. Mais dès l’introduction, Kertész montre bien qu’il ne se laissera pas faire si facilement : s’il affirme qu’il a écrit ce livre (et non pas retranscrit les conversations) « pour obéir à une incitation extérieure(…) : une autobiographie en bonne et due forme », il rajoute que le résultat est « un véritable roman ». N’est-ce pas une des multiples façons de réfléchir au complexe ou à l’incompréhensible en le tournant sous toutes ses coutures, de dire l’indicible ? Cette dualité traverse sa vie – ballottée dès son enfance entre ses parents divorcés – et son œuvre : « Mais vois-tu, intellectuellement, je me suis émancipé très tôt, et, du moment que j’avais opté pour l’écriture, je pouvais considérer mes soucis comme un matériau de mon art. Et même si ce matériau paraît lugubre, la forme le rachète et le transforme en joie. » Ou l’écriture comme stratégie de survie à la honte de la survie, comme alternative – temporaire pour certains – au suicide :

Je ne sais plus à quel moment je me suis dit pour la première fois qu’il devait y avoir une effroyable erreur, une ironie diabolique dans l’ordre du monde que l’on vit comme la vie ordinaire, normale, et que cette effroyable erreur, c’était la culture, le système des idées, la langue et les notions mêmes qui te cachent le fait qu’il y a longtemps que tu n’es qu’un élément bien huilé d’une machine conçue pour t’anéantir. Le secret de la survie, c’est la collaboration, mais en le reconnaissant une telle honte s’abat sur toi que tu préfères refuser la survie plutôt que d’assumer la honte de la collaboration. »

Ce constat fait écho – mais de façon beaucoup plus frappante (et sincère ?), en ce qu’elle traverse la vie et l’œuvre de Kertész – à celui de George Steiner, lorsqu’il se demande, du haut de sa chaire, si « le culte et la pratique des humanités, la fréquentation du livre à haute dose [ne] sont[ils pas] des facteurs de déshumanisation. Ils peuvent rendre plus difficile notre réponse active à une réalité politique et sociale prégnante ». Si Steiner cultive avec délectation le livre, chez Kertész il est cuirasse et arme. La littérature a changé sa vie, « de la manière la plus radicale qu’il soit », écrit-il à propos de La Mort à Venise de Thomas Mann, en lui faisant comprendre « que la littérature est un bouleversement complet, un coup irrémédiablement porté au cœur, un courage et un encouragement élémentaires, et en même temps quelque chose comme une maladie mortelle. »

On ne saurait éviter de rappeler qu’à quinze ans Kertész a été déporté à Auschwitz et à Buchenwald. La question de la survie – et pas uniquement à « cet événement » – revient dans son œuvre, comme l’évoque l’intervieweur à propos de Procès Verbal : la survie sous les dictatures, mais aussi la capacité à accepter la liberté, après. À cela, Kertész répond : « Pour parler cruellement, je dirais que, dans les dictatures, on “jouit” de la liberté des asiles, tandis que dans la démocratie, il y a un consensus, une vraie responsabilité d’écrivain qui peut limiter ton imagination encline aux débordements ».

Longue réflexion parfois féroce mais jamais méchante sur le fait d’être né prédestiné, en quelque sorte, « enfant juif dans ce monde hostile », et d’avoir à y grandir et à y vivre, c’est ce que Imre Kertész exprime d’une façon qui ne saurait laisser indifférent, bouleversante et sans pathos.


1 Traduit du hongrois par Natalia Zaremba-Huzsvai et Charles Zaremba. Actes Sud, 2008.

1 août 2006

Nestor et la script girl négligente

Classé dans : Cinéma, vidéo, Shoah — Miklos @ 18:30

Pour le chrétien que trouble la chose juive, un ghetto est toujours plein d’énigmes. Celui de Paris est enjolivé d’enseignes ravissantes, de réclames pour pensions yddisch de Deauville, d’affiches relatives à quelque théâtre juif, rehaussées de ferrures et d’ornements architecturaux. C’est un département humain immonde et splendide, peint, criard, ouvragé, rembourré de richesses clandestines, d’accumulations singulières, d’où partent des cours et des ruelles difformes et fangeuses, de sentiers de maison puantes, bordées de magasins dont les inscriptions hébraïques composent un paysage graphique aussi biscornu que ténébreux. Léon-Paul Fargue, Un Piéton de Paris, cité par Nina Gorgus.

Ténébreux indeed. Ce n’est que le zapping fortuit d’une après-midi pluvieuse de vacances qui donne l’occasion de tomber sur les exploits de Nestor Burma et de Florimont Faroux, l’archétype du couple détective privé – commissaire de police, à l’instar de Poirot et de Japp ou de Sherlock Holmes et de Lestrade (voire du trio, si l’on compte leurs assistants Zavatter, Hastings et Watson). L’humour généralement fin et parfois guilleret mais jamais vulgaire, le décor réaliste et quelque peu désuet des années 50-60 en clair-obscur, le jeu au second degré de chat et de souris de Guy Marchand et de Pierre Tornade – excellents dans leur caractérisation truculente et intelligente des personnages, l’un fin et l’autre enrobé – leur donnent un air très frenchie, léger et pétillant : tout est dans l’atmosphère et dans les détails, et les détails y sont soignés, sans pour autant être cousus de trop de fil blanc.

Pourtant, c’est par là que péchait l’épisode diffusé aujourd’hui (« Du Rebecca rue des Rosiers ») et réalisé par Maurice Frydman. L’intrigue se passait dans le vieux quartier juif du Marais (avec un clin d’œil anachronique amusant à sa faune de nuit actuelle), plus connu par les cognoscenti sous le nom de pletzl. Y convergeaient les fils d’une histoire de déportés et de miliciens, de nazis réfugiés en Amérique du sud et de trafiquants, pour culminer en meurtres et enlèvements. Jusqu’ici, rien d’inhabituel pour le genre.

Mais voilà. Burma découvre dans le sac d’Esther Abramovitch assassinée (à l’aide d’un poignard nazi, indice très subtil surtout lorsqu’il s’agit d’une victime juive dans le Marais) une grosse clef à laquelle est attachée une étiquette portant une inscription qu’il ne peut déchiffrer. Non seulement c’est de l’hébreu pour lui, ça l’est pour tout le monde, puisque c’est la langue dans laquelle sont écrits ces quelques mots. C’est la fille des Blums, patrons de la librairie Bibliophane de la rue des Rosiers, qui la lui lira : 7 rue Vieille-du-Temple (quasiment au coin de la rue du Renard). Or l’œil d’un hébraïste averti aurait remarqué qu’elle indiquait 7 rue du Bourg Tibourg… Même quartier, mais pas du tout la même maison : cette dernière se trouve près de la rue du Roi-de-Sicile. Et pourtant, la clef ouvrira la porte d’une cave rue Vieille-du-Temple (immeuble tagué de graffiti plus années 90 que 60), où Burma découvrira une partie du pot aux roses.

Quant à l’enveloppe de la lettre envoyée de Caracas à la poste restante de la rue de Moussy à l’intention de Mr Ramovi (le Moriarty de l’affaire), elle n’indiquait même pas le pays. Comment aurait-elle pu arriver à temps pour permettre à Burma de l’intercepter sous le nez de son destinataire et de subtiliser les trois millions de dollars que la belle Sheila devait remettre à Ramovi ? Ce milicien, tortionnaire à l’infâme 93, rue Lauriston (siège de la « Carlingue », ou « Gestapo française », durant l’occupation) et assassin alors comme aujourd’hui, avait la curieuse mais commode habitude de s’installer dans les résidences de ceux qu’il éliminait (grâce à quoi Burma le retrouvera facilement avant la fin des quatre-vingt-dix minutes de cet épisode) – à commencer par la cave d’Abramovitch pour finir par l’appartement du journaliste trop curieux qui l’avait traqué : Esther était sa petite amie, et elle voulait savoir ce qu’il était advenu à son grand-père.

D’ailleurs, on peut se demander (on ne le saura jamais) pourquoi Ramovi avait tué Abramovitch en 44, tandis que l’intrigue fait comprendre qu’il l’avait protégé en tant qu’« assurance vie » pour l’après-guerre (s’il avait un ami juif, il ne pouvait pas être si pourri que ça), mais on en n’est plus à une contradiction près, et ça ne change rien au suspense. Et les trois millions ? Burma devait les remettre à leur légitime propriétaire, un truand vénézuélien auquel Ramovi les avait subtilisés et qui tenait Hélène, la secrétaire de Burma, en otage. Il fera d’une pierre deux coups : il laisse Florimont cueillir la fleur de la pègre sud-américaine, et donne le gros du pactole, après y avoir prélevé ses frais, aux Blums (qui avaient adoptés Esther, vous suivez toujours ?) pour leur permettre de partir s’installer en Israël, ce qu’ils souhaitaient faire après ces malheureux événements.

Et cet épisode plein de bruit et de fureur se clôt sur une bonne histoire juive bien authentique, celle-là :

Burma : Mr Blum, pourquoi êtes-vous venu de Pologne en France, c’est à cause de l’antisémitisme ?
Blum : Non, je ne pouvais pas me plaindre.
Burma : Alors à cause de l’argent ?
Blum : Oh non, je ne pouvais pas me plaindre.
Burma : Mais est-ce à cause de la nourriture ?
Blum : Mais non, je ne pouvais pas m’en plaindre.
Burma, exaspéré : Mais pourquoi donc êtes-vous venu de Pologne, si vous ne pouviez vous y plaindre de rien ?
Blum : Parce qu’en France j’ai le droit de me plaindre de tout ça.

29 août 2005

Un autre Marais

Classé dans : Lieux, Shoah — Miklos @ 20:59

Samedi s’est achevée l’exposition Du Refuge au piège : les juifs dans le Marais qui se tenait depuis mai à l’Hôtel de Ville de Paris. À travers un ensemble très bien choisi et présenté de documents d’époque — textes, documents administratifs, photos, objets — et d’entretiens filmés, cette exposition décrit d’abord brièvement l’histoire de cette communauté très ancienne, puisque présente depuis le Moyen Âge1 et déjà sujette à des persécutions2 depuis lors jusqu’à l’Affaire Dreyfus (1894). Tant bien que mal, une communauté s’est développée à Paris, et les photos de la première moitié du XXe s. illustrent sa variété et sa vitalité dans ce quartier du Marais : métiers de rue et petits commerces (brocanteurs, casquettiers, tailleurs, coiffeurs, épiciers…), écoles, lieux de culte…

Ce petit monde pauvre mais dynamique et solidaire vivait souvent dans une sombre misère dans des lieux tels que l’îlot insalubre n° 16, devenu si tristement célèbre durant l’occupation : c’est alors qu’ont lieu qu’aryanisation économique et spoliations, puis rafles, exécutions (fusillés, comme Samuel Tyszelman, dit Titi, âgé de 17 ans, pour avoir manifesté3 ; ou massacrés comme cette résistante « achevée à la pelle »), déportations et exterminations — illustrées par des documents administratifs d’époque, glaçants par leur objectivité férocement insensible ; leur choix judicieux alterne documents de portée générale et cas individuels, comme ceux des 112 locataires (dont 40 enfants) du 10-12 rue des Deux-Ponts, raflés et déportés à Auschwitz en 1942.

L’exposition se termine par quelques documents illustrant le retour des survivants et leur accueil à l’Hôtel Lutecia, où, comme le relate l’un d’eux, ils dormirent par terre, le lit étant trop mou, ce qui peut paraître drôle tant que l’on n’a pas vu les châlits dans les camps. Les témoignages audiovisuels sont particulièrement remarquables, autant par leur contenu que leur sobriété : aucun effet de caméra, qui reste fixée, comme fascinée, sur l’interviewé ; aucun effet de dramatisation dans les témoignages qu’ils apportent, même dans les épisodes les plus dramatiques et déchirants : séparation des parents, arrestation ou déportation, survie dans les camps de concentration, marches forcées…

Il en ressort, finalement, une humanité sans borne qui ne peut que donner de l’espoir en l’être humain : Samuel Adoner parle ainsi de l’entraide sans faille avec trois autres déportés, avec lesquels il se partageait le moindre croûton de pain ; Lucien Finel décrit ses pérégrinations, adolescent, pour retrouver son père pris dans une rafle, et qu’il a pu revoir pour une dernière heure, au camp de Beaume-La-Rolande grâce à l’indulgence d’un gardien ; Adi Steg relate le dévouement citoyen des « maîtres d’école », qui aidaient les jeunes immigrés arrivés sans connaître un traître mot de français à pouvoir le parler trois mois plus tard… Dévouement d’ailleurs qu’a illustré, au plus haut point, Joseph Migneret, directeur de l’école des Hospitalières Saint-Gervais, qui portait une attention individuelle à chacun de ses élèves ; il a tenté de les protéger durant la guerre, jusqu’à en cacher chez lui, et est mort peu après la fin de la guerre, « de tristesse au constat de ce qui a été fait à ses élèves », dit l’un de ceux qui ont survécu.

Un ouvrage, édité par Jean-Pierre Azéma, commissaire de l’exposition, a été publié à son occasion : Vivre et survivre dans le Marais. Au cœur de Paris du Moyen Âge à nos jours. Il comprend de nombreux textes d’historiens et de spécialistes qui décrivent les avatars de ce quartier, sans oublier « La place des gays » (par Laurent Villate)

À lire :

  • Rapports sur la spoliation immobilière de la Ville de Paris
  • Rapport de la commission Mattéoli sur la spoliation des Juifs de France
  • Le Marais du moyen âge au quartier gay, dossier du Nouvel Observateur

  • 1 Au VIe siècle, une communauté juive a prospéré à Paris. Une synagogue a été construite sur l’Île de la Cité. Détruite postérieurement, une église a été érigée à sa place.

    2 Expulsions en 1182, 1253, 1306, 1394 (qui ne fut annulée que durant la Révolution française)… accompagnées de spoliations ; brûlement public du Talmud en 1244 ; accusation de meurtre rituel en 1290 encore véhiculée au début du XXe s… Les commissariats aux Juifs ne sont d’ailleurs pas une invention de Vichy, comme le montre entre autre un acte datant de 1379.

    3 Vengé par le colonel Fabien, dans l’attentat au métro Barbès.

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