Miklos
« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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21 février 2006

La mémoire à l’ère du numérique

Classé dans : Livre, Sciences, techniques — Miklos @ 16:32

Le magazine Livres Hebdo, consacré à l’actualité de l’édition et de tout ce qui s’y rapporte (technologie, économie, société…) publie dans son numéro 629 du 20 janvier un article de quatre pages de Daniel Garcia sous forme de scoop, intitulé « evenement La révolution du papier électronique est pour demain matin ». Il nous fait découvrir cette technologie et son potentiel, car « Et la France, dans tout ça ? Rien ». Elle est effectivement intéressante : elle permet de produire des « pages » aussi fines et souples que du paper, composées de micro-billes bitonales (blanc/noir) et bientôt multicolores. Le texte (ou le dessin) s’affiche par le positionnement électrique de ces billes : une fois en place, elles n’ont plus besoin d’être alimentées par l’électricité, à la différence d’un écran informatique traditionnel. En plus, l’image que l’on y perçoit ne génère pas sa propre lumière (comme le font les écrans), mais, à l’instar du papier, elle reflète la lumière ambiante.

Ce qui ne manque pas d’un certain piment piment : ce même magazine avait publié deux textes dans lesquels je parlais de ce type d’invention : Le titre d’un livre n’est pas le livre (en août 1999), puis La numérithèque entre réalités et fantasmes (en mai 2000). Dans ce dernier, la rédaction avait même rajouté un chapeau qui faisait ressortir l’importance que j’y accordais. Ces textes sont toujours en ligne, ainsi que ma toute première annonce de cette invention, dans la lettre de veille technologique l’œil du système. Il suffit d’effectuer une recherche dans les moteurs pour les retrouver : essayez, dans Google par exemple, la recherche   »e-paper » « livres hebdo »  (avec les guillemets) et voyez les réponses… À force de compter sur le numérique comme prothèse de la mémoire, celle-ci se déliterait-elle encore plus vite ? Il n’est pas forcément nécessaire d’avoir toujours recours à ces technologies, comme l’a montré la première partie d’un extraordinaire reportage d’Arte diffusé hier : il suffirait d’une balle de base-ball mal lancée…

Revenons à cette invention. Le contexte d’alors n’est plus celui d’aujourd’hui : la masse de livres numérisés soulève la question de leur lecture. Avec les écrans actuels, impossible de lire un roman (par exemple) comme on le fait avec un livre « traditionnel ». On n’en est encore qu’à une version « simple page » de ce nouveau support, et l’article en question indique justement que c’est « l’univers de la presse qui pourrait être le premier et le plus vite bouleversé par l’encre électronique ». Ce n’est pas nouveau : la feuille est plus facile à réaliser que le codex, et se prête plus à la brève qu’au roman-fleuve. Mais lorsque ces nouvelles pages pourront être assemblées en livre, on peut s’attendre à des changements, de l’ordre de ceux dont je parlais alors :

On peut alors imaginer le livre futur : un volume de quelques centaines de ces pages vierges, vides, blanches, prêt à accueillir tous les livres du monde. On y insère une carte à puce, et le contenu, texte et images, s’inscrit sur toutes ses pages, le titre sur sa couverture et le nombre de cartes vendues en 4e de couverture [...] Les éditeurs, profitant de cette manne, proposeront alors ces cartes à durée déterminée, à lire dans la semaine ou le mois suivant l’achat, leur contenu s’effaçant ce délai passé. Procédé fort utile pour la diffusion des quotidiens […]

Comme quoi, l’inquiétude des éditeurs sur la gestion des droits (que mentionne cet article de Livres Hebdo) pourrait aussi trouver des réponses dans le cadre de cette technologie, comme elle l’a déjà trouvé ailleurs : l’imagination techno­logique n’a pas de limites. Si les procédés douteux de Sony (à propos de qui l’article indique qu’« il ne cache pas son ambition de devenir leadermondial de la lecture électronique »), qui avait installé un mouchard infor­matique aux impli­cations catas­tro­phiques sur ses disques compacts, afin d’éviter leur dupli­cation (dispositif connu sous le nom de rootkit) ont fait long feu, on a déjà vu des DVD qui s’autodétruisent inten­tion­nel­lement quelques jours après les avoir déballés (et dont on avait parlé il y aura bientôt trois ans). En d’autres termes, on n’a encore rien vu…


Papier électronique
de Xerox

Enfin, sur l’invention elle-même : deux technologies concurrentes étaient apparues alors (comme c’est souvent le cas) : celles du MIT dont parle l’article et appelée E Ink et celle de Xerox qui a annoncé fin décembre la fermeture de sa filiale chargée de ce développement… On peut toutefois encore voir sur son site l’image d’un livre qui aurait pu être réalisé avec son invention (non, je ne l’avais pas vue quand j’en avais imaginé la réalisation future).

[Texte revu le 23/2/2006]

L’Arménie

Classé dans : Humour, Littérature, Musique — Miklos @ 2:56

- Est-il vrai que la moitié des membres du Comité central est composée d’idiots ?
- Faux : la moitié d’entre eux ne sont pas des idiots.
 
- Quelle est la différence entre un conte de fée anglais et russe ?
- Le conte de fée anglais commence par « il était une fois », tandis que le conte russe commence par « un jour viendra ».
 
- Qu’est ce qu’est un duo soviétique ?
- Un quatuor après une tournée à l’étranger.
 
- Pourquoi les policiers patrouillent-ils trois par trois ?
- Les équipes sont choisies de telle sorte que l’un sache lire, l’autre sache écrire, et pour que le troisième surveille ces deux intellectuels.
 
- Qu’y a-t-il de permanent dans notre économie socialiste ?
- Les pénuries temporaires.
 
- On nous annonce que le communisme est à l’horizon. C’est quoi, l’horizon ?
- L’horizon est une ligne imaginaire qui s’éloigne à mesure qu’on s’en rapproche.

Radio Erevan n’est pas un média arménien (pays dont la capitale est Erevan), ni un média tout court : c’est une station mythique qui n’a émis que par le bouche-à-oreille, et qu’un genre de contenus, des blagues pince-sans-rire russes sur l’absurde de la vie sous le régime soviétique en URSS, suivant un modèle de question-réponse :

- Ici Radio Yerevan. Un de nos auditeurs demande : « Peut-on emballer un éléphant dans un journal ? »
- Nous répondons : « En principe oui, si c’est un numéro qui contient un discours de Khrouchtchev. »

On en trouvera quelques autres ci-contre.

L’Arménie, la vraie, est un pays avec une très lon­gue histoire, remontant à 782 avant J.-C., date de la fondation d’Erevan. Plus souvent envahie et occupée (par les Grecs, les Romains, les Perses, les Français, les Turcs, les Géorgiens, les Russes…), elle connaît des périodes d’indé­pen­dance : ainsi, au Ie s. avant J.-C., sous Tigrane le Grand, l’empire d’Arménie s’étendra de la Mer Noire à la Caspienne et à la Méditerranée. En 301, elle adopte le chris­tianisme comme religion d’état. C’est au XXe s. qu’elle subit le martyre du génocide au cours duquel elle perdra deux tiers de sa popu­lation vivant dans l’empire ottoman. Ce n’est qu’en 1991 qu’elle accède fina­lement à l’indépendance.

La culture arménienne – art, littérature, musique – se retrouve non seulement en Arménie mais là où a essaimé sa diaspora. L’une des plus anciennes commu­nautés armé­niennes est celle de Jérusalem, qui s’est établie en 254. La biblio­thèque de son Patriarcat est l’un des plus grands centres au monde de docu­men­tation de et sur l’Arménie et les Arméniens. Elle porte le nom de Calouste Gulbenkian (1869-1955), magnat arménien, amateur d’art et philanthrope, dont la Fondation, établie au Portugal, héberge dans son musée une extra­or­dinaire collection. Parmi les créateurs arméniens qui se sont fait connaître de par le monde, on n’oubliera pas l’écrivain William Saroyan, les compo­siteurs Aram Khatchaturian (1903-1978) ou Alan Hovhaness (1911-2000), ni notre Charles Aznavour.

L’ensemble Shoghaken a donné le 21 avril 2004 un concert au Centre Kennedy de Washington. Une vidéo de la per­for­mance est dispo­nible en ligne.

La musique armé­nienne est princi­pa­lement tra­di­tionnelle, reli­gieuse ou popu­laire (chants pastoraux, de troubadour…), mono­pho­nique et modale. Elle remonte aux premiers siècles après J.-C. – on y trouve même quelques éléments païens précédant l’adoption du chris­tia­nisme. Elle utilise des instru­ments tradi­tionnels variés (vents, cordes, percussions…) typiques, et notamment le duduk, une sorte de hautbois à double anche dont le son est parti­cu­lièrement doux et expressif. C’est ce qu’on a eu le bonheur d’entendre hier au Théâtre de la Ville, où s’est produit l’ensemble arménien Shoghaken. Au cours du concert joyeux et enlevé qu’ils ont donné devant une salle comble et enthousiaste, on a pu entendre un choix d’œuvres – chant de troubadour, berceuses, danses avec chant… – et de styles variés, selon les régions et les époques et où l’on pouvait percevoir les influences plus ou moins orientales et, parfois même une parenté avec la musique de genre klezmer. Moment très chaleureux !

L’année 2006/2007 a été déclarée année de l’Arménie en France. « Cet évènement national, initié à la demande du Président de la République, sera orchestré par Mme Nelly Tardivier-Henrot, chargée de mission au musée du Louvre. L’objectif de cette action est de faire découvrir l’Arménie et sa civilisation vieille de 3000 ans à un public français le plus large possible. Des expositions, des concerts, des colloques, des festivals, des projections seront programmés dans toute la France. La République d’Arménie a été officiellement associée et participera à la hauteur de l’événement. D’ores et déjà, le musée du Louvre consacrera une exposition sur le patrimoine arménien. D’autres manifestations culturelles nationales seront associées à l’année de l’Arménie et seront porteuses de retombées médiatiques importantes. » (Source : Le patrimoine arménien en France). Il est tout de même étonnant de ne trouver aucune information à ce sujet sur les sites culturels français.

À lire :
Bibliographie arménienne (en français)
Les arts de l’Arménie (en anglais, avec 300 illustrations en couleur)

20 février 2006

Un dimanche au musée

Classé dans : Humour, Littérature — Miklos @ 6:55

Je suis épouvanté, je le dis bien haut, du développement insensé que prennent de jour en jour les expositions publiques. Cette manie de rassem­bler dans un espace limité des milliers d’objets pareils, loin de donner de la valeur aux choses, les efface et les noie dans la plus écœu­rante satiété. Tout cela a été fait pour embellir les demeures des hommes, pour leur rendre la vie douce, pour élever leurs pensées, et non pas pour figurer dans ces inter­mi­nables galeries où circule niai­sement une foule hébétée, avec des jacas­sements de perro­quets idiots et des excla­mations de canards prétentieux. J’en dis autant des musées…

Eugène Mouton (dit Mérinos), L’Expositomanie

19 février 2006

Questionner la réalité

Classé dans : Cinéma, vidéo, Littérature — Miklos @ 3:10


Pieter Bruegel dit l’Ancien : La parabole des aveugles.1568. Détrempe sur toile, 86×154cm. Galerie nationale de Capodimonte, Naples.

La Ronde de nuit est un film où le mystère et l’étrange croissent au fur et à mesure de la progression de Victor (Gonzalo Heredia), son principal protagoniste, dealer à la gueule d’ange qui fait aussi commerce de son corps, dans la nuit d’une Buenos Aires de marginaux et de ceux qui les exploitent, de taudis et de clubs de luxe. Son parcours commence dans l’innocente assurance de celui qui possède le désir des autres et le plaisir de vivre, puis se transforme insidieusement en une dérive déroutante entre l’amour et la vengeance, la vie et la mort, le réel et le surnaturel. Ce jeune dieu victorieux se transforme en pantin aux mains d’un sort aveugle qui s’acharne inexplicablement et le plonge dans une noirceur aussi sombre que l’interminable nuit, dont il n’émergera qu’au petit matin ; ce sort n’est pourtant aveugle que pour qui ne peut voir : ce sont les manifestations de ses choix et actes passés qui reviennent le confronter, mais le comprend-il vraiment ? Seul instant de lumière dans cette errance plus incompréhensible et tragique que désespérée, l’œillet rouge que lui offre une fleuriste et qui éclaire sa nuit, un moment.

Était-ce une nuit exceptionnelle, ou est-elle le quotidien qu’il retrouvera à la tombée du jour ? Dans la subtile spirale que forme ce film en forme de ronde – autant dans les lieux que par les gens que Victor croise, mais aussi entre passé et présent – on découvre, au début de la nuit, qu’on ne l’avait pas vu depuis longtemps dans les parages ; puis, plus tard, que c’est le 1er novembre, jour de la fête des morts. Et alors, on ne saura plus vraiment qui, des protagonistes, était réellement vivant et qui était un mort revenu pour emmener à jamais avec lui l’être aimé resté sur terre. Ce parcours n’est pas sans rappeler la traversée d’une Islande fantasmatique par Atsushi Hirata, jeune japonais venu y rendre les derniers honneurs à ses parents défunts, dans le très beau film Cold Fever de Friðrik Þór Friðriksson. Il y croisera aussi des êtres dont on ne saura parfois que plus tard qu’ils ne sont pas de ce monde. Mais ce film en est aussi l’opposé : ce parcours-là a un terme apaisé, tandis que celui de Victor se termine dans l’incertitude d’un possible éternel recommencement.

S’il porte le titre du célèbre tableau de Rembrandt à l’apparence paisible, ce film fait d’abord penser à celui de Bruegel qui dépeint la longue, pénible et inéluctable descente – vers les enfers ? – de six malheureux aveugles sur lesquels le sort semble s’acharner. Mais la Ronde de Nuit de Rembrandt est loin d’être une scène banale, pour peu qu’on l’examine attentivement. Tout d’abord, il ne s’agit pas d’une scène nocture : le nom du tableau est dû à l’état de saleté dans lequel on l’avait retrouvé ; lorsqu’il fut restauré, il s’averra qu’il représentait une compagnie de soldats sortant d’une cour sombre et s’avançant dans la lumière du jour. Mais plus encore : dans un entretien récent, le cinéaste Peter Greenaway, qui réalise une installation autour du tableau au Rijksmuseum d’Amsterdam (2/6-6/8/2006), affirme qu’il s’agit d’une conspiration, voire d’un assassinat : « Regardez le soldat en uniforme blanc : à gauche de son chapeau, on peut voir la bouche d’un fusil. Un coup en est tiré. Quelqu’un est tué, et tous les protagonistes du tableau le savent. Ils couvrent le meurtre ». Victor sera le témoin d’un meutre incompréhensible, et fera l’objet de plusieurs tentatives de meutre.

Le réalisateur de La Ronde Edgardo Cozarinsky est un créateur complexe. S’il mêle ici réel et surnaturel d’une façon à peine perceptible, il n’hésite pas à brouiller les frontières entre documentaire et fiction dans son œuvre, qu’elle soit cinématographique ou littéraire, et à illuminer la paradoxe complémentarité de la linéarité et de la circularité dans l’histoire. Ainsi, dans la belle nouvelle La Fiancée d’Odessa (première des nouvelles dans un recueil éponyme) il relate l’histoire d’un jeune Juif venu de Kiev à Odessa d’où il veut partir en 1890 vers l’Amérique, laissant derrière lui la femme qu’il venait d’épouser et qui ne voulait le suivre. La veille de son embarquement, il rencontre une jeune Russe qui le convaincra de l’emmener avec lui en se faisant passer pour son épouse légitime. Cette substitution deviendra un secret de famille que se passeront les générations. Lorsque l’arrière-petit-fils de ce couple l’apprend, il décide de l’écrire. Or Cozarinsky est né en Argentine (pays qu’il a quitté pour la France avec la chute d’Allende) d’aïeuls juifs venus de Russie. Où est la fiction, où est la réalité ? Cet exilé à l’identité déchirée et démultipliée entre cultures et lieux a su en transformer le tragique en acte créateur.


Rembrandt : La compagnie de milice du capitaine Frans Banning Cocq, dit La Ronde de Nuit. 1642. Huile sur toile. Rijksmuseum, Amsterdam.

18 février 2006

Deux pigeons s’aimaient d’amour tendre

Classé dans : Cinéma, vidéo, Nature — Miklos @ 10:03

Enfin, ce n’étaient pas exactement des pigeons. Ils étaient tous deux du sexe fort. L’amour les saisit dans la nature, et ils s’aimèrent durant de longues années, envers et contre tout. Jusqu’à ce que l’un des deux se trouva une compagne. L’autre tomba en dépression. Finalement, il se maria, lui aussi.

Non, il ne s’agit pas non plus de ces deux cowboys qui s’étaient rencontrés à Brokeback Mountain, mais de deux vautours mâles du zoo de Jérusalem, ville où tous les miracles sont possibles, qui avaient construit leur nid ensemble et avaient élevé trois nourrissons adoptifs, après avoir couvé des œufs discrètement posés par des experts du zoo. C’est en 2005 que le couple battit de l’aile et se sépara, après dix années de vie commune. (Source : TSR)

Quant aux deux cowboys du film en question, la situation et son développement sont, somme toute, convenus. Ce qui en fait surtout l’originalité est le genre – le « grand » cinéma genre Hollywood – et donc son circuit de diffusion et sa visibilité. Heath Ledger joue le rôle d’un cowboy de peu de mots et mal à l’aise avec la parole, surtout au début, mais c’est son jeu que je trouve laborieux et peu convainquant. Le vrai héros du film est finalement la nature, presque inhumaine dans son immensité et sa beauté grandioses, monde en marge du monde, paradis sur terre d’où le couple sera chassé vers la réalité.

C’est aussi un homme « nature » et de peu de paroles, le trappeur Jed Cooper, que joue Victor Mature dans The Last Frontier (La Charge des tuniques bleues). Cet excellent film d’Anthony Mann, datant de 1955, vient d’être montré sur le splendide écran de la Cinémathèque française (dans le cadre d’une rétrospective) dans une version très bien restaurée. Quel jeu que celui de Cooper ! Ici aussi, il s’agit d’un homme pris dans ses contradictions – entre son besoin de solitude et l’appel de la nature, d’une part, et le sort qui le place dans un milieu antithétique, celui de l’armée, de ses règles et de sa hiérarchie, d’autre part. Ce personnage est loin d’être unidimensionnel et fait montre de profondeur, d’humour et de sentiments tout en se débattant dans un réseau complexe de circonstances historiques et sociales auquel sont convoqués des personnages de tragédie grecque : le Colonel (Robert Preston), d’une rigidité inhumaine et mortifère qui dissimule mal son sentiment d’infériorité et d’inadéquation ; sa femme (Anne Bancroft, récemment décédée), d’un excellent milieu, qui, après avoir aimé son mari malgré tout, en méprise la dure faiblesse et tombe amoureuse du trappeur qui s’humanise à son contact ; le jeune et beau Capitaine (Guy Madison), qu’on aurait pu croire destiné par des conventions de casting à convoler, tel un jeune premier, avec la toute aussi jeune et belle Colonelle, mais que nenni : il représentera l’honneur de l’armée et son humanité. Ce sont les Indiens dépossédés feront les frais de l’utopie américaine.

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