Mal citer un auteur, c’est ajouter au malheur de ce monde
«On entend souvent la citation « Mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde » que l’on attribue à Albert Camus. Cela sonne bien, mais il n’a pas dit exactement cela – la phrase de 1944 dit : « Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde » ! « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent »aisément », affirmait avant lui Nicolas Boileau. Or ce qui est mal nommé ne peut pas précisément se penser !
Gérard Ostermann, « L’étrange et terrible destin des anorexiques », in Histoire de la folie avant la psychiatrie, sous la direction de Boris Cyrulnik et Patrick Lemoine. Odile Jacob, 2018.
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«Voici le passage extrait de « Sur une philosophie de l’expression », compte-rendu de l’ouvrage de Brice Parain, Recherches sur la nature et la fonction du langage, éd. Gallimard, in Poésie 44, n° 17, p. 22.
L’idée profonde de Parain est une idée d’honnêteté : la critique du langage ne peut éluder ce fait que nos paroles nous engagent et que nous devons leur être fidèles. Mal nommer un objet, c’est ajouter au »malheur de ce monde. Et justement la grande misère humainequi a longtemps poursuivi Parain et qui lui a inspiré des accents si émouvants, c’est le mensonge.
Source : Dicocitations