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2 mars 2006

Énigmes pour amis et pour ennemis

Classé dans : Musique, Sciences, techniques — Miklos @ 2:20

« N’avais-je pas su, le premier, le seul, répondre à l’énigme du sphinx ? » (André Gide, Thésée)

La sonorité du mot énigme est complexe et particulière ; elle attire l’attention par la stridence soudaine du /ni/ annonçant le choc de la plosive /g/ immédiatement étouffé par la nasale /m/. En anglais, le /a/ final lui donne le loisir de s’éteindre mystérieusement. Ce mot est surtout irrémédiablement associé au souvenir du Sphinx et à Œdipe le détricoteur d’énigmes – et donc à la condition de l’homme de tout temps se débattant avec le destin (tel que le fit d’ailleurs Joseph l’oniromancien, le Freud d’un Pharaon, avec l’ange).

Le compositeur britannique Edward Elgar (1857-1934) a composé les quatorze Variations sur un thème original pour orchestre op. 46 plus connues sous le nom de Variations Enigma (on peut en écouter une version transcrite pour piano MIDI par Robert Finley ici). Quels mystères dissimule cette belle œuvre pleine de tendresse ? Il s’agit d’abord de celui de l’amitié : chaque variation est dédicacée à un de ses proches, indiqué par des initiales, par un deuxième prénom voire par un surnom ; il s’agissait de découvrir leur identité, ce qui a été fait, même si le (ou la) dédicataire de la 13e variation, indiqué uniquement par trois astérisques, a fait l’objet de savantes recherches. Mais un autre mystère s’y cache bien plus profondément : Elgar a fait remarquer que les variations n’offrent qu’un rapport superficiel avec le thème apparent, et qu’il y a un autre thème, qui n’est cité nulle part dans l’œuvre, auquel elles se rapportent toutes. Ce thème caché est lui-même une variation sur une mélodie connue que personne n’est encore arrivé à vraiment identifier, même si les hypothèses n’ont pas manqué. Mystère très psychanalytique, d’autant plus que la dernière variation est dédicacée… à Elgar lui-même.

« Enigma » désigne le système de chiffrage des messages secrets de l’Allemagne durant la Deuxième guerre mondiale – qui utilisait une machine que l’on voit ci-contre – et que l’on croyait absolument sûr. Inventé en 1918 pour des applications commerciales, il fut racheté par l’armée allemande à des fins militaires. C’est grâce à Alan Turing (1912-1954), mathé­maticien de génie au destin tragique qui a établi le grand principe de l’informatique théorique (de quels genres de calcul est capable un ordinateur quel qu’il soit), qu’Enigma fut finalement décrypté, ce qui ne contribua pas pour peu à la fin de la guerre. L’ordinateur qui servit à le faire fut démantelé : il recelait trop de secrets militaires. Cet épisode ne cesse d’intéresser autant les passionnés de mystère que les informaticiens amateurs ou professionnels, qui ont réalisé une pléthore de simulateurs, pour certains ingénieux, de la terrifiante machine de cryptage. Stefan Krah, lui, s’est attaché au problème inverse : trois messages datant de 1942 n’ayant pas été décodés par les Alliés, il vient de lancer un projet pour le faire à l’aide de méthodes algorithmiques complexes qui nécessitent une grande puissance de calcul. Il affirme avoir ainsi décodé l’un des messages, et fait appel à des volontaires pour lancer les programmes qu’il a conçus sur leurs ordinateurs, dans une tentative de résoudre en commun le reste de l’énigme. Mystère, quand tu nous tiens… (Source : Cnet)

Un commentaire »

  1. [...] la « console » DS (pour Double Screen) de Nintendo. Une société espagnole, au nom qui fait penser, au vu du contexte, aux célèbres variations d’Elgar plutôt qu’au système de chiffrage [...]

    Ping par Miklos » Alla breve. V. — 23 août 2009 @ 11:22

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