Regards voilés à Rome
Igor Mitoraj : St. Jean le Baptiste, 2006. Église Sainte-Marie-des-Anges
«Entrons maintenant [dans Rome] ; heureux ceux qui n’en sortent plus ! car cette ville ne peut être abandonnée qu’avec regrets et larmes, tous les voyageurs l’ont déjà dit. C’est là que l’artiste surtout, l’homme de poésie et de sentiment, aime à fonder son tabernacle ; Raphaël songeait au bonheur calme et serein que Rome seule peut donner, lorsqu’il peignit la Transfiguration. » Michel-Ange mit en œuvre d’architecture la théorie, du Thabor ; il bâtit à Rome trois tentes, Sainte-Marie-des-Anges, le Capitole, le dôme du Vatican ; une pour lui, une pour Virgile, une pour Dieu.
Joseph Méry, « Italie. — Sienne. — Radicoffani. — Aquapendente. — Rome », in Revue de Paris, tome VIII. Bruxelles, 1835.
Le Nil (détail). Fontaine du Bernin, place Navone
«Le Bernin, pour exprimer l’inutilité des tentatives faites de tous temps» pour trouver les sources du Nil, lui a couvert la tête d’un voile ; idée que Lucain avoit rendue dans ces vers : Arcanum natura caput non protulit ulli,
Nec licuit populis parvum te, Nile, videre.
Antoine-Nicolas Dézallier d’Argenville, Vie des fameux sculpteurs, depuis la renaissance des arts, avec la description de leurs ouvrages. Paris, 1787.
«On prétend que le voile qui couvre la tête du Nil, au lieu d’être une allusion au mystère de sa source, » est une épigramme de Bernin contre son rival implacable, le Borromini. Cette figure se- cache la tête pour ne pas voir la façade de l’église de Sainte-Agnès, le moins bizarre toutefois des ouvrages du Borromini.
Augustin Joseph du Pays, Itinéraire descriptif, historique et artistique de l’Italie et de la Sicile. Paris, 1855.
«Nous vîmes immédiatement au-dessous de nous le Nil, semblable à un ruisseau qui à peine aurait eu assez d’eau pour faire tourner un moulin. Je ne pouvais cependant me rassasier de contempler ce fleuve si près de sa source. Je me rappelais tous les passages des auteurs anciens d’après lesquels il semblait que cette source devait rester éternellement cachée. Les vers du poète me revinrent surtout dans la mémoire, » et je jouis, pour la première fois, du triomphe que je devais à une intrépidité fécondée par la Providence et qui m’élevait au-dessus d’une foule d’hommes puissants et savants qui, dès la plus haute antiquité, ont tenté vainement l’entreprise dans laquelle j’eus le bonheur de réussir. »
James Bruce, Voyage aux sources du Nil (1769-1770). Karthala Éditions, 2004.