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4 février 2009

Amours éphémères

Classé dans : Littérature, Nature, Photographie — Miklos @ 21:00

«Car ce que nous croyons notre amour, notre jalousie, n’est pas une même passion continue, indivisible. Ils se composent d’une infinité d’amours successifs, de jalousies différente et qui sont éphémères, mais par leur multitude ininterrompue donnent l’impression de la continuité, l’illusion de l’unité. La vie de l’amour de Swann, » la fidélité de sa jalousie, étaient faites de la mort, de l’infidélité, d’innombrables désirs, d’innombrables doutes, qui avaient tous Odette pour objet. S’il était resté longtemps sans la voir, ceux qui mouraient n’auraient pas été remplacés par d’autres.

Marcel Proust, Du côté de chez Swann.

«Nos éphémères n’ont point de bouche sensible : elles ne mangent donc point. J’ai lieu de le croire, du moins si elles prennent de la nourriture, ce ne peut être que de la rosée qui tombe fur l’herbe ou du suc qui sort des feuilles des plantes : peut-être qu’elles ont une petite ouverture en dessous de la tête, une petite bouche par laquelle elles succent une telle humidité ; mais je ne saurois l’assurer. Ce que je sais, c’est qu’elles sont de très-foibles animaux, on les blesse par le plus léger attouchement; elles sont aussi fort tranquilles & ailées à prendre avec la main, fur-tout pendant le jour, quand on les trouve en quantité fur les plantes ; on les prend aisément entre deux doigts : elles tâchent pourtant de sauver leur vie, en s’envolant, quand on ne les approche pas assez doucement, mais elles ne volent pas loin en plein jour. Le soir elles font très-alertes, & volent avec légèreté & beaucoup de facilité ; quelquefois elles s’élèvent bien haut en l’air. (…)

J’ai été très-attentif à observer les soirs où les éphémères voloient, si elles s’accouploient, & je les ai vues plusieurs fois s’accoupler véritablement. J’en ai vu souvent attachées ensemble, qui voloient dans l’air fans se quitter. J’ai vu au milieu de l’air dans une assemblée d’éphémères, un mâle se saisir d’une femelle, & rester attaché à elle ; elles s’envolèrent toutes deux vers le haut d’un mur, où elles se posèrent sans se quitter l’une l’autre : le mur étoit si élevé que je ne pus pas voir distinctement ce qu’elles firent, je vis pourtant, quoique de loin, qu’une d’elles, sans doute le mâle, étoit en mouvement & en action avec son ventre, le courbant en dessous, selon toute apparence pour chercher l’endroit convenable du corps de la femelle; mais ayant été obligé de les quitter, pour me rendre en un lieu où ma présence étoit nécessaire, j’ignore combien de temps elles restèrent ensemble. Si elles avoient trouvé à propos de se placer plus à portée de mes yeux, j’aurois pu voir comment l’accouplement s’achevoit. Enfin nous savons du moins par cette observation, bien qu’imparfaite, que les éphémères s’accouplent véritablement, » comme tous les autres insectes, & que leur accouplement ressemble beaucoup à celui des mouches qu’on nomme Demoiselles, dont les mâles saisissent les femelles en l’air, & vont ensuite se placer sur quelque endroit fixe, où le reste s’achève.

Carl De Geer, Observations sur les éphémères, sur les pucerons, et sur les galles résineuses. Extraites principalement d’une Lettre écrite à M. de Reaumur (…) le 7 Mai 1746.

«Éphémères d’un jour qu’en jouant je délivre
Qui veniez par boutade au caprice du vent,
Vous que l’ennui de vivre a ramenés souvent,
Et le besoin d’aimer plus que l’ennui de vivre ;
 
Vous n’avez rien coûté, pour autant je vous livre ;
Vous n’avez rien coûté, que le soin émouvant
De vous saisir au vol dans le ciel, en rêvant
À ce ciel de l’Idée où je voulais vous suivre.
 
Allez où vont vos sœurs, essaim du Dieu vermeil
Que fait naitre & que tue un rayon de soleil ;
Aussi bien, ici-bas vous n’avez point d’asile.
  »
L’abeille, en son labeur, vous suit d’un œil chagrin,
Et la fourmi qui passe en charriant son grain,
Dit qu’en créant le Beau, Dieu créa l’Inutile.

Joséphin Soulary, prologue d’Éphémères, 1858.

2 commentaires »

  1. L’instant est éternel…

    Commentaire par Fluflo — 4 février 2009 @ 21:28

  2. L’instant n’existe pas.

    Commentaire par Miklos — 5 février 2009 @ 9:10

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