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« Je donne mon avis non comme bon mais comme mien. » — Michel de Montaigne

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17 janvier 2010

Alla breve. XXVI.

Classé dans : Actualité, Alla breve, Musique — Miklos @ 17:11

[183] La Passion selon MacMillan. Le Boston Symphony Orchestra va donner la création américaine de la Passion selon Saint Jean, commande du chef d’orchestre Sir Colin Davis, qui va la diriger, à l’occasion des 80 ans du compositeur. Comment composer une telle œuvre après Bach ? Comment être fidèle à une tradition séculaire tout en utilisant la palette des formes d’expression musicale qui ont émergé après sans pourtant tomber dans des effets de mode ? C’est ce dont discute cet article du Boston Globe. On pourra écouter et voir ici un extrait de la création allemande en mars 2009.

[184] Bach toujours d’actualité. La musique de Bach – le style, la forme, les mélodies – n’a eu de cesse d’influencer les compositeurs, petits et grands (de Mendelssohn à Webern), qui lui ont succédé, comme lui d’ailleurs s’inspirait de ses prédécesseurs et de ses contemporains. La différence entre les uns et les autres ? Pour l’exprimer, on peut reprendre pour le compte de la musique ce que T.S. Elliott disait au sujet de la poésie : “Immature poets imitate; mature poets steal.” Les musiciens interprètes l’ont aussi mis à toutes les sauces et fait entendre certains… aspects de son œuvre à un public qui ne l’aurait jamais écoutée autrement, on pense par exemple à l’excellent ensemble vocal Swingle Singers, et, avec l’apparition des synthétiseurs, au Switched-on Bach de Walter Carlos, les uns comme les autres fidèles au style et novateurs dans l’instrumentation. Le quatuor Bach to the Future, lui, adapte le genre et fait de la fusion entre le style de Bach et le modern jazz, les rythmes latino, africains ou afro-cubains, le hip-hop. Leurs fondateurs, le pianiste, Michael Silverman et son frère Rob aux percussions, ont de qui tenir : leur mère enseignait le piano, et leur père était violoncelliste dans l’orchestre symphonique de St. Louis. (Source).

[185] John Adams, un maître avec un très petit marteau. Devinez qui a exprimé ainsi son opinion de ce compositeur populaire ? Indice : il a ajouté que c’était un mannériste, un compositeur de musique de genre, et que son opéra The Death of Klinghoffer était de la mauvaise musique de film. Encore un indice ? Dans un précédent Alla breve, on a cité un entretien avec lui, dans lequel il disait que les responsables de la radio française d’après-guerre étaient des nouilles. Dernier indice : un maître avec un marteau ? et quid du Marteau sans maître ? (il s’agit d’une personnalité vivante, pas de René Char). Bravo ! Dans un nouvel entretien, anniversaire oblige, il s’exprime sur sa relation à l’orchestre en général et celui de Chicago en particulier.

[186] L’histoire de l’histoire de la musique. Dans un très bel article, l’organiste David Yearsley, organiste et professeur à l’Université Cornell, parle de deux Histoires de la musique occidentale, très différentes l’une de l’autre et chacune d’un intérêt particulier. Il s’agit d’abord de celle de Donald Jay Grout (un ami de son grand-père, et, lui aussi, professeur à Cornell des années plus tôt – il est décédé en 1987). Cet ouvrage de référence a été publié en 1960 et est depuis régulièrement réédité et mis à jour. L’autre est… une série de poèmes d’August Kleinzahler, intitulée elle aussi A History of Western Music, que cet auteur écrit depuis un certain nombre d’années. Ces poèmes ne sont pas forcément tous consacrés explicitement à un sujet musical, mais ils reflètent, dans un style très libre, léger et profond en même temps, la variété des intérêts musicaux et artistiques de l’auteur, que l’on retrouvera dans son récent ouvrage d’essais Music: I-LXXIV.

[187] The glory of the human voice, ou le culte de l’amateur, ou encore un cul-de-sac culturel. Neil McCormick analyse dans un récent article du Telegraph (suivi d’un autre, le lendemain, au vu des réactions épidermiques au premier) le phénomène Susan Boyle. Elle a certaines qualités vocales – mais sans comparaison avec les « réellement » grandes : Bessie Smith, Billie Holiday, Aretha Franklin, Dusty Springfield, voire Amy Winehouse. Artistiquement, sa plus grande réussite aura été I Dreamed a Dream, qui est déjà émouvant en soi, et son histoire personnelle – femme d’un certain âge au physique ingrat, ignorée par les hommes – a rajouté à cette émotion, mais n’a aucun rapport avec ses qualités musicales. Enfin, le contexte : d’une part, la démocratisation des médias par l’internet et la starification de l’amateur (ce n’est pas récent : cf. notre Web comme hégémonie de l’amateurisme en 2005) – ce qui nécessitait avant l’internet bien plus de moyens (on se souvient de la cantatrice amateur Florence Foster Jenkins) – et, d’autre part, la stratégie des industries des médias visant à récupérer ces tendances, que ce soit à la télévision (téléréalité et boys-bands) ou sur disque : selon l’auteur, le nombre phénoménal de disques de Boyle (éditée par Sony, bien malins) achetés en 2009 (plus de 6 millions) et le peu de téléchargements indiqueraient que ce serait un public plutôt âgé (et féminin, rajoute-t-il, en rentrant la tête entre les épaules) qui s’y intéresse, qui se détourne des icônes siliconées et botoxées qui occupent la scène et des musiques actuelles. Pour résumer Neil McCormick : no future.

[188] Valse pour téléphone portable. Le pianiste et compositeur québécois Marc-André Hamelin (que la Wikipedia en langue française ignore presque totalement, contrairement à sa contrepartie en anglais, une insulte pour le Québec, libre ou non) vient de composer une valse inspirée par la sonnerie Nokia. Nulle doute que sa mélodie (celle de Hamelin) hantera votre mémoire plus agréablement que le harcèlement d’un portable ! L’histoire ne dit pas si le public a dû éteindre ses téléphones avant le récital. (Source).

[189] Écrivez vos partitions en ligne avec vos amis. Noteflight, une petite société américaine vient d’annoncer la prochaine mise en ligne d’un service hébergé qui permet de créer, seul ou en collaboration (« réseau social », disent-ils ils – à l’instar du Concerto du Fleuve Jaune, composé dans la Chine de Mao par un comité sous la direction de Jiang Qing en 1969 ?) des partitions à l’aide d’un logiciel d’édition interactif et d’en écouter le résultat. Le compositeur peut se créer des gabarits (par exemple : pour des œuvres pour piano solo ou pour quatuor). Il y en aura une version gratuite (et donc une version payante avec plus de fonctionnalités). On peut dorénavant le tester en ligne (cliquer sur la partition qui s’affiche ou sur “Try it now”).

2 commentaires »

  1. [...] le métier. Si, comme on l’a récemment vu, tout le monde peut se transformer en graveur (de musique) – ne sommes-nous pas dans l’ère du [...]

    Ping par Miklos » Alla breve. XXVII. — 22 janvier 2010 @ 0:16

  2. [...] selon Sony, il n’y aurait eu que les Beatles et les Monkees à avoir réussi ce tour de force. Neil McCormick se serait-il trompé ? Peut-être pas : il se peut que ce qu’il ait détecté n’ait [...]

    Ping par Miklos » Alla breve. XXXI. — 19 novembre 2010 @ 2:01

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