Que l’on cherche une colocation ou à louer une chambre, on ne peut qu’être quelque peu perdu devant la pléthore des sites de petites annonces consacrées à ce marché fort féroce.
Prenons au hasard ces quatre-là : Appartager™ (consacré à la [co]location d’étudiants et de gens normaux, assez rustique dans ses interfaces, gratuit ou payant), Mon logement étudiant™ (dans des résidences et chez des particuliers, mais c’est quoi, un « logement étudiant » chez un particulier ?), Où dormir™ (pour les vacances, et sans doute pas pour les étudiants), Vivastreet™ (généraliste et beaucoup de n’importe quoi parmi ses 1 172 618 petites annonces gratuites).
Où rechercher ? où publier son annonce ? On hésite. On essaie Vivastreet d’abord (puisque c’est gratuit) et l’on est agréablement surpris qu’il propose de republier gracieusement l’annonce chez « notre partenaire Appartager ». À l’inverse, des annonces de AirBnB™, site international (192 pays, disent-ils) de bed and breakfast très bien organisé (sauf que les coûts cachés et pas si marginaux que ça pour le locataire sont difficiles à digérer) se retrouvent, on ne sait trop comment, aussi chez Vivastreet.
Si, par contre, l’on décide de s’aventurer et de publier une annonce sur Craigslist™, gigantesque site international de petites annonces (il en annonce, si l’on peut dire, des dizaines de millions par mois) notoirement connu pour ses arnaques bénino-nigériennes, on s’étonne de la retrouver aussi, on ne sait trop comment, chez Muamat™, autre site généraliste de petites annonces, qui les déforme et ne fait pas suivre à l’annonceur les réponses qu’on y dépose… On se demande bien ce qu’il en fait.
Quoi qu’il en soit, sera-t-on vraiment surpris d’apprendre que la tétrarchie de sites qu’on a mentionnée en début de ce billet a été créée une seule et même personne, Jean « Yannick » Pons, et est dirigée par une entreprise sise à Jersey (c’est astucieux) avec des bureaux à New York, Londres, Biarritz (!) et São Paulo. Les sites eux-mêmes sont hébergés aux US, auprès de leurs multiples déclinaisons dans bien d’autres langues. Ah, ces multinationales aux multiples visages… !
Alors que choisir ?* « Sous les ponts de… Paris™ ».
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* On n’a pas voulu intituler ainsi ce billet, pour ne pas être accusé de contrefaçon par le magazine éponyme.
“The day the music died.” — Don McLean, American Pie.
Ce mois de mai n’est pas si joli que ça : il est en fait pourri, on se croirait en mars ou en avril, et c’est plutôt « ne te découvre pas d’un fil » que « fais ce qui te plaît ».
C’est aussi un mois particulièrement tragique pour la musique qui voit disparaître nombre de musiciens, tous domaines confondus, pour certains mondialement connus, voire uniques en leur genre.
C’est avant tout le décès de Dietrich Fischer Dieskau (le 18, à 86 ans), que j’avais eu la grande chance et le bonheur d’entendre live lors un récital de lieder avec le non moins légendaire Gerald Moore qu’ils avaient donné dans les années 1970. Je ne suis pas le seul à m’en souvenir : c’était inoubliable : ce concert s’était tenu dans un grand auditorium, mais j’avais eu le sentiment de me trouver tout près d’eux, dans un salon de musique par exemple, voire à l’intérieur même de l’œuvre, du fait de leur extraordinaire capacité de projection et de création d’une atmosphère intimiste, et du respect « total » de la musique et du texte là où souvent l’un prend le pas sur l’autre. Interprétation idéale ? c’est un qualificatif que je n’utilise pas, il nie toute alternative passée, présente ou future (et pour ma part, j’apprécie aussi – mais autrement – celle de Hans Hotter dans le Winterreise de Schubert). Il y a, fort heureusement, les nombreux enregistrements qu’il a laissés (voire même un coffret de 25 disques compacts qu’évoque Leo Carey dans un bel article en hommage au disparu), qui restitue son grand art, ainsi que le timbre si particulier de sa voix, comme l’était – différemment, évidemment – celui de Maria Callas : il suffit d’en entendre une syllabe pour la reconnaître.
Mais la musique classique a aussi perdu (le 17, à 79 ans) la pianiste France Clidat – connue sous le qualificatif de « Madame Lizst » (que l’on devrait au critique Bernard Gavoty) – ainsi que les violonistes et pédagogues Roman Totenberg (le 8, à 101 ans), qui avait créé des œuvres de Milhaud, Szymanowksi, Hindemith ou Honegger, et Zvi Zeitlin(le 2, à 90 ans), interprète apprécié de Schoenberg et qui a joué sous la direction de grands chefs à l’instar de Rafael Kubelik, Pierre Boulez ou Antal Dorati.
Il n’y a pas que la musique classique qui a été endeuillée en mai. On a ainsi appris les disparitions de Robin Gibb (le 20, à 62 ans) des Bee Gees ; de « la reine du disco » Donna Summer (le 21, à 63 ans) ; du « parrain du go-go » Chuck Brown (le 16, à 75 ans) ; de Donald « Duck » Dunn (le 13, à 70 ans), bassiste de blues, r&b et gospel et membre de Booker T. & the M.G.’s et des Blues Brothers ; du rappeur Adam Yauch (le 4, à 47 ans), membre fondateur des Beastie Boys et aussi connu sous ses noms de scène MCA ou Nathanial Hörnblowér ; d’Everett Lilly (le 8, à 87 ans), membre du duo bluegrass The Lilly Brothers avec son frère Bea ; du batteur Peter Jones (le 18, à 45 ans), membre des Crowded House ; de Doug Dillard (le 16, à 75 ans), banjoiste des Dillards (groupe aussi connu sous le nom de Darlings) ; du guitariste de r&b Charles “Skip” Pitts (le 1er, à 65 ans), roi de la pédale wah-wah et du thème de Shaft ; du jazzman Mort Lindsey (le 4, à 89 ans), qui avait travaillé pour Merv Griffin et Judy Garland ; de Doc Waston (le 29, à 89 ans), grand folkloriste américain (voix, guitare, seul ou en groupe) à la technique imparable, aveugle quasiment depuis sa naissance, et qui a influencé plus d’une génération de musiciens américains…
Pour ceux qui s’étonneraient du rapprochement Dietrich Fischer Dieskau – Don McLean, on signalera l’élocution parfaite de ce dernier jusqu’aux moindres détails : écoutez donc Vincent (connue aussi sous le titre de Starry, Starry Night), chanson consacrée à La Nuit étoilée de Vincent Van Gogh, et dont les paroles, fort poétiques (et, avouons-le, alternant sublime et cucu la praline), intègrent des procédés littéraires particulièrement intéressants sur le plan sonore, tels les allitérations de flaming flowers that brightly blaze, avec une mélodie et un accompagnement particulièrement épurés (et notamment pour l’époque où plus la musique était tonitruante, plus elle avait de succès, comme il le dit lui-même dans un récent entretien). On écoutera avec profit aussi le très beau And I Love You So (autant pour le texte que la mélodie de la première partie), ou encore la très évocatrice Empty chairs (au texte riche en allitérations et anaphores) où il parle, d’une façon apparemment très détachée, du départ de la femme aimée.
« Comment la fausse vieille trahit sa maîtresse et comment elle fît un pertuis en la paroi de la chambre afin que le comte de Forest vît l’enseigne qu’avait la belle Euriant sur sa dextre mamelle. »
Le Maître de Wavrin, enlumineur, Lille (vers 1450-1460).
Bibliothèque nationale de France, exposition Miniatures flamandes.
« Les murs ont des yeux ; que Dieu conserve la police !
les gens de police sont d’honnêtes gens. »
(Alfred de Musset, La quenouille de Barberine)
« Les murs ont des yeux, des oreilles et une bouche dans la grande ville de Paris. »
F. V. Raspail, Rev. compl. des sc., « Constitution, infirmités et maladies de Voltaire », 1856-1857.
Le JT de France 2, le 16 mai 2012 à 20h, rapportant
la composition du gouvernement de Jean-Marc Ayrault
Avec Jean-Yves Le Drian à la culture, ceux qui craignaient l’absorption de ce ministère par celui de l’éducation et du grand écart sport sont rassurés : la culture sera bien défendue, puisque l’impétrant a été aussi nommé ministre de la défense.
L’info continue de BFMTV à l’écran, sur Twitter et sur son site,
le 18 mai 2012 à 17h
Quant à BFMTV, elle qualifie deux jours plus tard sur tous ses supports Manuel Valls de premier ministre. On se demande quel poste occupe Jean-Marc Ayrault, sur leur planète. Maire de Lille, peut-être ?
Canard et le Rossignol de la fontaine Igor-Stravinsky
Sur les bords d’une mare un canard barbotait,
Et d’un triple mérite en ces mots se vantait :
Je nage dans les eaux, je marche sur la terre,
Et si quelque ennemi me déclare la guerre,
Je puis en m’envolant l’éviter dans les airs.
Quel autre obtint du ciel des talents plus divers ?
Un rossignol qui becquetait des roses
S’approche et dit :
Faire beaucoup de choses
Tant bien que mal, ne valut jamais rien.
Il s’agit d’en faire une et de la faire bien.