Quand la pensée électronique est confuse, ou, ce n’est pas demain la veille qu’on cessera d’avoir besoin de bibliothécaires humains
« PENSÉE. — Je pense à vous. — Pensez à moi. Jolies fleurs que la couleur veloutée de leurs pétales supérieures et le jaune citron des trois autres rendent fort distinguées. » — Pierre Zaccone, Nouveau langage des fleurs, avec la nomenclature des sentiments dont chaque fleur est le symbole, et leur emploi pour l’expression des pensées. Paris, 1853.
Encore sous l’influence de l’humour fin-de-siècle, je cherche dans Google Books des ouvrages d’Alphonse Allais. Voici la liste qui s’offre à mon regard étonné :
Des pensées ? Je connais une partie de l’œuvre d’Allais, et je n’avais jamais entendu parler de celle-ci. La vignette me paraît un peu suspecte, je clique donc dessus, et voici ce qui s’affiche :
Dans le bandeau bleu, il est bien précisé Les pensées By Alphonse Allais. Pas de doute. Mais la couverture indique un autre auteur, un certain Blaise Pascal. La confusion n’aurait pas manqué d’amuser le premier. Et pour couronner le tout, à gauche, une publicité pour les Raëliens, « Jésus déteste la croix »…
On est curieux de voir comment Google Books indexe cet ouvrage multiple. On n’a pas fini d’être surpris :
C’est, selon cette bibliothèque qu’on qualifie dorénavant d’universelle, un ouvrage de fiction juvénile, d’informatique (concernant l’internet et la publication électronique) et sur la publication en général…
Et les deux cerises sur le gâteau sont les deux autres éditions de cet ouvrage que Google Books nous propose (sous l’entête « Other editions », ci-dessus) : La Bibliothèque universelle des dames, volume 2 (comme quoi, ceux qui prétendent que les pensées des dames ne sont pas à l’égal de celles des hommes se trompent), et un autre ouvrage de Pensées (volume 1). Lequel ? Le voici :
Il n’y manque plus qu’un ouvrage de botanique : la pensée, nous dit Zaccone, est une fleur « fort distinguée ». Surtout si elle est l’œuvre d’un Pascal ou d’un Descartes.